Par exemple, la situation au Sahel constitue un très sérieux avertissement. Occupé à suivre les Américains en Afghanistan, le Gouvernement a négligé cette partie de l’Afrique qui nous est si proche. Certes, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale évoque la région sahélienne et la constitution d’une zone de non-droit source de dangers, mais les actes n’ont pas suivi ! L’œuvre de prévention n’a pas été réalisée, et aujourd’hui il faut réagir dans l’urgence, sans avoir l’initiative, en allant sur le terrain choisi par l’adversaire ! Ce n’est pas la meilleure façon d’assurer la sécurité. Sous la conduite du Président de la République, la France a fait preuve d’un curieux strabisme stratégique. Année après année, l’effort diplomatique, militaire, économique de la France s’est détourné de cette zone.
Pourtant, des signes avant-coureurs de la dégradation de la situation n’ont pas manqué de nous alerter, tels que l’émigration massive de personnes choisissant, au péril de leur vie, de quitter leurs terres pour tenter de survivre, la violence, le banditisme, le terrorisme qui ont proliféré depuis des années sur le terreau des États en faillite.
Nous l’avons dit hier, nous le redisons aujourd’hui : il faut tout mettre en œuvre, dans le cadre de la loi, pour lutter contre le terrorisme, se montrer implacables, s’attaquer aux sources de cette menace. La protection de nos ressortissants est une mission essentielle de l’État.
Ne venez donc pas nous accuser d’angélisme ou de je ne sais quelle tolérance malvenue. Au nom du groupe socialiste, je persiste et je signe : l’extrémisme, le terrorisme, la violence aveugle qui tue les innocents sont les fruits de la misère, de l’obscurantisme, de l’injustice et de la non-assistance aux peuples en danger ! Les minorités violentes qui dévoient l’islam pour tenter de justifier leurs actes sont le produit malsain de situations malsaines !
Dans ce domaine, l’action de la France, de l’Europe doit s’exercer avec fermeté, mais aussi avec créativité, en affirmant notre autonomie de décision. Je partage votre analyse sur ce point, monsieur le président de la commission. Hélas ! le tropisme américain du Président de la République nous a portés sur un autre chemin.
Certes, il n’est pas dans notre intérêt que l’Afghanistan redevienne un foyer de terrorisme intégriste, mais pendant que nous nous engagions dans ce pays, nous avons laissé prospérer un autre foyer aux portes mêmes de la Méditerranée. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette diplomatie atlantiste !
Je pense qu’il faut modifier, renouveler, revoir les méthodes et certaines actions de la France en Afrique ! Notre pays ne peut pas agir en 2011 comme si nous étions encore en 1960. Mais il ne fallait pas jeter le bébé avec l’eau du bain, si je puis m’exprimer ainsi ! La méthode frénétique employée par le Président de la République a conduit à abandonner sans recréer une présence, à renoncer à des actions et à des initiatives sans les remplacer par de nouvelles.
Limité dans son action par des moyens financiers en déclin, pressé par une volonté de coller à l’allié américain en Afghanistan, obnubilé par le retour dans le giron de l’OTAN, le Président Sarkozy a négligé, à notre sens, une partie du monde que l’histoire et la géographie ont placée au côté de notre pays.
Plus grave encore, la France n’a pas su non plus, ces dernières années, être un vecteur de démocratie, de progrès économique et social ; elle est restée liée à des élites corrompues et déclinantes, perdant ainsi la confiance des peuples africains.
L’édification de murs bureaucratiques infranchissables en guise de politique anti-immigration, une course effrénée derrière le Front national ont fini de discréditer notre pays et l’Europe. D’autres concurrents viennent ramasser la mise, et il n’est pas sûr que ce soit au bénéfice des populations africaines…
Pour conclure, madame la ministre d’État, je dirai quelques mots sur l’Afghanistan.
Le Parlement doit pouvoir débattre de la poursuite de la participation française à cette guerre. Madame la ministre d’État, comme l’article 50-1 de la Constitution vous y autorise, vous pourriez soumettre au Parlement une déclaration sur l’Afghanistan qui soit suivie d’un débat et d’un vote. Au nom du groupe socialiste, je vous demande de bien vouloir le faire !