Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici réunis pour l’examen en nouvelle lecture de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement. Cet examen sera probablement bref, à l’image des lectures précédentes, car une motion tendant à opposer la question préalable a été déposée par votre commission des affaires sociales.
Nous avons eu l’occasion d’échanger à plusieurs reprises, y compris récemment, si ce n’est sur le fond du texte, à tout le moins sur le sujet important du droit à l’avortement.
Permettez-moi de rappeler en quelques mots l’impérieuse nécessité qui s’impose à nous de défendre sans relâche le droit essentiel à l’avortement et les actions du Gouvernement en ce sens.
Nous avons en effet constaté à plusieurs reprises ces derniers mois que ce droit chèrement acquis était loin d’être garanti et pouvait rapidement être remis en cause par ses opposants, de manière plus ou moins explicite ou, au contraire, insidieuse.
Je souhaite à ce titre réaffirmer l’engagement plein et entier du Gouvernement à défendre sans relâche le droit des femmes à avorter en toute sécurité et dans le respect de leur choix, éclairé par un accès à des informations fiables et objectives, et au plus près de leur lieu de vie.
Tout au long de la crise sanitaire, nous avons pris des mesures spécifiques pour nous assurer que les droits sexuels et reproductifs soient garantis et que le droit inaliénable à l’avortement soit pleinement effectif, malgré les circonstances.
Le ministère des solidarités et de la santé a par ailleurs porté haut et fort l’exigence de renforcer sans cesse l’accès à l’offre d’interruption volontaire de grossesse (IVG) en tout point du territoire, afin de ne laisser aucune femme sans possibilité d’exercer son droit.
Je rappelle à ce titre plusieurs avancées fortes en la matière, avec l’augmentation des délais pour réaliser une IVG médicamenteuse en ville jusqu’à sept semaines de grossesse, avec la faculté, en fonction du choix et de l’état de santé des femmes, de recourir à la téléconsultation.
Cette mesure, prise dans le cadre de la crise sanitaire, sera très prochainement pérennisée, sur le fondement des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) d’avril 2021. Le décret nécessaire à cette évolution vient d’être examiné par le Conseil d’État et sera publié dans les tout prochains jours.
Les IVG instrumentales en centres de santé peuvent désormais être mises en œuvre, le décret en précisant les conditions ayant été publié au mois d’avril dernier. Cette avancée contribuera à améliorer le maillage en établissements pratiquant l’IVG, donc l’accès effectif à l’avortement dans l’ensemble du territoire.
L’expérimentation pour la réalisation des IVG instrumentales par les sages-femmes en établissement de santé a par ailleurs été lancée par la publication des textes d’application au mois de décembre dernier.
Cette démarche doit conduire à la sélection d’une cinquantaine d’équipes et au démarrage des tout premiers projets d’ici à la mi-2022. Elle constitue une étape importante pour poser les bases d’une pratique qui facilitera l’organisation des équipes hospitalières pour répondre aux demandes d’IVG et apportera aux femmes un nouvel interlocuteur possible dans leur parcours d’IVG.
Enfin, avec la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, le tiers payant intégral obligatoire est dorénavant prévu pour toutes les femmes sur les dépenses prises en charge par l’assurance maladie obligatoire, soit 100 % des frais liés à l’IVG, dans le cadre de forfaits de prise en charge. À ce tiers payant s’ajoute la garantie du respect du secret sur la prise en charge de ces frais pour toutes les femmes.
Permettez-moi aussi d’évoquer ces questions essentielles que sont l’information, l’éducation à la vie affective et la promotion de la santé sexuelle.
La feuille de route 2021-2024 de déclinaison de la stratégie nationale de santé sexuelle publiée le 1er décembre dernier comprend, à ce titre, des actions concrètes pour renforcer la promotion, l’information et l’éducation à la santé sexuelle.
Elle réaffirme également la nécessité d’une offre en santé sexuelle lisible, accessible et en proximité des lieux de vie, avec une action dédiée au renforcement de l’accès à l’IVG pour conforter l’exercice effectif de ce droit en tout point du territoire.
Ces objectifs se sont traduits par de premières mesures concrètes qui ont été adoptées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. Il en est ainsi de l’extension de la consultation longue santé sexuelle à tous les jeunes jusqu’à 25 ans, pour que la santé sexuelle ne continue pas d’être vue comme une affaire de femmes, et de l’accès gratuit à la contraception pour les femmes jusqu’à 25 ans, pour tenir compte des vulnérabilités économiques et sociales des jeunes adultes.
Enfin, le Gouvernement s’est engagé de manière très ambitieuse pour renforcer la place, tout à fait essentielle, de la profession de sage-femme dans nos politiques de prévention et de santé sexuelle et reproductive.
J’ai notamment à l’esprit le renforcement de leurs missions dans le cadre de la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite RIST, à la signature du protocole d’accord avec la profession au mois de novembre dernier pour revaloriser significativement les carrières des sages-femmes ou encore à la création d’une sixième année de formation initiale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, au mois de décembre 2020, le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) a rendu son avis sur l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG. En axant sa réflexion sur les principes d’autonomie, de bienfaisance, d’équité et de non-malfaisance à l’égard des femmes, il a considéré qu’il n’y avait pas d’objection éthique à allonger le délai d’accès à l’IVG de deux semaines.
Cependant, pour faire progresser concrètement le droit des femmes à disposer de leur corps, comme l’a également rappelé le CCNE dans son avis, il faut résolument poursuivre l’amélioration de leur parcours, pour que les IVG dites tardives soient mieux prises en charge, et sans délai.
C’est un droit des femmes et c’est notre responsabilité d’en permettre à chacune d’entre elles le plein exercice, selon son choix, sa situation et son lieu de vie.
Le Gouvernement défend farouchement ce droit des femmes. Notre devoir est de le renforcer et d’améliorer son effectivité. Les différentes mesures que j’ai brièvement rappelées y contribuent directement et de manière concrète.
Quant à la question posée par ce texte, elle relève pleinement de la représentation nationale. Le Gouvernement s’en remettra donc à la délibération qui résultera du débat parlementaire, tout en ayant créé les conditions pour que ces travaux puissent aboutir définitivement avant la fin de la législature.