Je vous rejoins pleinement. Sur l'île de La Réunion, la mer est plutôt source de difficultés que de perspectives positives. Nous sommes confrontés à un problème de maritimisation des Français. Comme l'a indiqué le Président de la République, le XXIe siècle sera maritime. Nous devons donc dire aux Français de tous âges que cette maritimisation est géopolitique. Il faut dépasser l'aspect réducteur qui limite la mer à la navigation. Nous avons un problème de programme scolaire. Je vous invite fortement à auditionner l'Éducation nationale pour connaître l'état de la formation des futures forces vives de la nation quant à la capacité maritime de la France. Si nos connaissances sont obsolètes, nous ajoutons des problèmes au problème. Nous avons signalé cet enjeu d'acculturation des forces vives de la nation, quelle que soit leur tranche d'âge.
Même en étant un département français depuis des décennies, nous rencontrons encore des problématiques de distribution d'eau, d'accès aux soins. Outre les retards pris dans l'égalité réelle, nous souffrons d'une limite budgétaire. Regardez le taux d'endettement de toutes les collectivités d'outre-mer. Nous sommes enfermés dans un corset qui n'est pas équitable. Nous devrions bénéficier d'un budget de droit commun, avec des endettements conformes à la nation et d'un budget dit d'égalité réelle. Aujourd'hui, le taux d'endettement de La Réunion est très important, car nous sommes à la fois en croissance démographique et en rattrapage structurel.
La France océanique doit se traduire dans des programmes éducatifs, une territorialisation de la gouvernance et des fléchages État-région dans les CPER. Si le triptyque d'un cadre éducatif spécifique, d'une gouvernance partagée et d'un cadre financier adapté à cette ambition n'est pas réuni, tout le reste sera discours.
J'ai bien tenu ce discours auprès de Sébastien Lecornu, de François Guillotou de Kerever et du Président de la République lorsque celui-ci est venu à La Réunion. Pour autant, en parler ne suffit pas. Il s'agit d'un combat de longue haleine. J'espère avoir planté une graine avec cette audition. En continuant de nous appeler « France hexagonale et outre-mer », je ne sais pas si nous parviendrons à une disruption géographique. Nous devons passer à une géographie 4.0 et refondre notre perception des contours de la République et de la France. Chacun de nous doit le dire à la place qui est la sienne.
Une fenêtre nous est d'ailleurs donnée avec le cadre RUP. Ce cadre sera adopté en mai 2022. Il est encore temps de le porter au-delà des contours de l'Europe continentale et d'en faire une ambition pour l'Europe océanique. Si l'Europe ne comprend pas sa dimension océanique, elle éprouvera des difficultés à gérer ses relations avec la puissance chinoise.