Je comprends que vous m'interrogez sur mes fonctions d'éditorialiste. À l'époque, je n'avais pas le statut de journaliste. J'étais éditorialiste et le groupe dans lequel j'exerçais comme prestataire de services mettait en avant ma liberté de parole et l'identité que je portais. Personne n'a jamais exercé de pression sur moi, la question ne s'est jamais posée. Mon témoignage n'a que peu d'intérêt puisque je n'étais pas journaliste, mais éditorialiste.
Les aides à la presse recouvrent des mécanismes très différents : des aides indirectes avec le taux réduit de TVA, des tarifs postaux spécifiques, des aides à la distribution et au portage, des aides à l'investissement, notamment à travers le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) et des aides au fonctionnement, appelées aussi aides au pluralisme. Il n'est pas illogique que la répartition des aides indirectes et des aides à la distribution reflète mécaniquement le poids économique des différents acteurs. De même, les aides à l'investissement sont accordées aux entreprises suffisamment solides, capables de financer des projets d'investissement. Pour autant, les règles encadrant le FSDP prévoient des plafonds qui empêchent un même groupe de recevoir plus de 15 % de l'enveloppe globale. Les aides au pluralisme reposent sur des critères objectifs, qui ciblent les titres à faibles ressources publicitaires. L'impératif de pluralisme justifie de soutenir ces titres qui ont fait le choix de ne pas dépendre économiquement des annonceurs.
Enfin, le dispositif a été complété ces dernières années par de nouvelles aides qui vont dans le sens d'un soutien accru aux médias émergents : création en 2016 d'un fonds de soutien aux médias sociaux de proximité, d'un fonds de soutien à l'émergence à l'innovation et la création en 2021, d'une aide au pluralisme des titres ultramarins et d'une aide au pluralisme des services de presse en ligne.
Vous soulignez que ces aides sont attribuées aux titres sans tenir compte de leur structure actionnariale. L'idée qu'il faudrait priver d'aides des titres au seul motif qu'ils sont contrôlés par un groupe très important ou par des milliardaires me paraît assez simpliste, peut-être même dangereusement simpliste, compte tenu des difficultés auxquelles le modèle économique de la presse est confronté, tant au niveau des ventes au numéro ou par abonnement que du côté des recettes publicitaires. Il est vital que la presse soit soutenue par des investisseurs capables de lui apporter des moyens de développement.
Pour autant j'ai noté avec intérêt la proposition formulée lors de certaines auditions pour mieux cibler les aides à la presse vers des médias indépendants, c'est-à-dire des titres qui n'appartiennent à aucun groupe ou qui appartiennent à un groupe exclusivement dédié aux médias. Que des groupes industriels exerçant d'autres activités investissent dans les médias n'est pas problématique en soi, dès lors que nous nous assurons que ses intérêts économiques n'interfèrent pas avec la ligne éditoriale. L'impératif du pluralisme justifie que nous accordions une attention particulière à ces médias indépendants. Elle pourrait prendre la forme d'une bonification ou d'un couloir réservé au sein de certaines aides directes. C'est une réflexion que je suis prête à engager. J'ajoute que les dispositifs fiscaux qui encouragent la souscription des particuliers au capital des entreprises de presse participent de ce même objectif de soutien aux médias indépendants.