Intervention de Daniel Gremillet

Commission des affaires économiques — Réunion du 20 juillet 2022 à 8h40
Bilan de la politique de la ville — Examen du rapport d'information

Photo de Daniel GremilletDaniel Gremillet, rapporteur :

Le deuxième volet de nos propositions tend à développer un nucléaire plus disponible, plus accessible et plus sûr.

Dans un contexte critique, nous estimons nécessaire de garantir la sécurité d'approvisionnement et de réduire la dépendance extérieure. Le Gouvernement doit soutenir le groupe EDF dans la résolution des difficultés actuelles du parc nucléaire. Il doit aussi présenter un plan d'actions pour assurer la sécurité d'approvisionnement cet hiver et les suivants. À cette fin, l'énergie nucléaire et l'hydrogène bas-carbone doivent être valorisés, dans le cadre des plans national et européen visant à sortir des hydrocarbures russes. Parce que ces énergie et vecteurs nécessitent des matières ou des métaux critiques importés, y compris en provenance de Russie, une stratégie formelle de sécurisation doit être adoptée pour diversifier les sources, instituer des réserves, promouvoir une extraction ou une production nationale ou européenne ou encore développer des substituts. Le cas échéant, les contrôles de l'État peuvent être étendus sur ce point.

De plus, nous jugeons crucial de maintenir une énergie compétitive et accessible pour les consommateurs, tout en veillant à la soutenabilité des fournisseurs. À l'échelle nationale, l'impact du « bouclier tarifaire » » sur les consommateurs et les fournisseurs doit être évalué. Il faut se pencher, d'une part, sur les particuliers, les entreprises et les collectivités non éligibles aux tarifs réglementés et, d'autre part, sur le groupe EDF. De plus, la répercussion du bénéfice du relèvement du dispositif de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) sur les consommateurs doit être contrôlée. À l'échelle européenne, le marché européen de l'électricité appelle à être réformé, avec notamment une révision du principe du coût marginal. En outre une neutralité technologique doit être garantie pour l'énergie nucléaire et pour l'hydrogène bas-carbone, sur le plan de la fiscalité.

Enfin, nous appelons à dimensionner la sûreté et la sécurité nucléaires. De nouveaux risques peuvent être mieux intégrés : la résilience au changement climatique, composante de la sûreté, et la cyber-résilience, composante de la sécurité. Une sélection en amont des sites des nouveaux réacteurs et l'institution de plans d'adaptation pour ceux existants peuvent permettre de répondre au premier défi. Les moyens des opérateurs de la sûreté doivent être consolidés, tandis qu'une culture de la sûreté et de la sécurité doit être promue. De plus, l'effort de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour superviser les installations ukrainiennes et, au-delà, protéger par des conventions internationales les installations nucléaires doit être appuyé.

Le dernier volet vise à développer un nucléaire plus divers, plus innovant et plus propre.

Nous estimons indispensable de saisir l'occasion de la relance du nucléaire pour promouvoir l'hydrogène bas-carbone, aux côtés de celui renouvelable. À cette fin, il faut, à court terme, faire fonctionner les électrolyseurs à basse température à partir du réseau et, à long terme, développer des électrolyseurs à haute température, pour coupler la production nucléaire avec celle d'hydrogène. Pour y parvenir, à l'échelon européen, une neutralité technologique doit être garantie à l'hydrogène bas-carbone, sur le plan des objectifs et des infrastructures. Des contrats de long terme peuvent être institués dans le cadre de la réforme du marché de l'électricité. À l'échelon national, il faut compléter les dispositifs de soutien. Nous devons boucler le financement des PIIEC, à hauteur de 1,6 milliard d'euros, et pérenniser les appels à projets de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Les collectivités territoriales volontaires doivent être autorisées à soutenir l'hydrogène au-delà du seuil actuel de 5 % des recettes appliqué. Enfin, il faut donner un rôle actif à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et un rôle facultatif aux autorités organisatrices de la distribution d'électricité (AODE). La mutualisation des projets autour de bassins de vie doit également être autorisée.

Autre impératif, nous estimons nécessaire de poursuivre les travaux sur la fermeture du cycle du combustible usé. Le Gouvernement doit soutenir le groupe Orano, dans la résolution des difficultés actuelles des installations. Il doit aussi proposer une solution au devenir des usines de retraitement-recyclage, qui arriveront à leur cinquième décennie de fonctionnement en 2040, dès la loi quinquennale. D'ici cette loi, il doit examiner l'impact de la relance complète du nucléaire sur le cycle du combustible. La relance du nucléaire doit être accompagnée d'une stratégie de retraitement-recyclage, en utilisant les combustibles usés - le MOX et l'URE -, à court terme, en passant au multi-recyclage, à moyen terme et en développant des réacteurs de quatrième génération, comme le projet Astrid, à long terme. Un crédit d'impôt sur les technologies de multi-recyclage peut y contribuer.

Sur le stockage des déchets, il faut consolider les moyens de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), pour favoriser la filière, dont le projet de stockage géologique profond Cigéo. L'appel d'offres en cours sur les déchets doit mettre l'accent sur la complémentarité, et non l'opposition, entre les différentes technologies. Même sans arrêt de réacteurs, il faut maintenir des compétences démantèlement-assainissement, pour les besoins domestiques futurs ou étrangers immédiats.

Enfin, au-delà de la production, nous estimons crucial de favoriser la recherche et l'innovation nucléaires. Tout d'abord, une gouvernance commune peut être instituée entre industriels et chercheurs. Plus encore, la recherche sur le vieillissement du parc existant, notamment sur l'évolution et l'adaptation des composants, est nécessaire. Au total, la recherche sur la diversification de l'énergie nucléaire doit être encouragée, sur le plan des usages, qui vont au-delà de l'électricité avec la chaleur et l'hydrogène, et des puissances, qui sont plus petites. Trois projets du CEA doivent être menés à bien : le SMR Nuward, l'électrolyseur haute température Genvia et le multi-recyclage. Au-delà de la fission, la fusion doit elle aussi être favorisée, le projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) ne devant pas être affecté par la guerre russe en Ukraine. Toutes les technologies innovantes doivent donc être soutenues dans le cadre de l'appel d'offres sur les réacteurs en cours.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion