La situation singulière de la Compagnie nationale du Rhône explique la relative facilité avec laquelle la France a pu obtenir la prolongation de la concession pour dix-huit années supplémentaires, soit jusqu’en 2041. Cela a été rappelé à maintes reprises, la CNR a été privée de l’exploitation des barrages de 1946 à 2006 en raison de la nationalisation de la production de l’énergie.
Que le Parlement puisse avoir son mot à dire, alors que la prolongation de la concession d’aménagement du Rhône pouvait intervenir aisément par décret, constitue à mon sens un point très positif. Toute consultation démocratique sur la politique énergétique de notre pays, qui implique des engagements à très long terme, ne peut être que bénéfique.
Néanmoins, ne nous réjouissons pas trop vite s’agissant de l’avenir de notre patrimoine hydraulique. Nous ne sommes en effet qu’à l’entrée du tunnel des contentieux en cours relatifs à l’application de la directive européenne du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession, dite directive « Concessions ».
Rappelons-le, 150 concessions arriveront à échéance l’année prochaine. Une issue, de préférence favorable à notre souveraineté énergétique, doit être rapidement trouvée afin de déclencher une dynamique d’investissement dans un secteur clé pour la transition énergétique, qui ne peut se passer ni de la houille blanche ni de solutions de stockage de l’électricité, conditions sine qua non pour atteindre l’objectif de 40 % d’énergies renouvelables dans notre mix électrique. Les programmes pluriannuels quinquennaux apporteront ainsi 500 millions d’euros d’investissements.
Outre sa mission relative à la production d’énergie hydraulique, cette concession revêt également un caractère stratégique pour les territoires parcourus par le Rhône, que ce soit dans le domaine de la navigation fluviale ou de l’agriculture.
Il convient d’être particulièrement vigilant quant à la gestion quantitative et qualitative de l’eau, sachant l’enjeu qu’elle représente pour l’agriculture locale, fortement dépendante de l’irrigation.
La prolongation accordée permettra donc de poursuivre les trois missions historiques à l’origine de l’aménagement du Rhône, conformément à la volonté insufflée dès le départ.
Comme cela a été dit en première lecture par mon collègue Henri Cabanel, la modernisation des contrats de concession doit être poursuivie dans l’ensemble des domaines d’intervention de l’État, notamment lorsque celle-ci nous engage pendant près d’un siècle. Les prérogatives de puissance publique ne s’usent que si l’on ne s’en sert point !