Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du 24 février 2022 à 10h30
Dépôt du rapport public annuel de la cour des comptes suivi d'un débat

Pierre Moscovici :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ma réponse sera extrêmement brève.

Avant tout, je tiens à vous remercier d’avoir pris part à ce débat. Le Sénat a pour habitude de l’organiser une semaine après la remise du rapport public annuel de la Cour des comptes : c’est un délai suffisant pour éviter les réactions à chaud, offrir une perspective différente et aller plus au fond des sujets.

Bien sûr, je n’ai pas à commenter la diversité des points de vue exprimés : ils reflètent des convictions personnelles, des engagements politiques et sont autant de contributions au débat. Je me contenterai d’insister sur deux points.

Le premier point, c’est la question des finances publiques, évoquée par beaucoup d’entre vous. À cet égard, la position de la Cour, à la fois précise et subtile, ne saurait être caricaturée ou instrumentalisée.

Nous sortons d’une crise économique très profonde, liée à la crise sanitaire. Nos finances publiques étaient dégradées avant cette crise, elles le restent après, et cette question sera inévitable, demain, quels que soient ceux qui auront à diriger le pays.

Nous avons rendez-vous avec la question des finances publiques.

La Cour ne fait pas de la dette un totem ou un tabou. Elle ne prône pas je ne sais quelle austérité. Elle n’est pas pour le retour à un ordre ancien, pas davantage pour un ordre nouveau. Elle souligne simplement un certain nombre de problèmes, dont l’existence est tout à fait objective, et face auxquels nous devons marcher sur deux jambes.

Nous avions déjà préconisé cette stratégie de finances publiques dans le rapport remis en juin dernier au Président de la République et au Premier ministre. Il faut davantage de croissance dans notre pays et, pour cela, des investissements seront nécessaires.

En effet, nous avons des retards à combler. Nous avons une compétitivité à défendre et une attractivité à garantir. Nous devons investir dans la transition énergétique, dans la transition numérique, dans l’innovation et la recherche. Or, dans ces domaines, nous avons constaté un certain nombre de décrochages tout à fait préoccupants.

Je le soulignais hier en présentant notre rapport devant votre commission des affaires sociales : les Ehpad exigeront des investissements. Nous ne disons en aucun cas qu’il n’y a pas de dépenses à faire ! Mais, en même temps, notre dette publique atteint un niveau extrêmement élevé et sa pente de réduction n’est pas garantie. Nous devons traiter ce problème.

Monsieur Delahaye, je reprends le terme que j’ai employé au début de notre discussion : ce travail passe par la maîtrise de la dépense publique. La Cour ne propose pas pour autant d’imposer l’austérité à nos politiques sociales. Elle constate simplement que, dans certains secteurs, nous dépensons beaucoup plus que nos partenaires européens sans que notre performance soit supérieure.

Monsieur Féraud, je ne dis pas que c’est systématiquement le cas ; mais on peut dépenser mieux et dépenser moins, avec une performance plus forte et – j’en suis également persuadé – avec davantage de justice. En effet, il faut mettre un terme à un certain nombre de dysfonctionnements.

Monsieur Bocquet, j’observe dans vos propos une évolution idéologique intéressante et une référence nouvelle, celle des marchés. On peut bien sûr leur faire confiance, mais, quoi qu’il en soit, ils suivront attentivement la manière dont nous entendons traiter la question de la dette publique. Or il faudra la traiter. C’est absolument inévitable, car la dette publique ne sera pas annulée, même si elle peut être bien gérée.

À cet égard, permettez-moi de vous renvoyer à un rapport que nous avons présenté hier devant la commission des finances de l’Assemblée nationale – nul n’est parfait. §Ce travail confirme la bonne gestion de notre dette tout en relevant les réformes et les défis qui sont devant nous.

Le second point que je tiens à souligner, c’est l’excellence de notre coopération avec le Sénat. Il s’agit, pour nous, d’un sujet extrêmement important.

Plusieurs rendez-vous nous attendent. Votre commission des finances nous a demandé un certain nombre de rapports, qu’il s’agisse de la scolarisation des élèves allophones, de l’installation des agriculteurs, du financement des collectivités territoriales – ce sujet suppose, bien sûr, une enquête extrêmement vaste – ou de l’adaptation du parc de réacteurs nucléaires au changement climatique. En parallèle, votre commission des affaires sociales nous a demandé de nous pencher sur Santé publique France et sur le « 100 % Santé ».

S’y ajouteront des rendez-vous récurrents. Au mois de juin prochain, je présenterai ainsi devant vous le rapport public annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques. Ce sera l’occasion de faire le point au lendemain des échéances démocratiques et de se projeter dans la nouvelle mandature. Je le répète, la gouvernance des finances publiques exigera un certain nombre de dispositions le moment venu.

Nous travaillerons aussi sur nombre de questions qui intéressent la Haute Assemblée. Je tiens à vous signaler que nous avons déjà arrêté le thème de notre rapport public annuel pour 2023 – il s’agit non plus désormais d’un florilège, d’un patchwork, mais d’un rapport thématique.

Ce rapport traitera de l’organisation territoriale.

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