Intervention de Nadine Bellurot

Réunion du 3 août 2022 à 14h30
Projet de programme de stabilité pour 2022-2027 — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Nadine BellurotNadine Bellurot :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec des finances publiques parmi les plus dégradées de la zone euro que nous entamons ce nouveau quinquennat.

Nous héritons d’un déficit public plus de deux fois supérieur à celui de 2017 et d’une dette publique qui a progressé de 17 % en cinq ans. La cote d’alerte est atteinte. Nous étions nombreux à le penser ; nous voilà confortés dans notre diagnostic, dont vous contestiez la pertinence il y a quelques mois, monsieur le ministre.

Il est donc de notre responsabilité d’aborder ce débat avec lucidité et prudence. Lucidité quant aux effets de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt sur la dette ; l’horizon est non pas à cinq ans, mais plutôt à dix ou quinze ans. Prudence sur les prévisions qui fondent la vision stratégique que vous nous proposez : le Haut Conseil des finances publiques a rappelé leur fragilité.

Le cycle inflationniste ne s’éteindra pas l’an prochain, ni même dans quatre ans, tant les raisons structurelles qui le portent sont fortes et cumulatives. Il faudra donc « dépenser bien, dépenser utilement », comme vous l’avez dit, monsieur le ministre. Cela signifie soutenir le niveau d’investissement public, notamment local, qui constitue un appui indispensable à notre économie.

Le programme de stabilité manque de ce point de vue de cohérence. À l’instar des fameux contrats de Cahors, il prévoit d’imposer une nouvelle fois un encadrement des dépenses des collectivités. Ces dernières devront augmenter de 0, 5 % de moins que leur tendance naturelle, mais elles pourraient croître malgré tout en valeur de 24 milliards d’euros sur la durée du quinquennat.

Selon des estimations de l’Association des maires de France, l’effort demandé aux collectivités sur leurs dépenses de fonctionnement serait de 15 milliards d’euros sur les cinq prochaines années par rapport à l’année 2022.

L’encadrement de l’autofinancement et de l’évolution des recettes réduira l’offre de services à la population et constituera un risque pour le pouvoir d’achat, dans un contexte où la consommation des ménages recule.

L’encadrement des dépenses de fonctionnement apparaît contradictoire, dans un contexte de relance marqué par le besoin d’investissement et de soutien aux acteurs locaux. En 2021, les soldes d’exécution des collectivités étaient proches de zéro. Il est donc incompréhensible et inconcevable qu’elles continuent à être pénalisées. Encadrer ces dépenses reviendrait à reproduire les erreurs du passé.

Depuis 2014, la baisse des dotations a en effet coûté 46 milliards d’euros à l’ensemble des collectivités locales, sans que cela produise d’effet sur le déficit de l’État, qui est même reparti à la hausse, en volume, depuis 2018.

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