Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en tant que président de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), j’avais cosigné la proposition de loi organique déposée en mars dernier par Jean-Marie Vanlerenberghe, puisque j’en approuvais les principaux objectifs.
À cette aune, le texte qui nous est présenté fait en quelque sorte la moitié du chemin.
Il n’élargit pas le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale. À cet égard, j’ai bien entendu les réserves exprimées par les partenaires sociaux. J’en prends acte, bien sûr, tout en leur disant qu’il faudra faire preuve de cohérence : sans association du Parlement, c’est à eux, et non pas aux impôts des Français, qu’il reviendra d’éponger la dette considérable du régime d’assurance chômage. J’espère qu’ils y parviendront, mais je crains que nous n’ayons à revenir sur ce sujet dans les années à venir. Soyons lucides, mes chers collègues !
Ce texte ne répond pas non plus à la nécessité de rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale. À cet égard, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement le veuille ou non, vingt-six ans après la création de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), il va bien falloir rapidement déterminer si l’on veut vraiment rembourser la dette sociale, ce qui impliquerait de s’en donner les moyens, y compris juridiques, ou si l’on abandonne cet objectif de responsabilité vis-à-vis des générations futures. Le « en même temps » ne sera pas éternellement tenable sur un tel sujet…
Je regrette que les réformes structurelles, en matière de retraite et de dépendance notamment, aient été abandonnées.
Nous sommes tous conscients qu’il faut, d’une part, sauvegarder notre système par répartition et assurer des retraites décentes aux Français et, d’autre part, trouver de nouveaux moyens financiers pour permettre à chaque Français de vieillir dans un environnement choisi et non subi. Même le « bien vieillir chez soi », préconisé par nos collègues Michelle Meunier et Bernard Bonne dans leur rapport sur le sujet, nécessitera de nouveaux moyens. Ces enjeux sont connus et reconnus ; malheureusement, ils n’ont pas été pris en compte par le Gouvernement.
Pour revenir au sujet qui nous réunit aujourd’hui, je reconnais que des efforts ont été faits par l’Assemblée nationale pour se rapprocher de nos propositions. Ces efforts ont été tardifs, certes, et même postérieurs à la réunion de la commission mixte paritaire, mais mieux vaut tard que jamais.
Aussi, je salue les avancées de cette proposition de loi organique en matière de normativité des lois de financement de la sécurité sociale. Les « clauses de retour au Parlement » sont une très bonne chose, cohérente avec les mesures de notre propre proposition de loi organique.
Je prends également acte de l’abandon de l’extension des LFSS aux mesures relatives à la dette hospitalière, extension à laquelle le Sénat était très opposé. Vous avez trouvé un compromis qui ressemble à du bavardage, mais qui permet à chacun de s’en tirer la tête haute – c’est l’essentiel !
Enfin, en tant que président de la Mecss, je tiens à souligner les progrès que le texte que nous allons voter permet d’accomplir en matière de contrôle, via la création des lois d’approbation des comptes sociaux.
L’envoi au Parlement de données rendues disponibles dans un format exploitable garantira aux différents rapporteurs qu’ils pourront travailler sur ces données comme ils l’entendent et les présenter comme ils le souhaitent.
Ces deux textes comportent donc des avancées intéressantes.
Mon dernier mot, monsieur le secrétaire d’État, sera toutefois pour m’étonner des incompréhensions qui ont semblé naître d’une précision que j’avais souhaité apporter. Cette précision avait trait à la nature des informations que les commissions des affaires sociales peuvent demander en vertu des pouvoirs d’investigation qu’elles tiennent de l’article L.O. 111-9 du code de la sécurité sociale.
Certains, en fin de navette, ont semblé émettre des doutes sur la constitutionnalité de ce dispositif, auquel le Gouvernement ne s’est pourtant pas opposé en première lecture au Sénat. Je rappelle donc à chacun que le Conseil constitutionnel a validé sans réserve la rédaction de cet article L.O. 111-9, qui permet aux commissions des affaires sociales des deux chambres de choisir à quels interlocuteurs elles demandent « tous les renseignements et documents d’ordre financier » qu’elles souhaitent obtenir.
Cette définition est très large. Et ces « renseignements » peuvent parfaitement concerner des sujets prospectifs. Nous avons d’ailleurs souvent usé de cette faculté sans que nul nous en conteste jamais le droit, par exemple au moment de l’élaboration du rapport sur la rénovation des relations financières entre l’État et la sécurité sociale qui, par définition, concernait l’avenir.
Je veux donc qu’il soit bien clair entre nous, monsieur le secrétaire d’État, que notre commission et la Mecss continueront demain d’utiliser la plénitude des pouvoirs que leur attribue cet article L.O. 111-9, en interrogeant comme bon leur semble toutes les administrations et tous les organismes énumérés dans cet article. Bien que les précisions que nous avions adoptées en première lecture ne soient pas toutes expressément inscrites dans la loi, nous savons que le Gouvernement est disposé à ce que nos demandes d’information continuent d’être satisfaites ; n’hésitez pas à nous le confirmer !
Les membres de mon groupe et moi-même, suivant l’avis de la commission, voterons les deux propositions de loi adoptées par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.