Intervention de Stéphane Ravier

Réunion du 21 juillet 2022 à 11h00
Adhésion de la finlande et de la suède à l'otan — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il nous est demandé de ratifier l’accession de la République de Finlande et du Royaume de Suède à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, la portant à trente-deux pays en 2022.

Une question se pose : dans quel but ?

Aujourd’hui, au sein de cette organisation, l’absence d’unité de vues crée les conditions d’une impuissance collective. Cela revient à réduire l’autonomie des États souverains européens en les soumettant aux exigences des États-Unis, dont les intérêts sont souvent divergents des nôtres.

Pendant ce temps, la Russie tente de faire revenir dans son giron les anciennes provinces soviétiques ; la Chine fourbit ses armes contre Taïwan ; et la Turquie, pourtant membre de l’OTAN, entretient le mythe de l’Empire ottoman en soutenant l’invasion de la province arménienne indépendante d’Artsakh par l’Azerbaïdjan, en occupant militairement une partie de Chypre et en adoptant une attitude belliqueuse envers la Grèce en mer Égée.

Ces impérialismes défendent leurs propres intérêts, leur propre destinée, et il en va de même pour le bloc nord-américain, qui trouve dans la guerre actuelle en Europe l’occasion parfaite, pour ne pas dire l’opportunité, d’élargir son emprise et de souder les États liés au sein de l’OTAN contre l’ennemi russe.

Résultat : les embargos à l’égard de la Russie favorisent les exportations de produits américains, notamment dans le domaine énergétique, et nous nous autocondamnons aux pénuries et à l’inflation.

Élargir l’OTAN, c’est réduire le monde au conflit entre deux blocs, anéantir la troisième voie et les tampons entre les États-Unis et la Russie. Avec un tel scénario, le risque de conflit mondial est réel.

Nous rendons potentiellement belliqueux deux pays culturellement habitués à la neutralité en les forçant à faire leur le principe de défense collective, tout en rendant progressivement inatteignable l’unanimité nécessaire à l’action.

Le Président de la République, en 2019, l’avait pourtant affirmé : l’OTAN est en état de mort cérébrale. À quoi bon, dès lors, avoir intégré encore l’année dernière la Macédoine du Nord et intégrer la Finlande et la Suède aujourd’hui ?

Cette organisation archaïque, issue de la guerre froide, dessert nos intérêts souverains. Elle nous a conduits à baisser nos budgets de défense au point que nous devons nous en remettre et même nous soumettre au protectorat américain.

L’OTAN, sous l’égide des Américains, c’est l’échec en Afghanistan. Ce sont nos quatre-vingt-dix valeureux soldats morts pour l’honneur. Ce sont les bombardements de civils et la guerre fratricide en Serbie. C’est la déloyauté d’alliés comme les États-Unis, qui mettent sur écoute nos dirigeants, ou comme la Turquie, qui brandit régulièrement la menace migratoire et agresse les bâtiments de notre marine en Méditerranée.

La pragmatique Allemagne ne croit plus dans le mythe otanien. Elle a pris le tournant du réarmement, investit 100 milliards d’euros pour moderniser son armée et possède désormais un budget annuel de défense deux fois supérieur au nôtre.

Dans le conflit russo-ukrainien, la vocation de la France devrait être, pour retrouver sa tradition de non-alignement diplomatique, de dialoguer pour préserver l’espoir de paix.

Dans cet esprit, je m’opposerai à l’élargissement de l’OTAN comme je me refuse d’ouvrir la voie à l’entrée de l’Ukraine en son sein.

Mes chers collègues, je vous invite à faire de même afin que nous retrouvions notre indépendance, notre efficacité et notre stabilité !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion