Ce n’est pas une critique, monsieur le sénateur ! Vous, vous vous êtes montré un peu critique ; moi, pas du tout.
Je veux que nous prenions conscience de ce phénomène, qui est sans doute la préoccupation majeure des responsables africains aujourd’hui. Cette question a d’ailleurs été au centre de la dernière assemblée générale de l’Union africaine il y a quinze jours, au cours de laquelle le président du Sénégal, Macky Sall, a été élu président de l’organisation. Cette question est également majeure pour notre avenir à nous, Européens, au même titre que les risques en provenance du Moyen-Orient.
Monsieur Richard, il est vrai que nous devons faire des efforts en termes de contre-offensive dans le domaine de l’information. Si le terrorisme pénètre partout, certaines manipulations sont le fait d’États, et pas seulement de la Russie, et nécessitent un partenariat nouveau avec les Africains. J’y reviendrai.
Il est vrai, comme l’a dit M. Retailleau, qu’il est difficile d’agir dans un État quasi failli. C’est un constat ! C’est bien dans les interstices, dans les failles des États affaiblis et non structurés, que se développe le terrorisme. C’est une raison supplémentaire d’accompagner les pays africains dans l’affirmation de leur démocratie, en particulier grâce à des partenariats avec l’Union européenne.
Mme la ministre des armées y a fait référence, mais je le rappelle à mon tour, notre position au Sahel, à la fois militaire et civile, n’a cessé d’évoluer.
Nous sommes passés d’un engagement proche d’une substitution à l’armée malienne – c’était au début de l’opération Barkhane – à un partenariat avec cette armée, puis à un engagement étendu : à l’ensemble du Sahel, dans une logique de soutien à la force conjointe du G5 Sahel, puis à d’autres pays voisins ; à nos partenaires européens et internationaux – mise en place de la Minusma, de la mission EUTM Mali et de la force Takuba. Nous avons donc toujours été dans le mouvement.
J’ajoute que notre action a été régulièrement soutenue – certains semblent ne pas l’avoir relevé – par des résolutions des Nations unies. La question de la Minusma a toujours fait l’objet d’un débat annuel au Conseil de sécurité – le prochain aura lieu à la fin du mois de mai prochain.
Cette mutation et cette agilité d’adaptation se traduisent aussi dans le domaine civil.
Il a été fait état d’insuffisances de développement. Je rappelle que, parallèlement à la mise en œuvre de l’opération Barkhane, après Serval, nous avons lancé l’Alliance Sahel, avec les Allemands. L’Alliance Sahel réunit vingt-cinq États : les cinq pays africains du Sahel et vingt partenaires extérieurs, dont l’Allemagne, la France et plusieurs pays européens. Elle est présidée par l’Espagne. Depuis son lancement, elle a mobilisé 22 milliards d’euros pour l’ensemble de la zone. Grâce à elle, près de 6 millions de Sahéliens disposent désormais d’eau potable, 600 000 foyers ont accédé à l’électricité, et quelque 2 300 magistrats ont été formés.
Parallèlement à l’action militaire, nous avons mobilisé nos partenaires, européens en particulier, pour que l’Alliance Sahel devienne une réalité. L’Agence française de développement (AFD) y a contribué de manière significative, avec d’autres : ce n’est pas uniquement une affaire française.
Il importe surtout, lorsque des territoires sont libérés de la présence terroriste, d’accompagner immédiatement le retour de l’État. Si on ne le fait pas, on laisse la porte ouverte au retour d’autres terroristes. Vous avez bien noté que Daech et Al-Qaïda sont en conflit entre eux et que cette conflictualité contribue en elle-même à la diffusion du terrorisme.
M. Retailleau soulevait la question de la présence de l’État. Le retour de l’État dans les territoires libérés est essentiel : retour de l’école, retour du dispensaire, de la sous-préfecture, là où il y en a…