Cette progression s’est accentuée depuis le début de la crise sanitaire. Ainsi, au cours de la session parlementaire 2019-2020, ce sont 100 ordonnances qui ont été publiées, contre 59 durant la session précédente. Leur part au sein des textes relevant de la loi s’élève à 70 %.
Nous avons le désagréable sentiment que la loi n’est plus considérée comme le processus normal de législation et, par là même, que l’exécutif dépossède les parlementaires de leur pouvoir législatif. Quelques exemples ont été donnés par notre collègue Pascale Gruny, notamment sur la haute fonction publique. Un tel recours abusif aux ordonnances ne reflète pas l’esprit initial de la Constitution de 1958. D’exceptionnel, ce phénomène est désormais devenu habituel.
En outre, la ratification de la grande majorité des ordonnances s’effectue dans des conditions qui ne donnent pas la possibilité aux assemblées parlementaires d’examiner les mesures qu’elles instaurent.
Les projets de loi de ratification sont déposés par l’exécutif, afin qu’ils ne soient pas caducs, mais leur discussion n’est pas inscrite à l’ordre du jour.
C’est là une source d’inquiétudes bien légitimes, par ailleurs accentuées par la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel. En effet, dans une décision en date du 28 mai 2020, le Conseil constitutionnel a considéré que, si le projet de loi de ratification avait été déposé dans les délais, l’ordonnance non ratifiée acquerrait une valeur législative de façon rétroactive, dès la fin du délai d’habilitation.
Monsieur le ministre, l’inscription à l’ordre du jour des projets de loi de ratification des ordonnances revêt une importance cruciale pour la démocratie parlementaire. Envisagez-vous d’y porter une vigilance accrue ?