Intervention de Éric Woerth

Réunion du 16 février 2010 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2010 — Article 2, amendements 4 2011

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais prendre le relais de Christine Lagarde sur le sujet en discussion, qui revient d’ailleurs régulièrement, à chaque examen de loi de finances.

Reconnaissons-le, c’est un sujet sur lequel on est mal à l’aise. Au fond, c’est la raison pour laquelle on ne parvient pas à prendre de décision.

Vous présentez des amendements, à l’instar de vos collègues de l’Assemblée nationale, et ces amendements sont empreints de créativité.

Monsieur le rapporteur général, l’amendement n° 4 rectifié s’appliquerait à partir de 2011. Ce n’est pas la première fois que vous travaillez de cette manière : c’est une façon d’appeler et, en même temps, de réaliser, ce qui est habile.

Pour autant, je l’ai dit, le Gouvernement n’est pas à l’aise : il met en avant les problèmes que cela poserait en termes d’emploi, à un moment où, c’est le moins qu’on puisse dire, la situation à cet égard est effectivement problématique et il laisse le débat ouvert, mais en souhaitant qu’on y revienne plus tard… Je crois pouvoir résumer ainsi notre position.

Il est malheureusement difficile d’aller plus loin aujourd’hui, pour la simple et bonne raison que l’impact sur l’emploi est difficile à mesurer à 0, 02 point près. Nous disposons d’études, mais entre 1, 6 SMIC et 1, 58 SMIC, il est assez difficile de savoir si ce sont 10 000, 30 000, 40 000 emplois qui sont en jeu, ou aucun. Ce qui est sûr, c’est que l’emploi se trouve fragilisé.

M. le rapporteur général le sait parfaitement, en ramenant le seuil d’exonération à 1, 58 SMIC, on ne touchera pas uniquement les salariés percevant entre 1, 58 SMIC et 1, 6 SMIC. En modifiant le seuil d’exonération, on fait en effet varier la pente de la droite qui décrit la décroissance du taux d’allégement au fur et à mesure que le salaire se rapproche du seuil. Cette diminution aura donc également une incidence sur les rémunérations situées en deçà du seuil, touchant ainsi grosso modo toutes les personnes qui gagnent entre 1, 3 SMIC et 1, 58 SMIC.

Voilà pourquoi nous ne souhaitons pas risquer de dégrader encore la situation de l’emploi en modifiant le seuil d’exonération.

Monsieur le rapporteur général, à travers l’amendement n° 4 rectifié, vous voulez toucher à un tabou, en quelque sorte « marquer le coup ». Le Gouvernement, quant à lui, pense que le présent collectif ne prête pas à une telle mesure, considérant qu’il a essentiellement pour objet de demander au Parlement d’approuver le grand emprunt. Dès lors, on ne peut pas, d’un côté, insister sur l’investissement et, de l’autre, diminuer les aides aux bas salaires. Car c’est exactement ce que veut dire votre amendement puisqu’il aurait pour effet d’augmenter les cotisations patronales sur les bas salaires. Ce serait envoyer un signal négatif aux entreprises au moment où s’amorce la reprise.

Par ailleurs, vous proposez, selon une certaine logique, que cette diminution des allégements de charges permette de financer de façon pérenne les allégements de charges supplémentaires destinés à favoriser l’emploi des travailleurs saisonniers agricoles.

Comme vous le savez parfaitement, l’ensemble de ces allégements supplémentaires destinés aux travailleurs saisonniers agricoles ne coûte pas 300 millions d’euros, ou un peu plus, mais 168 millions d’euros, somme figurant dans la mesure supplémentaire prévue dans le collectif budgétaire. Il ne s’agit donc pas de financer l’ensemble des allégements de charges destinés aux salariés agricoles, mais seulement la mesure supplémentaire figurant dans le collectif budgétaire qui concerne ces travailleurs saisonniers et qui s’ajoute aux allégements déjà consentis pour aider le secteur agricole confronté à la concurrence de plus en plus rude de pays où les salaires sont bien moindres.

Le coût exact de cette mesure supplémentaire figurant dans le collectif budgétaire s’élève donc à 168 millions d’euros. Vous me rétorquerez que cela n’est pas suffisant ; je tiens donc à vous informer que le Gouvernement a gagé cette somme par une annulation de crédits à due concurrence au sein du budget des ministères. Cette mesure ne représente donc pas une charge supplémentaire pour les dépenses publiques.

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