Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 18 janvier 2011 à 14h30
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

S’il existe une crise de confiance à l’intérieur de la police, de la gendarmerie et de la justice, les lois successives que nous avons examinées ces dernières années ne l’auront aucunement atténuée, bien au contraire.

Cela étant rappelé, on ne peut que constater, pour le déplorer, que l’Assemblée nationale en a encore rajouté dans le sécuritaire. Ce n’est pas sans raison que plusieurs organes de presse notaient que ce projet de loi était devenu le véhicule législatif des mesures sécuritaires annoncées l’été dernier par le Président de la République. Il s’agit donc d’un texte réactionnel – un mot qui n’a pas le même sens que réactionnaire, je vous l’accorde, chers collègues de la majorité.

Dans l’intérêt de tous, il convient de tempérer le texte qui nous vient de l’Assemblée nationale. En ce qui concerne la vidéoprotection, qui n’est pas la panacée en matière de sécurité, même si elle peut constituer un progrès dans certains cas, l’article 17 étend les possibilités d’installation et d’usage sur la voie publique à des personnes morales de droit privé, après simple information du maire.

Le Sénat avait prévu que la CNIL, pourrait exercer un contrôle des systèmes installés. L’Assemblée nationale a refusé que le contrôle puisse s’exercer selon les principes de la loi « Informatique et libertés ». Elle a également supprimé la possibilité pour la CNIL, possibilité qui avait été introduite par le Sénat, de mettre en demeure un responsable de traitement de faire cesser un manquement et de prononcer un avertissement public.

Mes chers collègues, ces dispositions sont contraires à la jurisprudence administrative. J’espère que la position du Sénat l’emportera.

L’article 23, introduit par le Sénat contre l’avis de la commission, a pour objet d’étendre aux primo-délinquants auteurs de violences volontaires le dispositif des peines planchers, qui ne sont à l’heure actuelle applicables qu’en cas de récidive.

Si le Sénat avait limité son champ aux violences les plus graves, punies de dix ans d’emprisonnement et ayant entraîné une incapacité temporaire de travail supérieure à quinze jours, l’Assemble nationale a considérablement étendu le champ de l’article et a supprimé le principe d’aménagement des peines inférieures ou égales à deux ans d’emprisonnement, posé par la loi pénitentiaire.

Le durcissement du dispositif pose naturellement la question de la logique poursuivie dès lors que la prison demeure un facteur de récidive et que ne sont pas réunies aujourd’hui les conditions permettant véritablement la réinsertion des détenus, ce que chacun sait.

Se pose également la question de la constitutionnalité du dispositif, puisque, comme cela est rappelé dans le rapport de notre collègue Jean-Patrick Courtoisle Conseil constitutionnel n’avait validé, en 2007, le principe de la peine plancher qu’en raison de la condition de récidive légale.

L’article 23, introduit par le Sénat sur proposition du Gouvernement, tend à allonger la période de sûreté pour les auteurs de meurtre ou assassinat contre les personnes dépositaires de l’autorité publique. Notre assemblée avait subordonné ce dispositif à l’existence d’une circonstance aggravante, disposition supprimée par l’Assemblée nationale.

L’article 23 vise à étendre le champ d’application de la surveillance judiciaire aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à cinq ans en état de nouvelle récidive.

L’article 23 prévoit de recourir à une procédure de convocation par officier de police judiciaire à l’encontre d’un mineur, ce qui est pour le moment impossible et interdit. On peut déjà s’étonner d’une telle disposition, alors que la Chancellerie travaille aujourd’hui sur une réforme globale du droit pénal des mineurs.

L’article 24 .

De la période de sûreté aux peines planchers et, bientôt, aux jurés populaires en correctionnelle, nous avons l’illustration constante d’une méfiance devenue systématique, j’allais dire épidermique, à l’égard de la magistrature, …

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