Nous nous sommes prononcés en ce sens en première lecture et nous allons confirmer ce vote, en responsabilité.
Que les choses soient claires : nous votons en réalité en faveur de la vaccination, qui nous protège tant individuellement que collectivement. Sous cet angle, le passe vaccinal ne correspond pas totalement au cœur de notre sujet, dans la mesure où, entre le passe vaccinal et le passe sanitaire, il n’y a en pratique qu’une modification lexicale, si l’on excepte le fait que les tests ne sont plus intégrés dans les conditions de validité du passe.
Au-delà de cette question, en responsabilité, nous confirmons notre accord sur cette modalité.
Lors de l’examen en première lecture du projet de loi, nous avions prévu un certain nombre de garanties qui n’ont pas été acceptées par l’Assemblée nationale. Cette situation nous conduit, en cette fin d’après-midi, à nous concentrer en particulier sur la défense de deux amendements, visant, l’un, la vérification d’identité, et, l’autre, les sanctions à l’égard des entreprises, en particulier en matière de télétravail.
Le groupe centriste, à l’instar du groupe socialiste et probablement d’autres membres de notre assemblée, considère que la vérification d’identité constitue une dérive probablement excessive en matière de liberté. En outre, cette mesure place les professionnels dans une situation inconfortable, même si nous sommes bien conscients, les uns et les autres, qu’il n’y aura que très peu de vérifications d’identité dans la vraie vie. Nous imaginons mal les restaurateurs ou les ouvreuses des cinémas pratiquer ce type d’exercice !
Le second amendement a pour objet les sanctions à l’encontre des entreprises. Au moment où notre pays accuse un déficit annuel de sa balance des paiements de 77 milliards d’euros et alors que nous devons relever quelques défis économiques et nous concentrer sur la relance, sur notre compétitivité et sur notre souveraineté, le signal adressé aux entreprises par le Gouvernement, au travers de ce dispositif de contrôles et de sanctions auquel il tient particulièrement, est quelque peu curieux, voire légèrement schizophrénique. Il nous est difficile d’y adhérer.
Ces deux dispositions entretiennent un lien assez profond, me semble-t-il. Les idées de confier la vérification d’identité aux professionnels et de sanctionner les entreprises ne respectant pas le télétravail partagent une même matrice. Durant les mois de novembre et de décembre dernier, le Gouvernement avait en tête de faire en sorte que le contrôle du dispositif sanitaire soit assuré par les entreprises. Telle était sa volonté initiale, et il n’y a renoncé qu’à cause de l’opposition des entreprises et des salariés.
Il n’est pas difficile d’imaginer que ces deux éléments, auxquels tient particulièrement le Gouvernement, témoignent de la résurgence d’une idée initialement proposée par l’administration, afin de le sécuriser. On retrouve ces éléments dans ce double dispositif, qui repose d’un côté sur le fait de confier aux restaurateurs et aux responsables des autres lieux auxquels on accède au moyen d’un passe sanitaire ou vaccinal le soin de contrôler le public, et, de l’autre, sur des sanctions.
Après avoir confirmé le vote favorable du groupe centriste, je terminerai par deux remarques complémentaires.
Tout d’abord, à la décharge du Gouvernement – nous lui accordons volontiers que la tâche n’est pas facile et qu’il n’y a pas de bonne solution –, il faut prendre en compte le contexte de judiciarisation de la société française que, mes chers collègues, vous connaissez bien.
D’une certaine manière, je partage le sentiment que, à l’origine du dispositif très administratif qui nous est proposé, se trouve le souhait de l’administration de se protéger et de protéger les ministres, ce qui est parfaitement respectable.
Si la vaccination protège nos concitoyens – tel est le vrai sujet –, sans être excessifs et dire que le passe vaccinal protège surtout les ministres, nous voyons bien que, psychologiquement, ce texte protège aussi les ministres. Si je puis me permettre d’utiliser un néologisme, j’ai le sentiment de me trouver devant une loi « ministérielle ».
Par ailleurs, nous étudions en ce moment le douzième texte qui tourne autour de la notion d’urgence sanitaire. Mes chers collègues, vous vous souvenez que, depuis 2015, nous avons voté cinq textes instaurant ou prolongeant l’état d’urgence pour lutter contre le terrorisme.
Cela veut dire que, de 2015 à 2022, c’est-à-dire durant le « septennat François Hollande-Emmanuel Macron », si vous permettez cette expression novatrice, nous aurons eu dix-sept lois relatives à l’état d’urgence.