Intervention de Bérangère Abba

Réunion du 25 janvier 2022 à 14h30
Agences de l'eau — Débat organisé à la demande du groupe les républicains

Bérangère Abba :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de nous donner l’occasion d’échanger sur les agences de l’eau, passées, présentes et à venir.

Les agences de l’eau sont au cœur de notre politique d’intervention pour l’eau et la biodiversité dans un contexte, que vous connaissez, de réchauffement climatique, de tension sur les ressources et de défis auxquels nous devons faire face en termes de qualité des masses d’eau et de structuration de nos territoires.

Ces agences sont des opérateurs stratégiques, mais insuffisamment connus, du ministère de la transition écologique. Elles sont pourtant au cœur de la refondation de notre politique de l’eau, laquelle a été débattue dès 2017 lors d’une première séquence des Assises de l’eau portant sur la rénovation de nos dispositifs d’assainissement et d’eau potable.

En 2019, une deuxième séquence des Assises de l’eau a été consacrée à l’adaptation au changement climatique et à la gestion globale de la ressource.

Une troisième séquence, que j’anime depuis plusieurs mois avec mon collègue Julien Denormandie, se concentre sur la gestion de l’eau pour les agriculteurs. Le choix cette thématique était une évidence car, comme vous le savez, on constate trop souvent dans nos territoires les tensions qu’entraîne la pression sur la ressource, qui s’amenuise. Il nous fallait donc avoir ce débat et construire un chemin commun entre les acteurs de l’eau et les agriculteurs, lesquels doivent réinterroger certaines pratiques.

L’anticipation des conséquences du changement climatique et les tensions sur le partage de la ressource nous exposent à des enjeux toujours plus forts, s’agissant notamment de la gestion quantitative.

Ce nouveau regard, nous le portons au travers du décret que je vous ai présenté cet été. Il vise à l’amélioration de la qualité de l’eau et à la lutte contre les micropolluants et les microplastiques.

Cette lutte, qu’il convient de renforcer, trouve un écho extrêmement fort au niveau communautaire et international. En effet, l’érosion de la biodiversité se poursuivant à un rythme effréné, il nous faut préserver et restaurer les écosystèmes naturels, développer de nouvelles aires protégées et sauvegarder les zones humides, ô combien essentielles. Aujourd’hui, toutes les collectivités le savent et s’y engagent.

Les six agences de l’eau, établissements publics de l’État présents sur le territoire métropolitain, jouent un rôle central d’animation de ces débats et d’accompagnement de ces transitions. Elles sont le reflet de la gestion intégrée de la ressource en eau par comités de bassin.

Instaurée depuis cinquante ans dans notre pays, celle-ci permet d’administrer chaque bassin hydrographique de manière décentralisée, au plus près des territoires, des enjeux et des décisions des élus.

Les agences perçoivent aujourd’hui, en termes de ressources, 2, 197 milliards d’euros de redevances tenant compte, d’une part, de l’eau consommée au robinet et, d’autre part, de certaines atteintes à l’environnement – prélèvements excessifs sur la ressource ; pollutions ponctuelles et diffuses dues aux rejets d’eaux usées domestiques et industrielles, ou encore aux rejets azotés ou phytosanitaires. Ces recettes permettent aux agences de l’eau de soutenir des projets d’investissement portés par les collectivités ou d’autres acteurs, économiques ou non, mais toujours extrêmement structurants pour nos territoires.

Ces mêmes acteurs décident des financements, de leur répartition et de leurs modalités d’attribution au sein des programmes d’intervention, qui sont d’une durée de six ans. Il s’agit, dans le respect des cadrages nationaux, d’un modèle tout à fait original et qui a su s’adapter avec le temps.

Chaque million d’euros investi par les agences de l’eau engendre ou préserve de 30 à 35 emplois, ce qui représente, pour un montant d’environ 2 milliards d’euros par an, entre 60 000 et 70 000 emplois créés ou préservés chaque année dans l’ensemble des bassins.

Cet accompagnement financier essentiel pour la vie des territoires et cette démarche de contractualisation avec les collectivités locales, qui s’accompagne de larges concertations, doivent être préservés.

Comme vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur, les agences de l’eau ne sont plus aujourd’hui uniquement des agences de l’eau, car nous avons élargi leurs missions. La loi de n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi Biodiversité, accompagne ainsi leur action en faveur de la préservation de la biodiversité et des milieux marins.

Conformément au souhait du Gouvernement, les agences de l’eau ont ainsi accentué l’accompagnement des projets en faveur de la gestion du grand cycle de l’eau, de la qualité des milieux aquatiques et de l’adaptation rendue nécessaire par le changement climatique. Au-delà de la puissance financière de leurs interventions, elles ne cessent d’innover, de proposer, de tester de nouvelles réponses à ces enjeux émergents.

Les enjeux auxquels nous devons faire face indiquent très clairement que cette action doit encore être renforcée – nous partageons ce diagnostic. Dans le contexte du premier anniversaire de la stratégie nationale pour les aires protégées, et de la publication prochaine de la troisième stratégie nationale pour la biodiversité, nous devons relever ces défis avec la plus grande ambition. En matière d’intervention comme de financement, des ressources importantes doivent en effet être trouvées pour accompagner cette montée en puissance des agences de l’eau et répondre à l’urgence.

Une part notable des investissements des agences de l’eau répond toujours au besoin persistant d’amélioration des infrastructures et des réseaux d’eau potable et d’assainissement. Malgré la diversification des missions des agences de l’eau, cette capacité d’intervention demeure : au niveau national, plus de 45 % des aides allouées au sein des onzièmes programmes d’intervention des agences de l’eau visent à l’amélioration des infrastructures et des réseaux d’eau potable et d’assainissement.

Je souhaite également insister sur la nécessaire solidarité entre l’urbain et le rural, à laquelle nous sommes particulièrement attachés. Dans le cadre des onzièmes programmes, le fléchage de crédits en faveur des zones de revitalisation rurale a été accentué.

De même que nous devons toujours affirmer le principe du pollueur-payeur, nous devons en effet valoriser les aménités rurales, car les territoires ruraux contribuent à la préservation de ressources et d’une qualité des milieux essentiels à tous les Français.

Je vous rejoins donc, monsieur le sénateur, sur la nécessité de flécher les crédits en direction des territoires les plus impliqués, qui sont également ceux qui connaissent la plus grande tension. Nous devons éviter un effet de « saupoudrage » des aides, et concentrer nos actions sur les territoires qui appellent le plus d’attention – définir ces priorités est le travail des agences, en concertation avec les territoires.

Nous sommes au rendez-vous, puisque le 30 juin 2021, les agences avaient déjà octroyé plus de 700 millions d’euros, depuis 2019, aux collectivités rurales pour les aider à renouveler leurs installations d’eau potable et d’assainissement.

Ces deux dernières années, les agences de l’eau ont par ailleurs démontré leur grande robustesse et leur adaptabilité. Saluons en particulier leur mobilisation et leur engagement lors de la crise sanitaire, leur réactivité afin d’assurer la continuité de leurs services, tout comme la rapidité record de l’instruction des dossiers portés dans le cadre de France Relance.

La totalité des 260 millions d’euros alloués aux agences de l’eau dans le cadre du plan France Relance a été engagée en moins de sept mois.

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