Intervention de Lucien Stanzione

Réunion du 4 octobre 2022 à 14h30
Prise en compte des territoires des savoir-faire et des cultures dans l'élaboration de réglementations européennes d'harmonisation — Débat organisé à la demande de la commission des affaires européennes

Photo de Lucien StanzioneLucien Stanzione :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la filière lavande et lavandin constitue un sujet particulièrement propice pour alimenter la discussion et fournir des exemples variés de difficultés avec les réglementations européennes.

En effet, l’huile essentielle de lavande de Haute-Provence est le révélateur de l’inadaptation des réglementations européennes par l’absence de prise en compte des difficultés des territoires historiques de production, des savoir-faire et des cultures traditionnelles.

Cette présentation se déroulera à deux voix, avec ma collègue Marie-Pierre Monier, sénatrice de la Drôme.

Point n’est besoin de rappeler les enjeux nationaux, agricoles, économiques, touristiques, patrimoniaux, énergétiques et de maintien de l’emploi, mais aussi climatiques et d’aménagement du territoire autour de l’huile essentielle de lavande.

La France est le premier producteur mondial d’essence de lavandin et le deuxième d’huile essentielle de lavande. Ces productions sont concentrées dans trois départements du sud-est de la France : le Vaucluse, la Drôme et les Alpes de Haute-Provence, qui comptabilisent 87 % des superficies nationales.

Ces productions emblématiques de la Provence sont créatrices de valeur ajoutée.

Dans mon département de Vaucluse, qui comprend notamment les contreforts du mont Ventoux, j’ai été alerté, dès le mois d’août 2021, par les maires, les agriculteurs et les distillateurs de lavande et de lavandin de la crise économique majeure que traverse la filière, en raison de la très forte baisse des cours – moins 60 % en trois ans –, engendrée par une surproduction importante, par un doublement des surfaces plantées en dehors des zones historiques de cette culture, en particulier dans l’immense plaine de la Beauce.

Les coûts de l’énergie sont venus s’ajouter à cette situation, ainsi que des aléas climatiques tels que le gel, puis la sécheresse et le manque d’eau de cet été, ainsi que la prolifération d’un ravageur, la cécidomyie, contre laquelle il est urgent d’agir.

Nous pilotons, avec ma collègue Marie-Pierre Monier, une série d’actions. Permettez-moi d’attirer votre attention sur la nécessité d’une lutte sanitaire pour la filière lavandicole.

Alors que le Gouvernement a toujours martelé le message selon lequel il n’y aurait pas d’interdiction des produits phytosanitaires actifs tant que des solutions n’étaient pas trouvées, nous sommes aujourd’hui face à la situation inverse.

L’interdiction est bel et bien là. Les produits phytosanitaires ne sont plus fabriqués, alors qu’aucune solution n’a été trouvée. Aussi convient-il de soutenir et de renforcer la recherche de méthodes alternatives efficaces. La solution la plus pragmatique serait d’homologuer de nouveau, à titre temporaire, les anciens produits, dans l’attente de solutions efficaces.

Face à l’incertitude, la filière, via le Crieppam (Centre régionalisé interprofessionnel d’expérimentation en plantes à parfum aromatiques et médicinales), souhaite être soutenue.

Je ne peux que déplorer une telle situation : pourquoi avoir interdit ce type de produit avant que des solutions intermédiaires aient pu être trouvées ?

L’une des réponses élaborées pour répondre à cette grave crise a été d’envisager des mesures d’aide à l’arrachage dans les territoires de plaine où il est possible et rentable de planter des céréales.

Sur l’initiative commune de Marie-Pierre Monier, Jean-Yves Roux et moi-même, le Sénat a voté à une large majorité, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2022, la création d’une enveloppe budgétaire de 10 millions d’euros, en vue d’aider à l’arrachage dans certaines zones.

Or les services ministériels expliquent aux professionnels de la filière que la réglementation européenne relative à la concurrence pourrait interdire de mettre en œuvre de telles mesures, considérées comme une aide exclusive en faveur des lavandiculteurs français.

Toutefois, il semble que des solutions pourraient être trouvées, si les mesures d’arrachage interviennent dans le cadre d’une restructuration ou d’une diversification de la filière.

Nous espérons que vous pourrez vous montrer convaincante pour défendre auprès de la Commission européenne l’octroi de ces 10 millions d’euros, qui sont indispensables à la survie des producteurs et transformateurs de lavande et de lavandin.

Il faut peut-être, pour éviter tout blocage de cette aide par la Commission, envisager de l’étendre aux autres pays producteurs européens de lavande et de lavandin comme l’Italie, l’Espagne ou la Grèce, qui pourraient l’utiliser face à la nécessité de sauvegarder leur culture.

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