Intervention de François Patriat

Réunion du 6 juillet 2022 à 21h00
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de François PatriatFrançois Patriat :

… je vais m’y atteler modestement.

L’heure est à la gravité et à la responsabilité, mais elle est aussi à l’ambition. C’est dans un contexte inédit que s’inscrit votre présentation de la démarche du Gouvernement.

Une guerre en Europe qui continue à faire rage, une pénurie de matières premières, une inflation continue, une hausse des prix de l’énergie, une insécurité alimentaire, les effets croissants du dérèglement climatique, sans parler de la pandémie : cette situation appelle de notre part lucidité et courage politique.

Le vote aux dernières élections législatives reflète de vraies inquiétudes et révèle de profondes fractures, comme certains d’entre vous l’ont évoqué.

En n’accordant la majorité absolue à aucune force politique, les Françaises et les Français ont souhaité renforcer le poids du Parlement dans l’élaboration des réformes et la décision politique.

Malgré tout, seule la majorité présidentielle est en mesure de gouverner le pays : à ce jour, il n’y a pas d’autre possibilité.

Le Gouvernement a reçu le message lui signifiant qu’il devait élargir le dialogue. Les oppositions nationales ne l’ayant pas souhaité, il n’y aura pas d’accord de gouvernement ni de coalition.

C’est donc texte par texte que nous devrons construire des compromis exigeants.

Mes chers collègues, plusieurs choix s’offrent à nous : l’action ou l’immobilisme ; le dépassement ou les postures délétères ; la volonté ou la fatalité ; le courage ou la facilité.

Le pire serait l’affrontement ou le refus du dialogue. Privilégier les postures partisanes conduirait notre pays à la stagnation ou, pis, au recul. Les Français ne nous le pardonneraient pas.

C’est donc en responsabilité que le groupe RDPI fait le choix de l’action déterminée à vos côtés. En un mot, nous voulons construire ensemble, comme vous le proposez, madame la Première ministre.

Mes chers collègues, je suis convaincu que l’ensemble de nos groupes ont vocation à agir dans ce sens. Nous avons su, lors des dernières sessions parlementaires, trouver des compromis sur les textes essentiels, comme en témoigne le nombre de commissions mixtes paritaires conclusives au cours du dernier quinquennat.

À court terme, l’art du compromis fera mentir tous ceux qui pensent que la France n’est pas réformable, et que les politiques sont vouées à l’impuissance.

À long terme, pouvons-nous espérer réconcilier les Français avec leurs élus ? Mes chers collègues, madame la Première ministre, il nous faut gagner la bataille contre cet ennemi mortel du progrès qu’est la résignation.

Il nous appartient de ramener à l’espérance ces jeunes, ces femmes et ces hommes de tous horizons politiques, qui ont préféré s’abstenir ou, pis, se tourner vers les extrêmes populistes.

Contre cet abandon du terrain aux mauvais vents, nous devons nous efforcer de faire partager notre goût de l’action au service de l’État, ce dernier ne pouvant réellement protéger que s’il devient un État investisseur, catalyseur d’énergies, accompagnateur d’initiatives.

C’est à ce point d’équilibre, entre la liberté sans laquelle on s’éteint et la protection sans laquelle on devient victime, que se trouve notre idéal de progrès.

Nous sommes là pour participer à l’application du projet proposé par le chef de l’État, que souhaitent les Français. Il s’agit d’un projet cohérent, crédible et financé. Nous devrons donc travailler ensemble en matière d’urgence écologique, de plein emploi, de santé et de sécurité.

Je ne doute pas que nous saurons discerner les priorités et les resserrer dans des textes moins bavards. Tout le monde le dit : nous légiférons souvent trop. Essayons de résoudre ce problème, en ayant pour seul objectif de défendre l’intérêt général, de participer au redressement du pays, de choisir la voie du progrès.

Madame la Première ministre, parmi vos priorités, j’ai retenu votre volonté de protéger les Françaises et les Français et de construire l’avenir.

Le travail de fond mené depuis 2017 a permis d’obtenir des résultats positifs : un taux de chômage au plus bas depuis plusieurs dizaines d’années ; un taux de croissance qui résiste ; une économie toujours plus attractive ; une inflation annuelle la plus faible de la zone euro. Saluons également les chiffres de l’apprentissage et la réussite du programme « 1 jeune, 1 solution », qui vous revient !

Désormais, l’urgence est à la lutte contre les effets de la hausse des prix et à l’équilibre de nos comptes publics. C’est par le travail, la croissance et l’emploi que nous réduirons notre déficit, et non seulement par l’orthodoxie budgétaire, qui est certes nécessaire, mais qui ne vise pas à décourager les Français par l’impôt et par les charges.

