Intervention de Vincent Capo-Canellas

Réunion du 19 juillet 2022 à 14h30
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2021 — Discussion générale

Photo de Vincent Capo-CanellasVincent Capo-Canellas :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le marathon budgétaire de cette session extraordinaire débute avec ce projet de loi de règlement. Il débute tardivement, et on peut le regretter, même si les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ont pu livrer leurs analyses.

J’observe également que nous devrons attendre la rentrée pour connaître votre vision pluriannuelle, monsieur le ministre. L’objectif des 3 % de déficit en 2027 gagnerait pourtant à être rapidement documenté… Commençons néanmoins par 2021.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’année 2021 a été une année contrastée.

Ce projet de loi de règlement est d’abord le reflet d’une situation exceptionnelle, qui a justifié des efforts budgétaires immédiats et importants. Nous y sommes sensibles.

On peut en effet lire les chiffres en positif. Les recettes ont largement augmenté en 2021, à hauteur de 38, 2 milliards d’euros, avec une progression des recettes fiscales de 39, 8 milliards d’euros.

La poursuite des baisses d’impôts – taxe d’habitation, impôt sur les sociétés – et la baisse des impôts de production décidée dans le cadre du plan de relance sont à noter comme autant d’éléments positifs.

Les recettes fiscales ont connu une progression – hors mesures nouvelles – de 18 %, nettement plus élevée que le PIB. On peut en déduire que les baisses d’impôts sont positives pour l’activité et les recettes.

Les recettes fiscales ont été supérieures de 18, 2 milliards d’euros à la prévision de la loi de finances rectificative. On peut sans doute s’en réjouir, comme on peut s’interroger sur une telle prévision.

En négatif, les dépenses de l’État ont progressé très fortement en 2021, et la raison ne tient pas uniquement aux mesures d’urgence et de relance. Les dépenses ont augmenté de 90 milliards d’euros au cours des deux dernières années – 53, 6 milliards d’euros en 2020 et 37, 1 milliards d’euros en 2021.

Les dépenses du plan de relance – 17, 5 milliards d’euros – pèsent bien sûr, comme la mise en place de l’indemnité inflation – 3, 3 milliards d’euros –, le nouveau palier de la loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025 – 2, 7 milliards d’euros – et, plus inquiétant, l’accroissement des intérêts de la dette – déjà 2 milliards d’euros l’année dernière.

En négatif encore, la Cour des comptes rejoint la commission des finances pour constater plusieurs entorses aux règles budgétaires s’agissant de l’annualité des autorisations de dépense et de la spécialité des crédits. Les crédits reportés sont substantiels, puisque 36, 7 milliards d’euros ont été reportés fin 2020 et 23, 2 milliards d’euros fin 2021, tandis que certains crédits ont financé d’autres programmes que ceux pour lesquels ils avaient été votés. La portée des votes du Parlement s’en trouve affaiblie.

Au total, la sortie progressive de la crise du covid a justifié que le « quoi qu’il en coûte » affecte encore nos finances publiques. Sans doute fallait-il agir pour faire face aux crises, mais nous devons nous poser la question du financement de ces efforts.

Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a parlé de « cote d’alerte ». Le Premier président de la Cour des comptes a quant à lui lancé un message d’alerte la semaine dernière devant notre commission des finances – et il y a de quoi.

L’augmentation significative de la dette a porté celle-ci à plus de 2 800 milliards d’euros, à la fin de l’année 2021, en hausse de 150 milliards d’euros par rapport à 2020 et de 430 milliards d’euros par rapport à 2019. Des chiffres qui donnent le tournis…

En dépit d’une relance de l’activité économique de 6, 8 % en volume, soit la plus forte que la France ait connue depuis 1969, nous ne pourrons pas fonder notre stratégie de maîtrise de la dette sur la croissance, et ce d’autant moins que celle-ci faiblit. Le rapport de la Cour des comptes lance à cet égard une alerte supplémentaire.

Ce diagnostic pose la question de la souveraineté financière de notre pays.

Telles sont les raisons qui conduiront la majorité des membres du groupe Union Centriste à s’abstenir sur ce projet de loi de règlement. D’autres votes, pour la plupart favorables, s’exprimeront également – Vincent Delahaye aura d’ailleurs tout à l’heure l’occasion de présenter sa propre analyse de la situation.

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