Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 16 octobre 2010 à 22h00
Réforme des retraites — Article 25 quater

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Rayant tout ce travail d’un trait de plume, plusieurs éléments d’une gravité certaine ont été introduits dans ce projet de loi, à la demande de l’Élysée, à la stupéfaction des professionnels de la médecine du travail. §

Permettez-moi de résumer la portée de ce cavalier.

L’essentiel me semble bien être la disparition de la relation étroite, intime, entre travail et santé. Et ce n’est pas rien !

En effet, le fondement de la médecine du travail était jusqu’alors « d’éviter toute altération de la santé du travailleur du fait de son travail ». Désormais, imaginons la nature de cette altération ; il ne resterait que la définition suivante : « Préserver la santé physique et mentale des travailleurs tout au long de leur parcours professionnel. »

De la sorte, vous faites disparaître, même si vous vous en défendez, toute référence aux risques professionnels inhérents au travail !

Voici, mes chers collègues, ce que m’écrivait il y a peu un médecin du travail de mon département : « Faut-il comprendre que nos priorités seront réorientées vers la santé publique ?

« Alors, que va donc devenir notre vigilance de médecin vis-à-vis des risques dans les entreprises : développement des RPS, risques chimiques émergents, souffrance au travail, apparition de nouvelles pathologies...

« Dans des situations dont nous connaissons la difficulté, notre seul rempart est souvent l’indépendance de notre fonction que ce texte remet aussi en question. »

Ainsi, mes chers collègues, l’indépendance des médecins du travail est aussi mise à mal par cet article, qui, décidément, n’a pas sa place au sein du texte que nous examinons.

Mon correspondant poursuivait : « Autre élément, et non des moindres, le médecin du travail est mis en position de prendre la responsabilité de la reconnaissance de la pénibilité, laquelle pénibilité devrait permettre, au cas par cas, d’accorder ou non le taux d’invalidité permettant un départ à la retraite anticipé. Comment faire cela, alors que nous sommes de moins en moins nombreux et que même notre suivi médical individuel des salariés ainsi que celui des entreprises est de plus en plus problématique ? Cela nous met dans une position insoutenable. »

Si je vous ai lu ce courrier, ce n’est pas pour nier la nécessité de mettre en place une réforme de la prévention en santé au travail. Mais il doit s’agir d’une véritable réforme, dans l’intérêt exclusif de la santé des salariés, et non de la reproduction des dispositions que le MEDEF voulait, il y a un an, faire signer par les organisations syndicales qui, souvenez-vous, les ont toutes repoussées !

C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous appelons à ne pas laisser brader, au travers de cet article, une conquête sociale aussi fondamentale que la médecine du travail !

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