Intervention de Roland Lescure

Réunion du 5 octobre 2022 à 21h30
Cinq plans pour reconstruire la souveraineté économique — Débat sur les conclusions d'un rapport d'information de la commission des affaires économiques

Roland Lescure :

L’agenda européen est extrêmement ambitieux, et nos réponses devront évidemment s’inscrire dans ce cadre. Ma conviction, lorsque nous parlons d’industrie française, c’est que nous portons tous le même maillot – je l’ai dit dans cet hémicycle et ailleurs, sur les travées de gauche comme de droite, dans ma position comme dans la vôtre.

Bien sûr, certains élus, d’un extrême ou un d’un autre, n’aiment pas beaucoup l’entreprise ni l’industrie, par méconnaissance, ou pire, parce qu’ils doivent en partie leur succès au déclin de l’industrie depuis des décennies. Mais ici, au Sénat, après avoir entendu les prises de parole, je crois pouvoir dire que presque tout le monde aime l’industrie française. Pour l’essentiel, nous sommes alignés sur les mêmes objectifs.

Je partage plusieurs des constats formulés dans votre rapport. Quant aux recommandations, je le répète, la plupart sont déjà appliquées ou figurent sur notre feuille de route.

En revanche, je veux être clair : la protection, oui ; le protectionnisme, non. L’industrie française, pour être forte, doit être solide sur ses bases, mais aussi capable de conquérir des marchés dans une logique de réciprocité loyale – vous êtes nombreux à avoir insisté sur cette loyauté, qui est effectivement importante.

L’industrie française doit aussi être capable d’attirer des investisseurs internationaux. À cet égard, le sommet Choose France est une vraie réussite ; nous allons accélérer sur ce point.

Ce rapport, très fouillé, nous sera utile, car il établit un panorama et dresse une feuille de route de nos collaborations à venir, sur des sujets très concrets, tels que la simplification des installations industrielles.

Je veux affirmer mon engagement très fort à agir sur deux points.

Le premier a été abordé et figure dans le rapport : c’est la mobilisation de la commande publique. Nous avons voté ensemble – j’étais alors député, donc je peux recourir à la deuxième personne du pluriel – des dispositions concrètes, dans la loi Pacte, dans la loi dite Asap ou dans la loi Climat et résilience. Il faut désormais les appliquer.

Trop souvent, les acheteurs publics n’osent pas les utiliser. Nous devons les rassurer : oui, nous devons acheter durable et innovant ; oui, nous pouvons acheter local et en circuit court. Respecter ces critères, ce n’est pas systématiquement acheter français, mais cela commence tout de même à y ressembler…

J’ai rencontré et mobilisé la direction des achats de l’État et l’Union des groupements d’achats publics et des acheteurs publics. Nous allons former davantage, faire du sourcing, promouvoir nos start-up et PME et faciliter les échanges en amont des procédures.

Par ailleurs, nous devons impérativement accélérer sur la question de la formation. Le quinquennat qui s’est achevé a engrangé des succès : nous n’avons jamais eu autant d’apprentis en France – nous en comptons autant que l’Allemagne. Nous devons aller plus loin encore et donner envie à de jeunes femmes et de jeunes hommes de rejoindre l’industrie et les y former, à un âge plus précoce qu’actuellement. Je m’y attacherai et j’espère que vous nous y aiderez.

Notre industrie connaît une actualité forte avec la crise de l’énergie, qui agit comme un nouveau choc pétrolier. Je le dis très clairement : l’industrie française ne sera pas la victime collatérale de la guerre en Ukraine. Mon rôle est de la protéger, de l’aider, de l’accompagner et de la soutenir partout où je le puis.

Mon cabinet travaille d’arrache-pied avec les commissaires aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises, les fameux CRP, qui, dans les régions, aident les entreprises à naviguer parmi les dispositifs d’aide, encore trop complexes malgré notre effort de simplification.

Le Gouvernement travaille à l’échelle européenne pour parfaire l’arsenal de protection de l’industrie française. Nous avons signé ce matin une charte avec les distributeurs d’énergie, de manière qu’ils informent bien en amont, offrent systématiquement des contrats et permettent, notamment à nos PME, qui souffrent aujourd’hui du prix de l’énergie, de faire jouer à plein la concurrence.

Le Gouvernement a pris des mesures ambitieuses pour les entreprises, mais les prix de l’énergie, c’est un fait, ne seront plus jamais aussi bas. C’est la fin d’une disponibilité abondante et sans limites, raison pour laquelle nous devons œuvrer à guérir notre industrie de sa dépendance aux hydrocarbures. L’industrie de la décarbonation sera le nouveau fer de lance de l’économie française et européenne.

En conclusion, nous tenons un cap stratégique et y affectons des moyens au travers des plans France Relance et France 2030. Sans naïveté, nous nous montrons offensifs. Depuis 2017, l’effort collectif que nous avons fourni avec les chefs des entreprises industrielles a permis de créer plus de 50 000 emplois nets.

De la même manière que la désindustrialisation résulte de trente ans de cécité collective, la réindustrialisation sera le fruit d’une vision commune. Vous y prendrez toute votre part, ici, à Paris, mais surtout dans vos territoires, où je me rends semaine après semaine et où je serai très heureux de vous accompagner.

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