Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question de l’enseignement français à l’étranger est peu débattue, comme la plupart des sujets qui concernent les Françaises et les Français établis hors de France.
L’examen de la présente proposition de loi nous donne donc l’occasion d’aborder la question dans cet hémicycle. C’est, je le crois, un élément positif en soi.
L’enseignement français à l’étranger est face à un défi majeur : une tension très forte entre des objectifs chiffrés extrêmement substantiels annoncés par le Président de la République, doubler le nombre d’élèves à l’horizon 2030, et un abaissement des moyens fournis par l’État. C’est étrange quand on le dit comme cela, mais c’est ainsi : la volonté politique de doubler le nombre d’élèves n’est pas du tout corrélée à des mesures visant à doubler les moyens mis en œuvre par l’État.
En réalité, en 2017, le Gouvernement a même effectué une coupe de 33 millions d’euros. Entre 2016 et 2021, les personnels expatriés ont baissé de 21 %, tandis que le nombre de personnels résidents a baissé que de 7 %. Le personnel de droit local croît, de 9 %, et les détachements aussi. Mais cela ne fait en tout qu’un dixième du nécessaire.
Comme la magie n’existe pas, comment cet objectif de doublement du nombre d’élèves peut-il être rempli avec moins de moyens ?
Est-ce impossible ? Non, c’est possible. Mais cela a un coût très fort en matière de solidarité, d’égalité, de culture du service public et de traitement des enseignants.
Cela suppose de s’orienter davantage vers un système guidé par des logiques privées, où le poids des frais de scolarité pèse de plus en plus sur les parents, puisque la part d’engagement de l’État diminue. Plus précisément, c’est sur les parents qui en ont les moyens que cela pèse, la précarisation du statut des enseignants, qui permet de faire des économies, s’accentuant dans le même temps. C’est mécanique.
À notre avis, la logique de l’enseignement français à l’étranger doit au contraire être celle d’un service public, afin d’assurer un enseignement inclusif, de bonne qualité, accessible, assurant le principe républicain d’égalité des chances.
En conséquence, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, plusieurs grandes réformes auraient pu être menées.
S’agissant du réseau en lui-même, la clé est à nos yeux de renforcer la participation financière de l’État afin de juguler l’envolée des frais de scolarité. Cela signifie par exemple favoriser le recrutement d’enseignants titulaires, travailler à l’harmonisation des rémunérations et des avantages sociaux entre salariés de droit français et contrats locaux ou encore mettre en place des conventions collectives internationales et une charte sociale de respect des droits des travailleurs et des travailleuses pour obtenir le label AEFE.
Il conviendrait par ailleurs d’agir au niveau des bourses qui, cela a été dit, ont été amputées de 10 milliards d’euros. Selon nous, une augmentation substantielle du budget des bourses est au contraire nécessaire pour ne pas exclure une part de plus en plus grande de familles.
Pour réduire les inégalités, il faut par exemple modifier les barèmes d’attribution fixés en fonction de la situation économique et sociale de chaque pays. Il faut également une réforme du barème et des modes d’attribution des bourses pour les foyers monoparentaux et les couples séparés.
Dans ce contexte, la présente proposition de loi se donne deux objectifs principaux. D’une part, elle assure une plus grande représentation des familles et des anciens élèves au sein du conseil d’administration de l’AEFE. D’autre part, elle confie à cette dernière le soin de gérer les IRF, qui ont déjà été créés, le premier ayant d’ailleurs été inauguré au mois de janvier.
Nous aurons l’occasion de discuter du contenu précis des dispositions proposées lors de la discussion des articles. Mais, vous l’aurez compris, pour nous, les écologistes, la priorité aurait été de réorienter structurellement notre modèle vers une logique de service public, c’est-à-dire une logique où priment l’égalité des chances, la qualité de l’enseignement, la mixité sociale de ces centaines de milliers d’élèves que nous avons vocation à accueillir.
Nous attendons donc avec enthousiasme les débats et les votes sur les différents amendements, afin de déterminer si nous pouvons soutenir ce texte.