Intervention de Pierre Moscovici

Commission des affaires sociales — Réunion du 5 octobre 2022 à 16h30
Rapport annuel de la cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale — Audition de M. Pierre Moscovici premier président de la cour des comptes

Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes :

Madame Imbert, je vous assure que je partage votre préoccupation à l'endroit de l'évolution des dépenses de soins de ville. Je répète que, sur les dix dernières années, ces dépenses ont évolué trois fois plus vite que l'inflation - hors dépenses de médicaments et dépenses de biologie, qui, elles, ont été strictement encadrées, du moins jusqu'à la crise sanitaire.

Nous serons d'accord sur le fait que chaque euro que la collectivité consacre à la santé de la population doit être dépensé à bon escient. Ce que l'on appelle les soins de ville représente plus de la moitié des dépenses de l'Ondam et les honoraires des professions libérales de santé représentent près de 40 % des dépenses de soins de ville. Il faut donc se pencher sur la façon dont ces dépenses évoluent, d'un point de vue tant quantitatif que qualitatif. Votre question porte sur l'encadrement quantitatif, mais vous conviendrez que l'enjeu est aussi qualitatif : comment mieux dépenser.

Sur le plan qualitatif, j'observe que l'annexe B au PLFSS fixe la trajectoire des dépenses d'assurance maladie globalement, sans distinguer la ville ou l'hôpital, ce qui n'est pas la solution. J'observe aussi que le projet de loi de programmation des finances publiques fixe la trajectoire des soins de ville, mais cette enveloppe est plus large que celle des dépenses fixées par les conventions signées par l'assurance maladie. C'est pourquoi nous proposons, dans le Ralfss, que les objectifs pluriannuels de dépenses par convention soient rendus publics à l'issue des négociations et qu'un suivi régulier du coût détaillé et complet de chaque convention soit mis en place pour permettre notamment au Parlement d'en assurer le contrôle.

Nous proposons également que les dispositifs juridiques qui existent soient effectivement mis en oeuvre. Lorsque les dépassements sont prévisibles, les mesures de revalorisation tarifaires doivent être reportées jusqu'à un an, comme la loi le prévoit.

Vous m'avez aussi interrogé sur la radiothérapie et le financement des actes innovants. Je crois qu'il faut les financer par des dotations d'investissement ad hoc qui soient contrôlables.

J'ai déjà en partie répondu sur les dépenses de médecine de ville. Il est clair qu'il y a un lien entre le développement de la politique ambulatoire et l'accélération des dépenses de soins de ville, mais pas dans les proportions observées. En tout état de cause, les dépenses des cliniques privées augmentent rapidement. Il faut donc envisager une régulation pour les soins de ville et pour les soins en établissement.

Monsieur Savary, s'agissant de l'extension des majorations de pension pour enfants aux retraités des professions libérales et du coût de cette mesure, je souhaite d'abord souligner que les règles d'attribution de ces majorations sont différentes selon les régimes qui les versent. Pour les retraités qui ont relevé de plusieurs régimes durant leur carrière, cela entraîne des différences de situation peu compréhensibles, source d'un sentiment d'iniquité - peut-être justifié, du reste. Nous pensons qu'il est nécessaire, d'abord, d'aligner ces majorations de pension sur la base d'un même taux de 10 % ; ensuite, de supprimer les surmajorations existantes dans les régimes spéciaux, dont celui de la fonction publique ; enfin, de plafonner le montant total perçu par retraité de ces différentes caisses selon le principe déjà appliqué par l'Agirc-Arrco. C'est dans ce nouveau cadre qu'il serait possible d'envisager l'extension de ces majorations aux caisses de retraite des professions libérales. De la sorte, notre système gagnerait en simplicité et en efficacité, tout en permettant la maîtrise des dépenses.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion