Madame la présidente, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous discutons aujourd’hui d’un texte à l’enjeu très ciblé, peut-être trop ciblé, d’ailleurs, ce qui le rend incomplet, mais qui a le mérite de rappeler à tous que l’usage du numérique fait partie intégrante du quotidien de nos enfants, et qu’ils sont confrontés de plus en plus jeunes à ses dangers.
L’enjeu est crucial, car il s’agit de la protection des mineurs face au développement exponentiel du numérique et de notre rôle de législateur dans le cadre de la révolution numérique que nous connaissons.
Si internet est un outil formidable d’éveil sur le monde et d’épanouissement, il peut a contrario, sans cadrage, être dangereux et exposer les plus jeunes à des contenus inappropriés qu’ils ne sont pas à même de gérer. À l’âge de 12 ans, près d’un enfant sur trois a déjà été exposé à un contenu pornographique. À cela s’ajoutent les effets néfastes de la surexposition aux écrans, problème que ma collègue Catherine Morin-Desailly développera.
Nous ne pouvons non plus ignorer l’impact de la pandémie sur l’usage d’internet, qui a provoqué une hausse sans précédent de l’exposition aux écrans.
Si l’on estimait à trois heures par jour le temps moyen d’utilisation chez les enfants de 3 à 17 ans, nous avons assisté, je le répète, à une hausse sans précédent, puisque, de mars à mai 2020, le taux d’exposition quotidien des 6-12 ans était d’environ sept heures. Malgré l’installation d’un contrôle parental, les risques restent réels, que ce soit sur l’ordinateur familial, le téléphone ou la tablette d’un camarade.
Autre chiffre à noter : 44 % des parents ne se sentent pas assez accompagnés dans l’encadrement de la pratique numérique de leurs enfants. Le rapport du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) de janvier 2020 relève leurs attentes et rappelle qu’il est essentiel d’être à leurs côtés.
Le législateur doit accompagner les parents dans l’éducation numérique, certes, mais il reste difficile d’agir efficacement et directement auprès de ces derniers.
Nous n’ignorons pas les outils mis à leur disposition dernièrement sur internet, comme le site d’informations « jeprotegemonenfant.gouv.fr ». Cependant, la majorité des parents ne font pas spontanément la démarche de s’informer. Ces outils sont donc, de toute évidence, insuffisants.
Nous, parlementaires, devons élargir les moyens d’action. Un accompagnement pédagogique doit être mis en place parallèlement, pour encourager le dialogue avec l’enfant et développer son sens critique. Aussi, l’école reste le lieu idéal pour agir.
L’école à l’ère du numérique, au-delà du déploiement matériel, suppose la formation continue des enseignants aux nouvelles technologies. Eux aussi peuvent se sentir parfois dépourvus pour accompagner la révolution numérique.
Des progrès doivent encore être accomplis par l’éducation nationale, particulièrement dès l’école primaire. En effet, des études montrent que 95 % des enfants peuvent réussir lorsque des méthodes d’enseignement appropriées sont déployées très tôt.
Notre conviction est que l’école primaire doit être la priorité absolue du numérique éducatif. Toute initiative est donc à encourager pour agir auprès des enfants dès le primaire. Je citerai l’expérimentation du « permis internet », mise en place en 2013 pour les enfants des classes de CM2, qui a produit des effets positifs, comme j’ai pu le constater sur mon territoire.
Une revisite de ce dispositif est à envisager. Sans doute le « permis internet », dans sa version originale, devrait-il être de nouveau évalué et adapté aux besoins actuels des enfants et des enseignants. Pourquoi ne pas le rendre obligatoire pour tous les élèves des classes de CM2 ?
Enfin, cette loi, une fois votée, va s’appliquer dans un cadre donné et ciblé.
Les mêmes questions et les mêmes enjeux vont se poser avec les nouvelles technologies extrêmement évolutives, telles que les robots et l’intelligence artificielle, qui ont un impact croissant sur notre société. Il me semble essentiel d’aider les enfants à comprendre de quoi il s’agit, de leur donner des repères et de trier le vrai du faux.
Les robots et l’intelligence artificielle sont très présents dans les médias, mais finalement mal connus. Est-ce du fait de craintes excessives ou, à l’inverse, d’une confiance aveugle ? Il n’est pas facile, surtout pour les enfants, de comprendre de quoi l’on parle et pourquoi l’on en parle autant. Je lisais, encore récemment, un article sur l’influence des robots sur les enfants et la tendance de ces derniers à suivre leurs ordres.
Ces questions doivent être posées pour accompagner et protéger les enfants de l’usage du numérique, …