Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article 1er instaure une taxe exceptionnelle sur les rémunérations versées au bénéfice des opérateurs de marchés financiers, ceux que l’on appelle en mauvais franglais les traders.
Une telle mesure, rappelons-le, figure dans les recommandations formulées lors des sommets du G8 comme du G20 et nous devons immédiatement souligner que, contrairement à d’autres initiatives prises dans le cadre de la crise financière de 2008, l’idée de cette taxation de la rémunération des traders ne vient pas de notre pays, et donc de notre Gouvernement, mais a été, en quelque sorte, lancée par le Président des États-Unis et, en Europe, par le Premier ministre britannique.
À chaque pays évidemment, ensuite, de fixer les conditions de cette taxation, d’un caractère quelque peu symbolique et qui apparaît un peu comme la « queue de la comète » de la crise financière.
La taxe, exceptionnelle, que l’on met en place avec cet article 1er, est en effet un peu le moins que l’on pouvait faire après une crise financière qui a provoqué un large investissement des États en soutien des activités bancaires et ne semble pas avoir fait renoncer les établissements financiers à leurs mauvaises habitudes.
Les 360 millions d’euros attendus du rendement de la taxe ainsi mise en œuvre peuvent-ils et doivent-ils nous faire oublier que nous avions ici même débattu, fin 2008, d’un plan de sauvetage bancaire de 360 milliards d’euros – c'est-à-dire mille fois plus... – qui est quasiment forclos aujourd’hui ?
Certains établissements de crédit ont en effet évité la faillite pure et simple grâce à l’intervention publique, mais aucune des banques concernées par le plan de sauvetage – dans des proportions globalement bien moins élevées que la ligne de crédit qui avait été ouverte – n’a véritablement modifié ses pratiques.
Aucune de nos banques n’a cessé de jouer le jeu de la spéculation sur les marchés – seules les mouches ont changé d’âne, selon l’expression populaire –, en passant des produits dérivés sur des crédits immobiliers américains au marché des matières premières et désormais aux valeurs obligataires, et surtout, la pratique du crédit aux entreprises ne s’est aucunement améliorée.
C’est ainsi que, malgré l’intervention du Médiateur du crédit, René Ricol, devenu depuis quelques jours le Commissaire général à l’investissement, le niveau global des prêts bancaires aux entreprises s’est réduit, limitant par conséquent les moyens de financer le développement de l’activité économique, et participant par là même à la récession économique.
La baisse de 7, 6 points de l’investissement productif, résulte aussi, selon nous, de cette contraction du crédit aux entreprises, alors même que tout était a priori réuni pour que ce crédit soit facilité.
Le plan de sauvetage bancaire, peu exigeant sur les contreparties, privant l’État sur le fond comme sur la forme d’une véritable prise de participation au capital, donc aux décisions, de nos établissements de crédit, n’aura donc servi qu’à conforter la position de ces établissements et à permettre la distribution de ce dont nous découvrons la trace pour le moins déroutante, c'est-à-dire la poursuite des rémunérations discrétionnaires, des bonus et des primes dévolues aux « bons acteurs » de marché !
Et les 360 millions d’euros de taxe affectés au financement des actions d’OSEO ne feront jamais oublier les milliards d’euros que l’État aurait pu récupérer, sans douleur particulière, en entrant effectivement dans le capital de nos banques. Ils apparaissent, du fait même du caractère exceptionnel de la taxe, comme un faux-semblant.
Nous ne pensons pas que la taxation des opérations de marché devrait se contenter d’être une mesure de caractère exceptionnel, comme on nous y incite. Ces pratiques doivent être durablement découragées.
Telles sont les raisons d’être des amendements que nous avons déposés sur cet article 1er.