Intervention de Philippe Marini

Réunion du 16 février 2010 à 21h45
Loi de finances rectificative pour 2010 — État b

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général de la commission des finances :

Dans sa sagesse, la commission Juppé-Rocard a estimé que les infrastructures de transport n’étaient pas porteuses de croissance potentielle. Admettons-le ! Mais cela n’a évidemment rien de certain.

Il n’en reste pas moins que le développement de nos territoires dépend, dans une très large mesure, de leur désenclavement par rapport aux grands courants d’échanges européens et que la plurimodalité des transports de marchandises, sur laquelle il est convenu de faire des discours avec des trémolos dans la voix, n’avancera véritablement que si les efforts d’investissement de la puissance publique et de ses partenaires sont suffisants.

Je rappelle, monsieur le ministre, que le projet Seine-Nord Europe représente un devis de l’ordre de 4, 2 milliards d’euros. Une part de 2, 3 milliards d’euros serait traitée dans le cadre d’un partenariat public-privé. Le début de la réalisation, qui s’étalerait sur un certain nombre d’années, est prévu pour les années 2012-2013.

Le maître d’ouvrage de la liaison est Voies navigables de France, VNF, qui a besoin de lancer le dialogue compétitif entre les entreprises. Deux groupements sont intéressés. Les travaux qu’ils doivent effectuer pendant une durée d’environ dix-huit mois permettront de mieux qualifier les solutions techniques et économiques nécessaires pour cette part de l’ouvrage, qui englobe, en particulier, plusieurs plateformes multimodales.

Grâce au péage qui seront acquittés par les usagers, le projet Seine-Nord Europe aura une certaine rentabilité. L’État doit participer par le biais de l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, et l’Union européenne a donné un accord ferme de participation. Restent les collectivités territoriales. À cet égard, le ministre d’État Jean-Louis Borloo, dont on connaît l’énergie et l’entregent, a su obtenir, au mois de mai dernier, l’accord des présidents des conseils régionaux, qui ont signé un protocole pour 500 millions d’euros. Aujourd’hui, sur un devis total de 4, 2 milliards d’euros dont l’estimation, antérieure à l’appel d’offres, n’a pu être révisée par les participants pour tenter de trouver des économies – ce n’est pas du tout impossible ! –, manquent 300 millions qui seraient imputés aux départements traversés et à ceux de l’Île-de-France.

Je vous le dis tout net, monsieur le ministre, je comprends la position des présidents des conseils généraux, qui ne s’empressent pas de donner une réponse favorable. En effet, en l’état actuel, quelle que soit leur tendance, ils ont sans doute une visibilité financière à long terme perfectible.

Comme tous les conseils généraux en question sont présidés par des personnalités de même tendance politique, conditionner le lancement du dialogue compétitif à leur accord complet au plan de financement, c’est naturellement se condamner à ne rien faire.

Pour ma part, j’ai entendu le Président de la République dire, le 3 février 2009 : « Le dossier Seine-Nord Europe dormait profondément et durablement et n’avait d’ailleurs aucune chance, sans le Grenelle de l’environnement, de s’en tirer. […] L’État n’attend pas, l’État avance. »

Il ajoutait, le 29 avril 2009 : « Avec la décision de réaliser le canal Seine-Nord Europe inscrite dans le Grenelle de l’environnement, le bassin de la Seine sera désenclavé dès 2015. »

Le 12 juin 2009, il affirmait : « Au nom de la crise et des déficits, je ne couperai pas dans les investissements de la France ». C’est d’ailleurs le constat que nous pouvons faire avec le présent projet de loi de finances rectificative. Il précisait : « C’est vrai pour les TGV, c’est vrai pour le canal Seine-Nord Europe. Tout le monde vantait le transport fluvial et, depuis vingt ans, pas un coup de pioche pour le canal Seine-Nord. À quoi cela sert-il de faire des discours vibrants sur les transports écologiques si l’on n’en tire aucune conséquence ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion