Il faut dire aux Français, qui acquittent une TVA à 5, 5 % lorsqu’ils achètent une baguette de pain, que l’arbitragiste qui spécule contre l’euro, faisant au passage augmenter le prix de leur baguette, sera à jamais débarrassé de l’épouvantable charge d’acquitter une taxe de 0, 05 %.
Je voudrais à ce sujet rappeler les propos tenus par Jim Flaherty, ministre des finances canadien, à l’issue de la réunion des ministres des finances du G20 en Corée du Sud, le 5 juin dernier : « Il est évident que la plupart des membres du G20 n’appuient pas l’idée d’une taxation universelle ». Autrement dit, déclarer attendre un accord international au niveau du G20 pour agir, c’est annoncer qu’il n’y aura pas de taxation des banques, c’est se condamner à l’impuissance.
Or nous ne sommes pas impuissants, et nous ne devons pas accepter de l’être. Les Allemands se sentent-ils impuissants lorsqu’ils annoncent la création d’une taxe spécifique sur les banques ? Nous sommes-nous sentis impuissants quand, sur l’initiative de Jacques Chirac, nous avons voté la taxation des billets d’avion ?
Notre souveraineté fiscale est-elle à ce point anéantie ? Qu’y a-t-il fondamentalement à craindre à imposer une taxe, au demeurant modeste, sur des transactions dont l’utilité économique est nulle, mais dont les dégâts qu’elles peuvent causer sont potentiellement dévastateurs ?
N’avons-nous plus confiance en l’influence que peut exercer la France sur ses voisins, européens notamment, par l’exemple de l’action ?
Troisième argument que l’on nous oppose : « Cette taxe ne freinera pas la spéculation ».
Pour tous ceux qui, dans cet hémicycle, considèrent que la spéculation est plus un bien qu’un mal, voilà une bonne nouvelle ! Je me souviens d’ailleurs des discussions épiques entre le rapporteur général de la commission des finances et notre ancien collègue Jean-Luc Mélenchon.
Je ne peux pas dire de combien cette taxe freinera la spéculation, mais l’augmentation des coûts de transaction sur les opérations internationales à court terme me semble plutôt aller dans ce sens que dans le sens contraire. Au demeurant, je rappelle que plusieurs pays ont mis en place des barrières à l’entrée des flux spéculatifs avec un succès probant.
En admettant que le volume des opérations concernées par cette taxe reste inchangé, nous aurions malgré tout lieu de nous réjouir de récupérer les recettes publiques que cette taxe produira. Car c’est évidemment dans le contexte financier créé par la crise globale que nous traversons qu’il faut se situer pour affirmer à quel point il est erroné d’alarmer sur les conséquences économiques de la taxe sur les transactions financières.
Nous subissons une crise économique sans précédent avec des pertes de production considérables qui ont ruiné l’équilibre des finances publiques. Nous avons soutenu un secteur financier qui, aujourd’hui, entend faire payer le prix de ses excès aux contribuables une deuxième fois. Ainsi que le disent les économistes, nous sommes en plein aléa moral, les incendiaires faisant payer les pompiers.
Le Gouvernement a annoncé ce qu’il faut bien appeler une politique d’austérité. Cette politique excessive par les effets déflationnistes qu’elle risque fort de déclencher, nous devons tenter de la modifier.
Force est de constater que la proposition de loi du groupe du RDSE représente une aide pour le Gouvernement.