Intervention de Agnès Canayer

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 29 septembre 2022 à 9h00
Services déconcentrés et préfectoraux — Examen du rapport d'information

Photo de Agnès CanayerAgnès Canayer, rapporteur :

De fait, plus de la moitié des maires, notamment dans les communes de moins de 1 000 habitants, estiment que l'offre de services publics s'est dégradée ou est défaillante sur leur territoire.

Ce constat rend nécessaire une clarification du rôle de l'État. Il faut mieux répartir les compétences de l'État dans les territoires, sur la base de deux principes essentiels : subsidiarité et différenciation, dans l'esprit des 50 propositions du président Gérard Larcher. Ainsi l'action de l'État pourra-t-elle irriguer l'ensemble des territoires, jusqu'au dernier kilomètre.

La contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales nous apparaît comme une modalité intéressante de la souplesse nécessaire, permettant de sortir de la logique des appels à projets. Cette dernière, en imposant aux collectivités un cadre défini, bride leurs initiatives. Elle requiert aussi de leur part une grande technicité dans les réponses, dont les plus petites communes n'ont pas les moyens.

La clarification de la place de l'État dans les territoires passe aussi par le fameux couple maire-préfet, mis en avant pendant la crise sanitaire. Mais cette relation, parfois présentée comme idyllique, est marquée sur le terrain par un certain nombre de grincements et d'ambivalences.

Mme la préfète Bernadette Malgorn nous a expliqué qu'une nomination de préfet nécessitait de trouver une concordance entre un profil, un département, son terrain, ses caractéristiques et ses élus, des circonstances et des enjeux variables dans le temps. C'est un peu le mouton à cinq pattes...

Il nous paraît judicieux de recueillir l'avis des élus dans le cadre de l'évaluation des préfets, afin de prendre pleinement en compte le « retour terrain ». Cette avancée est d'autant plus nécessaire dans la perspective de la fonctionnalisation des préfets, qui impose une professionnalisation renforcée de cette filière.

Autre sujet de tension entre le préfet et les maires : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Le choix des projets appartient au préfet pour les montants inférieurs à 100 000 euros, les élus locaux n'ayant pas toujours accès aux informations sur ces attributions. Dans mon département, nous avons reçu un énorme fichier consultable à la loupe...

Nous proposons donc d'instaurer plus de transparence dans l'attribution des dotations d'État en abaissant à 20 000 euros le seuil au-delà duquel l'avis de la commission d'élus est nécessaire.

Deux thèmes sont emblématiques de la logique d'accompagnement que les élus attendent de l'État : l'offre d'ingénierie territoriale et le contrôle de légalité.

En matière d'ingénierie, les communes les moins peuplées recourent surtout au département, voire aux intercommunalités ; les plus grandes font appel davantage à des prestataires privés - c'est le cas de 29 % d'entre elles -, de manière accessoire à l'État et à ses opérateurs - 19 % le font - ou s'auto-accompagnent. La question se pose donc : l'État est-il encore capable de remplir cette fonction d'ingénierie, d'autant plus importante que les projets eux-mêmes et les contraintes pesant sur les collectivités territoriales requièrent une plus grande technicité ?

L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) marque un progrès intéressant, mais elle souffre d'un vrai déficit de notoriété auprès des élus locaux. Par ailleurs, l'offre, parfois alléchante, ne bénéficie pas des financements nécessaires. Les études initiales sont souvent financées, mais c'est plus compliqué pour la mise en place des projets, ce qui est source de frustration. Sur ce sujet, nous faisons confiance à nos collègues Céline Brulin et Charles Guené pour mener un travail plus approfondi d'évaluation.

En ce qui concerne le contrôle de légalité, l'État a décidé de prioriser un certain nombre d'actes majeurs, mais le taux de contrôle reste autour de 90 %. Plus qu'un contrôle descendant, les élus attendent un conseil juridique en amont. La technique du rescrit, introduite par la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, reste extrêmement confidentielle : 74 % des élus n'y ont jamais recouru et 63 % ne la connaissent même pas. Les travaux de notre délégation devront approfondir cette question du rescrit.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion