Cet article 8 est, à la vérité, un étrange objet.
En effet, le secteur de l’agriculture est marqué depuis plusieurs années – et ce fut singulièrement vrai en 2009 – par une profonde exacerbation de la concurrence entre pays européens, concurrence qui n’a, au demeurant, pas grand-chose de libre ni de non faussé.
Dans les faits, alors même que certains exploitants ne semblent pas toujours rechigner à utiliser une main-d’œuvre sous-payée et parfois non déclarée, l’agriculture française se retrouve en position de faiblesse face à la concurrence d’autres pays de l’Union – je pense notamment à l’Espagne et à l’Italie – qui ont fait du dumping social la source de la rentabilité de leur production.
Les moindres garanties offertes aux salariés agricoles, saisonniers ou réguliers, et le recours massif à une main-d’œuvre extracommunautaire, qui subit des conditions sociales indignes du XXIe siècle et dont le recrutement se déroule bien souvent de la pire des façons, constituent le principal argument de vente des produits italiens et hispaniques, qui envahissent l’ensemble des marchés européens et dont la production standardisée échappe d’ailleurs assez souvent au mode naturel de culture.
En conséquence, l’agriculture française, malgré ses atouts et notamment la qualité de ses produits, malgré des process de production de moins en moins consommateurs de produits phytosanitaires et de plus en plus respectueux de l’environnement, se trouve victime du développement du hors-sol d’un côté et du « moins-disant » social de l’autre.
Dans un secteur comme celui-ci où la valeur ajoutée est pour le moins faible, cette situation conduit à la déstabilisation de l’ensemble de la filière. Or, quelle réponse propose-t-on aujourd’hui ? Eh bien, l’article 8 prévoit tout bonnement de faire en sorte que le « moins-disant » social puisse s’appliquer aux emplois saisonniers agricoles en tendant à exonérer les exploitations du paiement des cotisations sociales afférentes à l’emploi des salariés agricoles concernés !
De fait, on creuse un peu plus le déficit de la sécurité sociale tout en légalisant, d’une certaine manière, par une exonération de charges tous les comportements peu respectueux des règles du jeu qui pouvaient d’ores et déjà avoir cours dans notre pays.
On s’engage là dans une course vers l’abîme en matière de conditions de travail et de rémunérations avec nos concurrents les plus « vifs » sur ces créneaux de production, c’est-à-dire les pays du sud de l’Union, alors qu’il vaudrait sans doute mieux que nous œuvrions à l’échelle européenne pour relever le niveau des garanties et des normes sociales applicables au travail salarié agricole !
C’est donc pour refuser ce dumping social légalisé que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter notre amendement de suppression de l’article 8.