Intervention de Olivier Véran

Réunion du 11 janvier 2022 à 14h30
Gestion de la crise sanitaire — Discussion générale

Olivier Véran :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite apporter quelques éléments de réponse.

D’abord nous répondons à toute la demande de tests dans notre pays ; il faut le reconnaître et s’en satisfaire. La semaine dernière, les 12 millions de Français qui souhaitaient ou avaient besoin d’être testés ont pu l’être. Bien entendu – j’en ai pleinement conscience –, cela crée parfois des files d’attente dans les pharmacies. Je remercie d’ailleurs les pharmaciens de leur mobilisation extraordinaire. Ils ont permis de tenir cette montée en charge des dispositifs de dépistage.

J’entends surgir un nouveau débat dans notre pays : certains se demandent – ce n’était pas le sens de vos propos, mesdames, messieurs les sénateurs – si la France ne teste pas trop et s’il ne faudrait pas limiter les tests à certaines catégories de population.

J’ai l’impression d’un retour deux ans en arrière, lorsque nous ne testions que les cas graves, douteux ou spécifiques, réservant aux autres un diagnostic clinique, à l’instar de ce qui existe habituellement s’agissant de la grippe. À l’époque, on nous demandait de tester tout le monde. Pour moi, les Français qui ont un doute doivent pouvoir recevoir une réponse en bonne et due forme et savoir s’ils sont, ou non, atteints du covid. Ne cassons pas le thermomètre. Notre système tient.

Il y a eu beaucoup de débats à l’Assemblée nationale – cela ne signifie pas que ce doit nécessairement être le cas au Sénat – sur la question du passe pour les adolescents. Le choix de ne pas l’exiger pour les activités sportives, culturelles, périscolaires et extrascolaires a tout de même été approuvé – je le souligne, parce que c’est la première fois en douze textes que cela m’arrive – par les 360 députés présents, à l’unanimité moins deux voix. Un équilibre a été trouvé. Nous avons considéré que la présentation du passe vaccinal dans les bars et dans les restaurants par les adolescents se justifiait : la plupart des adolescents non vaccinés ont souvent des parents eux-mêmes non vaccinés, qui ne peuvent donc pas les emmener dans des bars ou des restaurants. Mais vous aurez l’occasion d’en débattre.

J’entends parfaitement la logique qui conduit certains à prôner la fixation dans la loi d’un seuil de péremption du passe vaccinal. Il est cohérent de se dire qu’en deçà d’un certain niveau de charge sanitaire ou épidémique, l’outil ne se justifie plus. Toutefois, l’inscription d’une telle disposition dans la loi me pose problème. Nous voyons vague après vague que les situations sont imprévisibles. Imaginez si nous avions dû envisager, par exemple, un seuil de contaminations dans notre pays déclenchant des mesures sanitaires. Qui aurait pu prédire qu’un jour, nous aurions 350 000 contaminations en vingt-quatre heures ? Le seuil, surtout fixé dans la loi, est rigide et nous empêche d’agir.

Toutefois, les dispositions actuelles relatives à l’application du passe vaccinal reposent sur la notion d’urgence sanitaire. Elles ne sont légitimées que par des motifs sanitaires. Si la situation épidémique et sanitaire n’était plus jugée compatible avec le maintien du passe, la justice ordonnerait que de tels dispositifs tombent. La loi qui a été adoptée prévoit déjà un garde-fou : un citoyen peut à tout moment saisir la justice s’il considère que l’outil n’est plus justifié au regard de la situation sanitaire et qu’il ne faut plus l’utiliser.

Le débat sur les dispositifs de repentir – faut-il passer par la loi ou par une circulaire ? – est légitime. Mais je souhaite adresser aux Français le message que vous me demandez de leur envoyer. Vous me dites qu’il faut convaincre tous les réticents ? Oui, nous faisons de l’« aller vers » ! Les médecins, les pharmaciens, les infirmiers à domicile, les sages-femmes, les kinésithérapeutes, les étudiants, les personnels des centres au domicile, les collectivités territoriales – comment les oublier au Sénat ? – et les associations sont mobilisés pour aller chercher les personnes non vaccinées.

Mais il y a aussi des personnes qui, après avoir disposé d’un faux passe ou d’un faux certificat, regrettent aujourd’hui de ne pas être vaccinées. Quand elles arrivent dans un centre de vaccination, on leur dit qu’elles sont déjà vaccinées. Elles doivent alors expliquer qu’elles n’ont en réalité pas reçu leurs doses, qu’elles ont un passe qu’elles ont payé 100 balles et qu’on leur a bidouillé. Cela arrive…

Nous leur adressons un message : « Faites-vous vacciner – c’est l’essentiel –, et nous effaçons l’ardoise. » Cela ne signifie évidemment pas que les auteurs ou les utilisateurs actuels de faux passes seront exemptés de rendre des comptes devant la justice. Mais nous avons travaillé avec les députés le dispositif de repentir.

Le virus peut circuler dans les écoles – il peut circuler partout – et les enfants peuvent se contaminer. D’ailleurs, le taux d’incidence chez les enfants est élevé. Fort heureusement, les enfants développent très peu de formes graves, même si cela arrive. Par ailleurs, ils peuvent, malgré eux – cela va de soi – transmettre le virus à des adultes. Vous connaissez certainement dans votre entourage des personnes qui ont été contaminées par leurs enfants.

Nous sommes donc obligés de continuer d’assurer un suivi épidémique et épidémiologique chez les enfants. C’est un dispositif de droit commun. Nous ne lançons pas des opérations de tests dans toutes les classes, dans toutes les écoles, car cela nécessiterait des effectifs astronomiques. Simplement, nous vaccinons et nous testons beaucoup.

Trois tests sont demandés aux enfants : un test initial antigénique ou PCR le premier jour, puis deux autotests réalisés à la maison. L’autotest est en train de devenir une pratique dans un certain nombre de familles françaises.

Dans cette période d’épidémie galopante, tout le monde est saturé. Mais, je le répète, les pharmacies et les laboratoires ont tenu : 12 millions de tests, c’est un exploit. Dans nos projections au ministère, nous tablions sur 7 millions ou 8 millions de tests au mieux. Les pharmaciens sont en train de nous montrer que nous avions tort. Je les remercie : ils ont donné un gros coup de boost la semaine dernière.

Il y a des files d’attente. Nous ne voulons pas que les parents attendent pendant des heures devant les pharmacies et soient pénalisés parce qu’ils ne pourraient pas aller travailler. Nous leur disons donc avec pragmatisme qu’ils peuvent basculer en autotest, puisque nous savons désormais que cela fonctionne. Je préfère mille fois que nous soyons capables d’adapter notre dispositif pour tenir compte de la réalité plutôt que de nous embêter avec des mesures susceptibles de nous poser plus de difficultés.

Monsieur le sénateur Jean-Pierre Sueur, tout à l’heure, vous avez fait référence à la Drees. Permettez-moi de vous indiquer, puisque les vidéos au Sénat font parfois foi…

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