Intervention de Elisabeth Doineau

Commission des affaires sociales — Réunion du 20 juillet 2022 à 9h05
Présentation du rapport « charges et produits » – Audition de M. Thomas Fatôme directeur général de la caisse nationale de l'assurance maladie

Photo de Elisabeth DoineauElisabeth Doineau :

rapporteure générale. – Je vous ai écouté avec beaucoup d’attention, mais j’ai l’impression que le baromètre est cassé. Je salue le remarquable travail technique mené par vos équipes, mais, entre ce que vous nous décrivez et le terrain, il n’y a rien à voir. Tout le monde nous rapporte le manque de personnels de santé, les difficultés de coordination et de mise en œuvre de vos propositions.

Les outils que vous nous présentez semblent parfaits, mais comment les mettre en œuvre ? Votre stratégie n’est possible que si nous avons des hommes et des femmes sur le terrain. Je voulais vous faire part de ce décalage.

Tout se passe comme si, dans le chaos dans lequel nous sommes plongés, on ne voyait même plus l’excellence du système de santé français, qui est pourtant bien réelle. Tout se passe comme dans Où est Charlie ? : on cherche l’excellence de la prise en charge de la santé en France, et on ne la voit plus.

Je le regrette, car les élus locaux ont fait des efforts considérables pour mettre en œuvre certaines mesures, alors que le sujet de la santé a été au centre des préoccupations des deux dernières campagnes électorales. Nous devons relever, tous ensemble, cet énorme défi. Je salue la qualité de votre travail, ainsi que le travail des professionnels de santé, qui font le maximum. Mais quelque chose s’est cassé, et il faut, le plus vite possible, retrouver Charlie et l’excellence de la santé en France !

Concernant les dispositifs numériques innovants permettant de soulager la douleur, il me semble qu’un décret est en préparation. Il faut que l’assurance maladie puisse prendre en compte certains dispositifs numériques créés par des start-up. Nous n’avons pas assez travaillé sur ce sujet.

Sur le terrain, j’ai également pu relever des problèmes concernant la prise en charge des fauteuils roulants pour les personnes handicapées. Cela peut prendre jusqu’à cinq ans, et cela fait peur, surtout pour les enfants ! D’après ce que l’on me dit, on fait plus attention au prix qu’à la pathologie, et au fait que l’enfant grandit.

Je suis favorable à vos propositions concernant les équipes médicales, mais je pense qu’il faut plus de temps pour conduire un travail pluridisciplinaire sur un malade : il faut préparer les réunions, analyser les cas, en tirer les conclusions quant à la prise en charge… Cela demande du temps et des moyens humains. La patientèle des médecins traitants ne pourra pas passer de 1 000 à 1 200 patients d’un coup de baguette magique.

M. Bernard Jomier. – Mme Corinne Imbert a rappelé que les exonérations se profilant à l’horizon législatif compliqueront le retour à l’équilibre et aggraveront le déficit de la sécurité sociale, à laquelle on a déjà mis de très lourds boulets aux pieds en transférant la dette sociale à la Cades. Il y a là un choix politique.

Nous connaissons des dérives concernant les téléconsultations, qui font peser une pression quotidienne sur les professionnels prescripteurs, auxquels on demande des arrêts de travail ou des prescriptions ne remplissant plus les conditions de sécurité sanitaire. C’est inquiétant, et je regrette que le remboursement à 100 % des téléconsultations ait été prolongé de trois mois, car cela ne changera rien à la situation des urgences, tout en faisant de la téléconsultation un régime de remboursement préférentiel par rapport à la consultation présentielle.

Je souscris à votre remarque selon laquelle il existe encore des outils pour gagner du temps médical, face à la question de l’offre de soins et des déserts médicaux. Mais nous sommes trop lents et parcimonieux dans leur application ! J’appelle votre attention sur un point : compte tenu de l’instabilité de la situation politique, la tentation autoritaire croît dans notre pays, y compris chez les parlementaires. Concernant les mesures dont nous discutons, elle pourrait finir par déboucher. Or je suis convaincu qu’aucune amélioration n’est à attendre de l’autoritarisme, ou du mythe selon lequel, lorsque les problèmes durent depuis trop longtemps et que tout le monde est exaspéré, la tentation autoritaire constitue une solution. Vous devez tout faire pour que les leviers existants ne restent pas dans la théorie et soient développés sur le terrain, comme Mme la rapporteure générale l’a rappelé.

Vous indiquez dans votre rapport que la prochaine convention médicale sera un rendez-vous important pour l’adoption de dispositifs. Mais avez-vous mis en place des processus pour, en amont de cette convention monocatégorielle ne concernant que les médecins, discuter avec l’ensemble des professionnels de santé concernés ?

À la suite de l’adoption de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, certaines expérimentations ont été menées. Vous dites en préparer l’entrée dans le droit commun. Quelles sont les principales lignes des changements envisagés ?

Vous souhaitez récupérer 300 millions d’euros en luttant contre la fraude. Sur le fondement d’arguments sérieux, l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection est soupçonné d’une fraude par surfacturation portant sur plusieurs millions d’euros, au détriment de l’assurance maladie et des organismes complémentaires. Avez-vous ouvert une enquête pour attester ces surfacturations ? À l’heure où l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) font enfin leur travail, et alors que leurs rapports sur les dérives de cet IHU sont cinglants et inquiétants, quelles mesures prenez-vous ?

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