Intervention de Muriel Jourda

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 21 septembre 2022 à 11h10

Photo de Muriel JourdaMuriel Jourda :

rapporteur. – Nous avons tâché de dresser un tableau exhaustif de la situation, mais il nous a été très difficile de trouver des chiffres fiables. Le ministère de la Justice indique que le nombre de mineurs mis en cause est passé de 100 000 à 200 000 entre 1992 et aujourd’hui, mais le ministère de l’Intérieur ne reconnaît pas ces chiffres... Difficile dans ces conditions d’en faire usage. Nous ne disposons donc d’aucune photographie complète du phénomène. Les dernières statistiques datent de 2016, mais elles ne couvrent pas toutes les infractions et ne distinguent pas entre crimes et délits, ni entre infractions principales et secondaires. Nous n’avons donc qu’une vision partielle qui rend difficile notre exercice d’évaluation de cette politique publique. En outre, ces chiffres ne rendent pas compte de la réalité de la délinquance car le nombre de mis en cause dépend de l’activité des services et de la propension des victimes à porter plainte. Autre manque flagrant, l’absence de prise en compte du rôle des réseaux sociaux qui peuvent faciliter, voire accroître les infractions.

En proportion, la délinquance des mineurs est restée stable entre 2016 et 2019 au regard de l’ensemble de la délinquance, à 20 % de l’ensemble des faits de délinquance. Mais la typologie des infractions a évolué : elles concernent moins les biens et plus les personnes. Dans le cas de violences sexuelles sur mineurs, les mineurs eux-mêmes représentent 46 % des mis en cause alors qu’ils ne sont que 21 % en population générale. S’agissant des infractions à la législation sur les stupéfiants, les 13-17 ans représentaient 20 % des mis en cause en 2021, alors qu’ils ne sont que 6 % de la population. On assiste également à un rajeunissement de la population qui se livre à ces trafics de stupéfiants : les jeunes concernés ont plus souvent treize ans que quinze…

On constate une diminution du nombre de condamnations au profit de mesures alternatives aux poursuites, qui concernent désormais 55 % des affaires – alors que cette proportion n’est que de 40 % pour les majeurs.

Dernier élément préoccupant : le taux de récidive et de réitération dans les cinq ans dépasse les 50 %.

Nous vous proposons donc quatre recommandations : mettre en place un suivi statistique de la délinquance des mineurs sur l’ensemble de la chaîne pénale ; développer des enquêtes sociologiques sur les auteurs des faits ainsi que des suivis de cohortes ; améliorer le repérage des infractions liées au numérique et évaluer le rôle des réseaux sociaux sur les phénomènes de délinquance des mineurs ; enfin, procéder à des études plus fines de la récidive et de la réitération, prenant également en compte les mineurs ayant fait l’objet de mesures alternatives aux poursuites ou de mesures éducatives, pour avoir une meilleure idée de l’efficacité du suivi judiciaire des mineurs délinquants.

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