Intervention de André Guiol

Réunion du 21 juillet 2022 à 11h00
Adhésion de la finlande et de la suède à l'otan — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de André GuiolAndré Guiol :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout a été dit quant aux bénéfices incontestables d’une adhésion de la Suède et de la Finlande au traité de l’Atlantique Nord.

Tout d’abord, en vertu du vieil adage « l’union fait la force », en passant de trente à trente-deux membres, l’OTAN augmentera fort logiquement ses capacités militaires. Les deux pays dont il s’agit possèdent en effet des moyens significatifs en la matière. La Finlande peut ainsi compter sur d’importantes ressources humaines. La Suède dispose quant à elle d’une industrie de défense compétitive.

Ensuite, sur le plan stratégique, avec la fin d’une neutralité historiquement bien ancrée dans ces deux pays, la défense du continent européen se trouverait clairement renforcée sur son flanc oriental.

J’ajouterai – M. le président de la commission et Mme la ministre l’ont déjà rappelé – que les partenariats de défense existants entre l’OTAN et ces deux pays règlent la question de l’interopérabilité.

Cette perspective est donc très positive pour la sécurité collective du continent européen comme pour l’approfondissement du concept euro-atlantique.

Dans ces conditions, les élus de mon groupe sont favorables au projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui. J’évoquerai tout de même quelques inquiétudes, que nous sommes nombreux à éprouver.

Au regard des dérives de Vladimir Poutine, la Finlande et la Suède souhaitent adhérer sans délai à l’OTAN.

Madame la ministre, je salue la promptitude de la France et celle de nos nombreux alliés qui se sont vite engagés dans le processus de ratification. Le souci – on le sait – vient du côté turc. Sommes-nous certains qu’Ankara ratifiera rapidement ce texte ? Des accords ont été conclus : sont-ils solides et compatibles avec les engagements dus aux Kurdes qui luttent contre Daech ?

De plus, si la renaissance de l’OTAN, actée à Madrid à la fin du mois de juin dernier, est une bonne chose sur le plan capacitaire, elle signifie aussi une forme d’« otanisation » de l’Europe. Comment la boussole stratégique, que l’Union européenne veut instituer et que la France a défendue activement pendant sa présidence européenne, s’inscrit-elle dans ce contexte ?

Sans faire concurrence à l’OTAN, mais, à l’inverse, en agissant en parfaite complémentarité avec elle, l’Union européenne doit conserver une certaine autonomie pour ses décisions stratégiques. La guerre en Ukraine se déroule à ses frontières et les défis qu’elle doit régler au Sud, au Sahel en particulier, la concernent aussi directement par leurs impacts migratoires et sécuritaires.

En outre, le renforcement du pilier européen au sein de l’OTAN ne doit pas conduire à alimenter la seule industrie de défense américaine au détriment de l’industrie européenne. Je rappelle qu’aujourd’hui 60 % des achats militaires européens proviennent des États-Unis.

À cet égard, je me félicite de ce que Bruxelles conditionne le projet d’acquisition conjointe de matériel, à hauteur de 500 millions d’euros, au principe d’achat à des producteurs installés en Europe ou sous contrôle européen.

La fin de l’ère des restrictions budgétaires en matière de défense qu’implique le retour de l’OTAN me conduit, pour conclure, à déplorer un paradoxe.

À l’heure où l’humanité court de graves dangers climatiques, au point que l’on envisage désormais sa disparition, nous sommes conduits à augmenter nos dépenses militaires pour faire face aux régimes autoritaires qui cherchent à affaiblir nos démocraties. Cette situation m’apparaît comme une ineptie. En effet, le défi environnemental exige des moyens colossaux, faute de quoi ce ne sera pas que la guerre, mais une terre meurtrie, qui signera notre perte.

Malgré ces réserves, la guerre en Ukraine et la posture martiale de la Russie nous obligent à considérer l’élargissement du pilier européen de l’OTAN comme incontournable. Les membres du Rassemblement Démocratique et Social Européen voteront donc en ce sens !

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