Intervention de Christine Lavarde

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 25 juillet 2022 à 15h05
Projet de loi relatif aux mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat — Examen du rapport pour avis

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde, rapporteur pour avis :

Vous comprenez que ma position est un peu celle du docteur Jekyll et de M. Hyde : en tant que rapporteur, je défendrai parfois des positions qui peuvent diverger de ma position personnelle.

Ce qui me préoccupe, ce n'est pas tant la question de la prolongation, ou non, du « quoi qu'il en coûte », c'est que la France ait choisi, dans un contexte de forte inflation, une stratégie visant à avoir une inflation moins élevée en masquant le signal-prix. Dès lors l'inflation et la crise risquent de durer plus longtemps dans notre pays.

Vous avez raison, le poids de l'inflation est très différent selon le décile de revenu auquel on appartient. Je suis favorable à des dispositifs très ciblés vers ceux qui ont besoin de la solidarité nationale. À l'inverse, certains ont pu épargner pendant la crise du covid : il serait normal de leur demander de mettre à contribution leur épargne pour financer leur consommation courante. Les économistes le disent clairement, il faudra bien que quelqu'un paie : ce sera soit le consommateur dans ses achats, soit l'État, et donc nos enfants à travers la dette, soit les entreprises. La question est de savoir où placer le curseur.

En dépit de la communication du Gouvernement, le texte ne répond pas à l'urgence du moment ; il ne cible pas assez ceux qui ont des problèmes de pouvoir d'achat. Beaucoup de mesures sont d'affichage : personne ne touchera 6 000 euros de prime ! Actuellement son montant moyen est de 500 euros. Il est d'ailleurs plus élevé dans les petites entreprises : le montant moyen s'élève à 700 euros dans les entreprises de moins de 10 salariés, et diminue ensuite avec la taille de l'entreprise.

Le chef d'entreprise peut moduler le montant de la prime en fonction de certains paramètres - niveau de rémunération, durée de travail, temps de présence dans l'entreprise, ancienneté -, mais comme il s'agit d'une prime sur les résultats, il n'est pas possible d'exclure a priori certaines catégories. Dès lors, certains toucheront la prime alors qu'ils n'ont pas de problème de pouvoir d'achat. La préoccupation de ces personnes est de maintenir leur épargne pour préserver leur consommation future ou pouvoir acheter une maison par exemple. C'est pourquoi nous proposons de permettre le versement de la prime sous la forme d'un supplément d'intéressement.

Monsieur Karoutchi, je partage votre analyse. Monsieur Savoldelli, l'étude d'impact est chétive. Il est difficile de savoir ce que les mesures du texte vont coûter à chacun. La prime de pouvoir d'achat étant un dispositif incitatif, nul ne sait si les entreprises l'utiliseront ni dans quelle mesure. Quant à l'effet d'aubaine pour les entreprises qui envisageaient d'augmenter les salaires, l'Insee a évalué à 600 millions la perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale liée à la mise en oeuvre de la première version de la prime PEPA entre décembre 2018 et mars 2019. Les chefs d'entreprise estiment que la prime présente l'avantage d'être corrélée au cycle économique, sans obérer les ressources des entreprises en bas de cycle. Je préfère, dans mon amendement, l'intéressement, qui est lié aux performances de l'entreprise, qui ne sont pas uniquement d'ordre financier, à la participation, corrélée uniquement aux bénéfices, et donc versée uniquement en haut de cycle.

L'étude d'impact évalue le coût de la revalorisation du RSA pour les départements à 120 millions d'euros, ce qui correspond au montant qui devrait figurer dans le texte de l'Assemblée nationale, sous réserve de nouveaux arbitrages.

Monsieur Lurel, la question des loyers relève de la commission des affaires économiques. Certes les propriétaires bailleurs appartiennent dans leur majorité aux plus hauts déciles de revenu, mais il faut aussi prendre en compte le rôle majeur qu'ils jouent pour le marché du logement : tout le monde pourra-t-il accéder à un logement si plus personne n'investit dans l'immobilier ?

Je botterai en touche sur l'indemnité carburant qui figure dans le PLFR... De même, je ne reviendrai pas sur le partage de la valeur en 1981, période que je n'ai pas connue...

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