L'attaque russe a entraîné un exode massif de réfugiés dans les pays limitrophes de l'Ukraine, à commencer par la Pologne, mais aussi dans tous les pays proches.
La Roumanie a été une destination importante, en particulier pour les réfugiés du sud de l'Ukraine. Au cours des cinq semaines écoulées entre l'attaque russe et notre mission, 600 000 réfugiés ukrainiens sont ainsi arrivés en Roumanie. Lorsque nous étions sur place, le rythme des arrivées tendait à se ralentir, en raison de la capacité de l'armée ukrainienne à stopper, voire à repousser l'avancée russe.
Nombre de ces réfugiés sont en transit : la plupart avait pour destination finale la Pologne. D'autres ont gagné les pays d'Europe occidentale, soit qu'ils y aient déjà des attaches, soit qu'ils aient accepté une proposition de relocalisation.
Le profil de ces réfugiés est très particulier : il s'agit pour l'essentiel de femmes et d'enfants. La quasi-totalité des hommes en âge de combattre sont restés en Ukraine, d'où ils ne peuvent d'ailleurs pas sortir compte tenu de la mobilisation générale. Les personnes âgées qui n'étaient pas en état de fuir sont également restées en Ukraine.
La plupart de ces réfugiés n'ont qu'une hâte : rentrer en Ukraine pour retrouver leur père, leur mari ou leur fils. Preuve de cette volonté de retour, les autorités ukrainiennes estiment que, à la faveur de l'échec de l'armée russe au nord de l'Ukraine, un million de réfugiés sont déjà retournés dans leur pays.
Pour ces différentes raisons, le nombre de réfugiés qui demeurent de façon prolongée en Roumanie est nettement inférieur à celui des entrées : au moment de notre mission, il représentait environ 80 000 personnes, dont presque une moitié de mineurs. Une très grande attention doit être portée aux mineurs isolés ; les autorités roumaines sont très vigilantes à cet égard.
Au-delà des chiffres, je veux témoigner de la forte émotion que nous avons ressentie au poste frontière d'Isaccea, où un bac permet aux Ukrainiens, plusieurs fois par jour, de franchir le Danube. Certains sont en voiture, beaucoup à pied, parfois dans le plus grand dénuement. Ces scènes ont marqué chacun d'entre nous - nous n'en avons pas dormi de la nuit.
Oui, nous revoyons le visage de la guerre aux portes de l'Union européenne.