L’article L. 4121–1 du code du travail rappelle, en matière de sécurité et de prévention des risques professionnels, les obligations principales des employeurs du point de vue de la santé de leurs salariés :
« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
« Ces mesures comprennent :
« 1° Des actions de prévention des risques professionnels ;
« 2° Des actions d’information et de formation ;
« 3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
« L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. »
Il nous est proposé d’ajouter à la prévention des risques professionnels celle de la pénibilité du travail. Nous pourrions nous interroger : sommes-nous encore dans le débat sur la réforme des retraites ou sommes-nous en train de récrire les articles génériques du code du travail, articles au demeurant relativement clairs dans leur rédaction actuelle ?
Poser la question est toutefois y répondre par avance, puisque certains de nos collègues du côté droit de l’hémicycle ont déposé un amendement de suppression de cet article en arguant du fait que la pénibilité étant une notion relativement évolutive, il semble difficile d’imposer aux employeurs de la prévenir.
La pénibilité sur le fond procède de trois catégories de problèmes et de douze critères différents.
Ce sont les contraintes physiques – manutention et port de charges lourdes ; contraintes posturales et articulaires ; vibrations –, un environnement agressif – exposition à des produits toxiques, cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques ; exposition aux poussières et fumées ; exposition à des températures extrêmes et aux intempéries ; exposition aux bruits intenses ; les rayonnements ionisants –, les contraintes liées aux rythmes de travail – travail de nuit ; travail alterné, décalé, travail posté en discontinu, travail par relais en équipe alternante ; longs déplacements fréquents ; gestes répétitifs, travail de chaîne, cadences imposées.
Cela constitue à nos yeux une première base de réflexion. Mais la question qui nous est posée est cependant doublée par les formes nouvelles de la pénibilité, fondées notamment sur la pression du résultat, les contraintes psychologiques, tout ce qui peut procéder du harcèlement moral du salarié et qui n’a parfois que des effets de caractère psychosomatique.
De plus, l’un des problèmes posés par la pénibilité réside dans le fait que ses effets se font parfois ressentir bien après l’exposition à tel ou tel facteur aggravant de la difficulté des conditions de travail.
Le scandale de l’amiante a suffisamment montré, de ce point de vue, comment les salariés sérieusement exposés au matériau avaient découvert, bien souvent des années après, les affections dont ils étaient atteints.
Enfin, on peut se demander, à ce stade du débat, si le texte ne devient pas une sorte de DDOS puisqu’il entretient une regrettable confusion entre amélioration nécessaire des conditions de travail et droit à la retraite.
Sommes-nous en train de faire comme si l’action nécessaire contre la détérioration des conditions d’exercice de telle ou telle profession n’avait de sens que lorsque les salariés approcheraient de la retraite, alors même que la lutte contre la pénibilité commence peut-être dès l’embauche de l’apprenti ?