Intervention de Elisabeth Borne

Réunion du 6 juillet 2022 à 21h00
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Elisabeth Borne :

Monsieur le président Marseille, vous avez souligné le caractère inédit pour la France de notre situation politique, beaucoup moins originale si l’on regarde par-delà nos frontières. Comme vous le dites souvent, monsieur le président : nous devons nous projeter dans l’avenir et l’Europe nous y aide.

Une capacité à peser et à affronter les crises : voilà ce qu’est la souveraineté. Plusieurs travaux du Sénat ont pointé, avec justesse, notre forte dépendance à l’égard des industries étrangères, par exemple en matière pharmaceutique. Notre souveraineté doit être pensée dans un cadre européen : une Europe plus forte, c’est une France plus forte, qui naîtra de notre capacité à dialoguer. Je vous remercie déjà, à ce titre, d’avoir mis des propositions sur la table.

Madame la présidente Assassi, je partage vos préoccupations face à la désespérance sociale d’une partie de nos concitoyens. Nous ne pouvons accepter de les laisser ainsi s’éloigner de la démocratie et des élections. Cependant, je suis convaincue que le SMIC à 1 500 euros est seulement l’assurance pour tous d’un tassement des progressions de salaire. Sur ces sujets, les solutions miracles sont souvent des mirages qui contribuent fortement à la défiance de nos concitoyens.

La réflexion relative à l’avenir de nos institutions, qui s’engagera à l’automne sous l’égide du Président de la République, devra tenir compte de la défiance exprimée lors des dernières élections. Là également, une approche pluraliste nous permettra de construire des réponses utiles et équilibrées.

Je vous remercie, monsieur le président Requier, d’abord, de vos vœux de réussite, ensuite, de votre bienveillance et de votre optimisme. C’est bien de la réussite de notre pays qu’il est question. Vous avez mentionné ce qui est une préoccupation partagée par l’ensemble des groupes : l’État et les collectivités doivent, d’une part, dresser ensemble une liste des défis à relever, d’autre part, identifier les leviers à activer et les moyens à mobiliser. L’action publique des collectivités territoriales doit pouvoir s’appuyer sur une visibilité des compétences et des conditions de leur action.

Par conséquent, nous construirons ensemble un agenda territorial. J’ai confiance dans notre capacité à dialoguer et à apporter des réponses au plus près de nos concitoyens.

Je partage votre diagnostic, monsieur le président Malhuret §: les Français ont exprimé des doutes et demandent que nous agissions. L’abstention est le signe d’une démocratie en souffrance, d’une perte de confiance dans l’action publique. Nous ne pouvons et ne devons pas laisser le champ libre à ceux qui voudraient revenir sur nos acquis démocratiques. Les évolutions que nous pouvons observer dans d’autres pays nous rappellent que la démocratie est une lutte de tous les jours, que les combats pour les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité doivent sans cesse être repris.

Pour cette raison aussi, je suis convaincue que nous pourrons construire des majorités d’action : les Français n’ont pas choisi le blocage de nos institutions.

La nécessité de construire des compromis pour répondre aux attentes des Français, je la perçois comme vous, monsieur le président Gontard. Je vous demande de nous juger non pas sur les intentions que vous nous prêtez, mais bien sur nos actes. Nous allons apprendre à travailler ensemble ; à vrai dire, nous avons déjà commencé à le faire ces dernières années… Il nous faut cependant aller plus loin.

Comme vous nous y avez invités dans votre courrier, monsieur le président du Sénat, nous aurons bientôt l’occasion d’échanger sur les modalités de mise en œuvre d’un dialogue le plus fructueux possible sur les réformes que nous allons engager. Clemenceau lui-même a fini par déclarer : « Les événements m’ont appris qu’il fallait donner au peuple le temps de la réflexion. Le temps de la réflexion, c’est le Sénat » ; on pourrait ajouter que c’est aussi le temps du dialogue.

Je vous remercie de tout ce que le Sénat pourra apporter à notre pays dans cette période inédite.

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