Je rappelle que l’objectif du Gouvernement est de créer du progrès social sans augmenter les impôts et en maîtrisant la dette. Cet objectif doit nous réunir. Les mesures emblématiques du texte « pouvoir d’achat » sur lequel nous serons amenés à débattre vont y participer.

Beaucoup de Français, et notamment les plus jeunes, se sont emparés de l’urgence climatique. À vous écouter, le Gouvernement a entendu ce message.

Des actions dont l’efficacité n’a pas été suffisamment soulignée ont déjà été prises : MaPrimRenov’, la reconversion des véhicules, la lutte contre l’artificialisation des sols, la production décarbonée, la fin de l’exploitation des hydrocarbures, la lutte contre les emballages en plastique. Nous devons poursuivre ces efforts. Des leviers d’adaptation justes doivent être rapidement mis en place.

À ce titre, saluons les accords européens sur le « paquet climat » et la réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, adoptés sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne.

Ce que nous voulons, c’est une écologie positive, une écologie du quotidien, inventive et réactive, pour bâtir un nouveau modèle énergétique et faire de la France le premier grand pays du monde à sortir de la dépendance à l’égard des énergies fossiles.

Par conséquent, tout ce qui peut renforcer et faciliter la production d’énergies renouvelables va dans le bon sens. L’administration centrale et déconcentrée doit véritablement accompagner le déploiement des énergies renouvelables et accélérer la transition énergétique. Trop de projets sont freinés sur nos territoires à cause de lourdeurs administratives.

Repenser le système de santé constitue aussi une urgence pour les Français. Le Gouvernement s’y emploiera. Madame la Première ministre, vous avez rappelé les efforts engagés à travers le Ségur de la santé. Dans chacun de nos territoires, de nos centres hospitaliers universitaires et de nos hôpitaux locaux, des moyens sans précédent ont été mobilisés pour moderniser l’hôpital.

Nous avons bien sûr déjà travaillé à la lutte contre les déserts médicaux. Le ministre de la santé et de la prévention a ouvert des pistes supplémentaires, et nous continuerons à travailler ensemble pour les suivre. L’hôpital doit être repensé. Le Président a raison de vouloir lancer dès l’automne des débats territoriaux pour une feuille d’action accélérée, au plus près des besoins des territoires.

Enfin, il nous appartient d’assurer la sécurité à nos concitoyens. L’examen prochain du projet de loi d’orientation et de programmation pour le ministère de l’intérieur y contribuera nécessairement.

Par ailleurs, nous serons attentifs à la mise en œuvre des conclusions des états généraux de la justice, remises très prochainement au Président de la République. L’enjeu est crucial. Il s’agit de renforcer l’efficacité de la justice, de la moderniser et de répondre au malaise existant parmi les professionnels, c’est-à-dire, en somme, de consolider le pacte civique entre la Nation et la justice.

Nous approuvons la méthode des « états généraux », faite de larges concertations ouvertes au terrain, intégrant usagers, professionnels et élus autour des parties prenantes, mues par la perspective d’améliorations profondes. Cette méthode répond, madame la Première ministre, à votre proposition de construire ensemble, et nous y souscrivons.

Enfin, madame la Première ministre, je ne peux terminer mon propos sans évoquer le cri d’alerte poussé dans nos territoires ultramarins.

Le choix des extrêmes, amplifié par le taux d’abstention aux dernières élections, est l’expression inédite d’une réelle fracture. Les raisons en sont multiples, mais nous ne devons pas négliger l’influence nocive des fausses informations et des contre-vérités qui ont été assénées. Beaucoup de moyens ont été déployés, mais ces territoires souffrent d’un manque de dialogue, d’un manque de concertation voire d’un manque de différenciation.

Nous devons collectivement repenser la relation entre nos territoires ultramarins et l’Hexagone, pour davantage de confiance, de dialogue et de différenciation, et surtout afin de s’inscrire au plus près des besoins quotidiens de nos compatriotes d’outre-mer.

Pour conclure, madame la Première ministre, votre action visera donc à accompagner notre pays vers une transition réussie, qu’elle soit d’ordre écologique, numérique, générationnel ou encore démocratique, le tout dans un contexte géopolitique inédit et des plus instables à nos frontières européennes.

Pour cette raison, le groupe RDPI vous accorde toute sa confiance, et sera à vos côtés pour rendre possibles ces réformes.

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