La première chose est d'avoir conscience du risque. À cet égard, l'éducation de la population est essentielle.
Lorsque l'on parle de prévention se pose la question de l'investissement financier : il est difficile d'investir dans une politique publique de prévention des risques alors que l'on n'a pas la certitude que ces derniers surviendront. Cela peut rendre difficile l'acceptation de certaines mesures. Après une crise, quand une prise de conscience a eu lieu, des investissements sont réalisés - par exemple, l'achat de masques pour faire face à de futures pandémies -, mais, le temps passant et le risque s'éloignant, on se demande s'il s'agit d'une bonne dépense publique, car on ne sait pas si le risque se réalisera.
Les politiques publiques doivent permettre le prépositionnement de moyens humains et matériels, afin de répondre à certains risques dont la fréquence ou l'importance auront été préalablement définies. Pour prévenir les risques liés aux catastrophes naturelles dans les territoires ultramarins, la Croix-Rouge française travaille aujourd'hui avec l'Agence française de développement pour prépositionner des moyens matériels et humains permettant de préparer la population et de répondre aux crises à l'échelle régionale. Aujourd'hui, dans le contexte de la crise ukrainienne et de l'arrivée de réfugiés sur le territoire, nous réfléchissons avec le ministère du logement à la question de savoir si nous pourrions prépositionner des hébergements pour répondre aux besoins de ces populations.
Ces deux exemples sont très concrets. Il faut intégrer ces questionnements à l'élaboration des politiques publiques et accepter de financer des mesures sur le long terme, ce qui n'est pas évident.
À la Croix-Rouge, au fur et à mesure que nous répondions à ces crises, nous avons appris à mettre en place une organisation particulière de gestion de crise, avec une chaîne de commandement efficace. Aujourd'hui, il faut mener une réflexion collective au niveau de l'État, mais aussi des collectivités territoriales, pour mettre en place les bons mécanismes, les bons process, les bonnes organisations permettant de répondre aux crises. Il faut respecter le cadre général de l'organisation des pouvoirs publics, l'articulation entre l'État et les collectivités et le principe de subsidiarité, et mettre en place une chaîne de commandement efficace. C'est la clé pour répondre aux crises. À la Croix-Rouge française, en situation de crise, certains N-1, N-2 ou N-3 pilotent les réponses alors que, en temps de paix, dans l'organisation normale, ils sont les inférieurs hiérarchiques du directeur général.
Pour répondre à la question de M. Bonneau sur les solidarités nécessaires à la préparation et à la prévention des crises, nous partageons à la Croix-Rouge la conviction profonde que face à cet horizon de crises, nous sommes tous vulnérables - la crise du covid nous l'a rappelé. De cette vulnérabilité partagée doit naître une dynamique de solidarités : nous avons tous un rôle à jouer dans la préparation et la réponse à la crise.
Cette capacité de résilience collective passe par une cohésion sociale forte et par la conscience que la sécurité et la santé de chacun dépendent de celles des autres. Nous devons mettre en place des mécanismes et une pédagogie au sein de notre société pour être plus forts et plus résilients. Chaque citoyen a un rôle à jouer. Être citoyen, c'est être prêt et être acteur de la réponse. Nous devons travailler à cette préparation et à cette mobilisation citoyenne : dans un contexte de défiance généralisée à l'égard de certaines institutions et organisations, dont nous ne sommes pas exempts, il faut investir sur le réseau des « corps intermédiaires », des collectivités, des associations comme la Croix-Rouge française, des syndicats, pour être en mesure de répondre aux crises de demain.