Madame la présidente, madame, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes cette année d’autant plus attentifs au budget de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » que, dans quelques semaines, le Sénat devrait examiner le projet de loi « Grenelle I ».
Les crédits accordés pour 2009 à cette mission, d’ailleurs très vaste, qui recouvre des sujets nombreux et très divers, se répartissent en neuf programmes et s’inscrivent dans le cadre d’un plan triennal des finances publiques. À cela s’ajoute une importante réforme de l’organisation des administrations et des personnels rattachés à cette mission, sur laquelle je reviendrai tant elle nous paraît problématique au regard des ambitions affichées dans le cadre du Grenelle de l’environnement.
Lors de la discussion du précédent projet de loi de finances, nous regrettions le manque de lisibilité du budget de l’écologie. Cette année, nous n’y voyons pas plus clair !
En effet, s’il est nécessaire d’avoir une vision transversale de la politique du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, il reste que les changements de périmètres et les fusions de programmes rendent quelque peu illisible la présentation des crédits réellement alloués aux politiques environnementales. Je ne suis d’ailleurs pas la seule à le dire ! Madame, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous assurer de la pérennité des périmètres pour les années à venir ?
Cela étant dit, dans le contexte actuel, il faut noter que les crédits affectés à la mission sont en hausse. Cependant, à l’instar de mon collègue Jean Desessard, j’émettrai quelques réserves, car ce premier constat doit être relativisé lorsque l’on considère les crédits à l’horizon 2011. En effet, si la mission obtient 10, 07 milliards d’euros de crédits en 2009, le chiffre retombera à 9, 34 milliards d’euros dans deux ans.
Par ailleurs, un amendement gouvernemental, voté à l’Assemblée nationale, prévoit « une minoration des crédits d’un montant de 45 315 210 euros, destinée à financer les mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l’emploi, dont 2 229 690 euros qui seront prélevés sur le programme “Urbanisme, paysages, eau et biodiversité” ».
Cette mesure nous interpelle, car, si la situation de l’emploi est dramatique en France, l’urgence écologique existe elle aussi. Et la perte de la biodiversité est tout aussi grave que le réchauffement climatique. Les crédits alloués initialement à ce programme n’avaient rien d’excessif, d’autant plus que le projet de loi de finance pour 2009 se doit d’anticiper les engagements du Grenelle de l’environnement, notamment le renforcement de la connaissance de la biodiversité et l’élaboration de plans d’action en sa faveur, la mise en place d’une trame verte et bleue, ou encore la création d’espaces protégés.
Madame la secrétaire d’État, dans une communication relative à la préservation de la biodiversité en France et la protection des espaces naturels, vous avez d’ailleurs bien confirmé l’engagement du Gouvernement en faveur de cet enjeu majeur. Pouvez-vous nous préciser comment vous comptez financer les futurs parcs nationaux que vous entendez créer ? Nous aimerions avoir des précisions sur la façon dont l’État compte compenser la somme qui a été retirée à ce programme pour financer les mesures en faveur de l’emploi.
De plus, dans le projet de budget, est prévu un gel des dotations des collectivités territoriales. Or, une partie des mesures du Grenelle de l’environnement repose, vous le savez bien, sur l’engagement de ces dernières. Prenons, par exemple, l’inventaire des zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique, les ZNIEFF ; croyez-vous sincèrement que les collectivités qui seront chargées de la mise à jour de ces inventaires auront les moyens de le faire ?
Ajoutons que le Gouvernement confirme son habitude de financer ses choix par la dépense fiscale, ce qui n’est pas une bonne solution pour conduire une politique cohérente et efficace à long terme.
En 2007, les rapporteurs spéciaux avaient relevé l’absence de traduction budgétaire des orientations du Grenelle de l’environnement. Cela se confirme en 2008, puisque ce sont les quatre cinquièmes du financement de la réforme qui échapperont à l’autorisation budgétaire annuelle. Le plan triennal de financement du Grenelle révèle en effet que, sur les 7, 3 milliards d’euros qui seront consacrés à la mise en œuvre de ses orientations, seuls 17 % le seront sous forme de crédits budgétaires, 38 % sous forme d’allégements fiscaux nouveaux et 45 % sous forme de ressources affectées aux opérateurs ou de contribution de la Caisse des dépôts et consignations.
Ce faisant, la question du contrôle du Parlement est largement ignorée. Pourtant, par l’article 42 du projet de loi « Grenelle 1 », le Gouvernement s’engage à ce qu’il y ait une évaluation des aides publiques à caractère budgétaire ou fiscal. Peut-être pourrez-vous nous en dire plus, madame la secrétaire d’État.
Lorsque l’on examine les articles rattachés à la mission, on se rend compte que les dépenses censées être effectuées en faveur du développement durable ne sont parfois qu’un moyen détourné d’atteindre d’autres objectifs. Ainsi, si l’on prend l’article 47 du projet de loi de finances, qui modifie l’article 200 quaterdecies du code général des impôts, on s’aperçoit que la dépense fiscale connaît une augmentation de 940 millions d’euros en raison de la montée en charge de la loi TEPA. Or, avec l’éco-conditionnalité, la dépense fiscale risque de fortement baisser en 2009. On utilise donc le Grenelle pour faire baisser la dépense fiscale liée à la loi TEPA.
Pour terminer sur les remarques générales, je voudrais affirmer encore une fois la vive opposition de mon groupe aux coupes franches de personnels, qui ont été initiées par le Gouvernement dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.
Depuis plusieurs mois, les personnels du MEEDDAT se battent pour préserver les fondements de ses structures, de ses services, de ses moyens, de ses effectifs et pour défendre le service public de l’environnement, de l’aménagement du territoire et du développement durable. Ils défendent tout simplement leur métier.
Les transferts massifs de personnels vers les conseils régionaux et les nouveaux services interdépartementaux, la mutualisation des services et la réorganisation des DDE et de l’administration centrale, ainsi que les fusions expérimentales DDE-DDAF et DRIRE-DIREN et DRE se sont accompagnés de suppressions massives de postes et contribuent à mettre à mal l’ingénierie publique, à fragiliser le réseau scientifique et technique. Comment peut-on justifier de telles mesures quand on promet, par exemple, dans le chapitre II du projet de loi « Grenelle 1 » relatif à l’urbanisme de fournir aux collectivités une assistance technique ?
Nous savons ce qu’il en est aujourd’hui ; M. Bizet vient d’ailleurs de l’évoquer. Les DDE, en voyant leur masse critique réduite en termes de personnels, n’ont plus véritablement les moyens de donner des conseils, y compris aux petites communes.