Intervention de Michel Teston

Réunion du 27 novembre 2008 à 15h00
Loi de finances pour 2009 — Compte spécial : avances au fonds d'aide à l'acquisition des véhicules propres

Photo de Michel TestonMichel Teston :

Madame la présidente, madame, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme 203 « Infrastructures et services de transports » et, plus précisément, sur l’action 10 relative aux transports collectifs et ferroviaires.

Ce budget ne peut être examiné indépendamment du Grenelle de l’Environnement et de sa première déclinaison législative, qui est en discussion devant le Parlement.

L’aménagement et le développement des transports collectifs et ferroviaires répondent à quatre objectifs réaffirmés par le Grenelle de l’environnement : premièrement, la réalisation de 2000 kilomètres de nouvelles lignes à grande vitesse d’ici à 2020 ; deuxièmement, le développement du fret ferroviaire ; troisièmement, l’ancrage de notre pays dans l’Europe grâce à la constitution d’un réseau de transport européen ferroviaire ; enfin, quatrièmement, la participation à l’effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre, par le développement, à chaque fois que c’est nécessaire, de modes de transports alternatifs à la route.

Si ces objectifs de développement durable font l’objet d’un relatif consensus – je fais notamment allusion au vote positif du groupe socialiste à l’Assemblée nationale sur le projet de loi « Grenelle 1 » –, ils ne peuvent rester du domaine des bonnes intentions. Le Gouvernement doit s’engager, et ce dès la loi de finances initiale pour 2009.

Or les besoins de financement sont énormes. Pour le développement des lignes à grande vitesse, d’ici à 2020, le projet de loi « Grenelle 1 » prévoit une contribution de l’État de 16 milliards d’euros, somme qui me paraît très insuffisante.

En outre, pour atteindre les objectifs du développement durable, un très gros effort de régénération du réseau existant est nécessaire, comme l’a d’ailleurs préconisé le rapport Rivier de 2005.

Dès lors, ce projet de budget constitue-t-il la première traduction concrète du Grenelle ?

Une lecture rapide du « bleu » budgétaire pourrait le laisser croire, puisque tant les autorisations d’engagement que les crédits de paiement passent d’un peu plus de 2, 5 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2008 à un peu plus de 3, 6 milliards d’euros cette année. Or cette augmentation des crédits de 38 % est due à un artifice de présentation, avec l’intégration dans l’action 10 d’une subvention d’équilibre à l’AFITF de 1, 2 milliard d’euros.

En effet, les 4 milliards d’euros issus du produit de la vente de la part de l’État dans les sociétés concessionnaires d’autoroutes ayant été quasiment consommés, la question de l’équilibre de l’AFITF se pose dès 2009.

Pourquoi le précédent gouvernement s’est-il ainsi privé de la rente autoroutière ? Permettez-moi de l’affirmer haut et fort : c’est plus qu’une erreur, c’est une faute ! Mes chers collègues, pour vous donner une idée du manque à gagner pour l’État, je rappellerai que ces sociétés devraient dégager de 35 à 40 milliards d'euros de dividendes cumulés d’ici à la fin des concessions, en 2032. Or l’État n’aura bénéficié que des 14 milliards d'euros de la vente de ces parts en 2006, dont seulement 4 milliards d'euros ont été affectés à l’AFITF !

Autre élément d’insatisfaction, dans ce budget, les subventions de l’État aux transports collectifs en site propre et aux plans de déplacements urbains n’ont pas été rétablies, contrairement à ce qu’a affirmé l’un des orateurs qui m’ont précédé, alors même que le Grenelle le prévoyait, à hauteur de 2, 5 milliards d’euros, il est vrai d’ici à 2020.

J’en viens à l’amélioration de la performance du réseau existant, passage obligé pour atteindre les objectifs de développement durable arrêtés lors du Grenelle de l’environnement.

Dans l’audit qu’il réalisa en 2005, M. Louis Rivier, directeur de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, estimait nécessaire, selon un scénario optimal, de disposer d’une dotation de 500 millions d’euros supplémentaires chaque année pendant vingt ans pour « aboutir à un coût moyen annuel de maintenance qui soit minimal à long terme tout en garantissant un réseau de qualité ».

À la suite de cet audit, un plan de renouvellement des voies a été mis en place sur la période 2006-2010. Des enveloppes financières supplémentaires ont, certes, été votées lors des précédentes lois de finances, sans toutefois respecter totalement les objectifs du plan, qui se situaient déjà en deçà du scénario optimal préconisé par le professeur Rivier.

Le Grenelle de l’environnement a affirmé la priorité donnée au fret non routier pour les transports de marchandises et l’engagement de l’État pour l’entretien et la régénération du réseau ferroviaire.

L’objectif est d’atteindre, en 2015, un financement de 400 millions d’euros supplémentaires par rapport à celui qui avait été arrêté dans le plan de renouvellement 2006-2010 : il s’agirait d’un montant deux fois et demie plus élevé que celui qui avait été constaté en 2004, mais il resterait inférieur à celui qui avait été prévu dans le scénario optimal proposé par les experts de l’École polytechnique fédérale de Lausanne.

La régénération du réseau existant exige, en effet, des besoins de financement très importants. Il suffit, pour s’en convaincre, de se référer à un constat alarmant : pour des raisons de sécurité, des ralentissements sont imposés sur plus de 1200 kilomètres de lignes – essentiellement celles où le trafic est le plus faible – et de très nombreux kilomètres de câbles de contact de caténaire sont à remplacer.

Dès lors, sachant que ce projet de budget pour 2009 est en baisse de 1, 8 % par rapport à la loi de finances initiale de 2008, comment accorder du crédit aux annonces du Gouvernement, qui vient de signer un contrat de performance avec Réseau ferré de France de 13 milliards d’euros pour cinq ans ?

L’aide de l’État n’augmentant pas – elle diminuera même légèrement en 2009 –, RFF devra améliorer sa productivité et ses recettes.

Ce contrat prévoit la vente de terrains qui ne sont désormais plus nécessaires à l’exploitation ferroviaire, la réalisation de gains de productivité, en favorisant, notamment, le renouvellement des voies et du ballast plutôt que l’entretien ponctuel, enfin, l’augmentation des péages.

À la lecture de ce contrat, je conclus que le Gouvernement compte, en réalité, sur l’engagement des régions pour aider RFF à régénérer les lignes où circulent les TER.

À ce sujet, il convient de rappeler que l’entretien et la régénération du réseau relèvent de la compétence de l’État et non de celle des régions, même si certaines d’entre elles ont été obligées, pour des raisons de sécurité, d’y contribuer dans le cadre des contrats de projet.

Il ne faut pas oublier que les régions financent déjà intégralement le renouvellement et la modernisation des matériels des TER.

Quant à la dette de RFF, elle n’apparaît plus dans le « bleu » budgétaire : il est donc très difficile d’apprécier la situation réelle de RFF et l’état de cette dette.

La Cour des comptes, dans un rapport d’avril 2008, avait pourtant estimé qu’il appartenait à l’État de délester RFF d’au moins 12 à 13 milliards d’euros sur les 28 milliards d’euros qui constituent sa dette. Cette suggestion n’a donc pas été retenue par le Gouvernement.

En conclusion, j’indique que les membres du groupe socialiste voteront contre les crédits du programme 203, ce pour les différentes raisons que je viens d’exposer et que je résumerai ainsi : ce budget n’est pas une première traduction concrète du Grenelle de l’environnement.

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