Je vais me permettre d'être en désaccord avec une partie des points que vous évoquez.
D'abord, il n'y a pas de moratoire sur le HDH. Aujourd'hui, sur un certain nombre de projets, une équipe de recherches va faire une demande à l'Agence de la biomédecine ou au Système national des données de santé (SNDS) pour avoir accès à des données. Celles-ci vont être extraites des endroits où elles se trouvent et mises sur le HDH. C'est là que l'on participe à un certain nombre de traitements de données pour réussir à sortir des interactions médicamenteuses, des comorbidités, etc. Cela peut être dans le cadre du covid-19 ou de la recherche sur le cancer. Il y a énormément de projets extrêmement intéressants qui sont menés.
Les demandes sont systématiquement soumises à l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui a approuvé chacun des projets en cours. Dès lors, sauf à considérer que la CNIL ne fait pas son travail, on ne peut pas dire qu'il y ait un risque sur les données personnelles des Français dans le cadre de l'utilisation actuelle du HDH.
Je pense que vous faites référence à une autre chose. Ce qui est certain, c'est que ce processus est extrêmement consommateur en temps pour les équipes de recherche, dont certaines ont d'ailleurs abandonné la recherche scientifique dans le cadre du HDH, considérant que les temporalités étaient trop longues.
La réflexion initiale était de dire que l'ensemble des données du SNDS, donc de l'assurance maladie, devraient être hébergées à terme sur le HDH, parce que cela permettrait d'aller beaucoup plus vite. C'est cette demande qui a été faite à la CNIL et qui a été retirée, pour deux raisons.
D'une part, vous le savez, il y a des discussions techniques, juridiques et sanitaires sur les fournisseurs de cloud du HDH. Olivier Véran a indiqué voilà quelques mois que nous souhaiterions remettre à plat l'architecture du HDH sous deux ans ; désormais, cela doit faire un an. Il se trouve, qu'entretemps, il y a eu de nouvelles crises covid-19 et que c'est un énorme travail, y compris de la direction des affaires juridiques, et en lien avec des services sanitaires, parce qu'il y a un effet sanitaire extrêmement important. Les services de la santé sont relativement occupés par le covid-19. Ce n'est donc pas très pratique de mener un travail aussi fouillé sur le sujet du HDH.
D'autre part, et je vais le dire sans ambages, ce sujet est devenu excessivement politique, avec un seul biais, qui est un biais industriel. On ne peut pas dire que, dans le HDH, il n'y a pas des questions légales et des questions sanitaires qui se posent. À titre personnel, je suis chargé du numérique ; ma mission est de faire en sorte que les entreprises françaises du numérique soient les plus performantes et les plus puissantes du monde. Mais, dans le HDH, il n'y a pas qu'une question industrielle ; il y a une question d'efficacité sanitaire. Il y a donc un travail à mener, qui doit s'appuyer sur des considérants techniques de souveraineté nationale et sur des considérants légaux. Je le rappelle par ailleurs que, dans le cas de la société Doctolib, le Conseil d'État a estimé que l'hébergement des données chiffrées sur Amazon était légal. Ces considérants légaux emportent des considérants de cloud act et des considérants de marché interne européen. Et il y a des considérants sanitaires, sur ce que l'on peut faire avec les offres qui nous sont adressées en matière de recherche.
Ce travail est un très gros travail. Ceux qui disent qu'on peut le résoudre en cinq minutes et que la réponse est binaire se moquent de la santé des Français. Je vois bien le point de cristallisation politique que certains en font actuellement.
Je réponds à votre question sur le moratoire : non seulement les services du ministère de la santé, notamment la direction des affaires juridiques, sont extrêmement occupés en ce moment à gérer le covid-19, compte tenu de tout ce que vous connaissez sur la vaccination, mais le sujet nécessite par ailleurs, me semble-t-il, une instruction technico-légale et sanitaire méritant un peu plus de sérénité.
Par conséquent, ce que vous appelez un moratoire n'en est pas un ; c'est seulement un décalage d'une approche plus systémique à après l'élection présidentielle.