Intervention de Isabelle Sancerni

Commission des affaires sociales — Réunion du 12 octobre 2022 à 9h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 – Audition de Mme Isabelle Sancerni présidente et de M. Nicolas Grivel directeur général de la caisse nationale des allocations familiales cnaf

Isabelle Sancerni, présidente de la Caisse nationale des allocations familiales :

– Je précise, s’agissant des moyens, que nous sommes en difficulté : nous avons subi des rendus d’effectifs supérieurs à nos charges et nos stocks de dossiers sont au plus haut depuis dix ans. Nous n’aurons pas d’effectifs supplémentaires début 2023, nous discutons de la possibilité d’anticiper les départs, mais, à défaut d’accord sur la période transitoire, nous ne pourrons pas embaucher. Au-delà de cette transition, l’extension, au 1er janvier 2023, de l’intermédiation en matière de pensions alimentaires exige également de nouveaux effectifs, dont nous ne disposons pas. J’y insiste, car il nous faudra du temps pour recruter et former. Nous ne pouvons pas nous contenter d’autorisations financières si les autorisations d’embauche ne suivent pas.

En ce qui concerne les difficultés informatiques, nos équipes travaillent à mettre en place ce qu’exigera la feuille de route, même si nous ne disposons pas encore de la COG. Nous mettrons tout en œuvre pour mener à bien ces réformes, mais il faudra tenir compte du besoin d’expérimentation ainsi que du temps indispensable pour tester le dispositif. En matière de solidarité à la source, par exemple, et singulièrement du RSA, nous ne pouvons pas nous permettre de mettre des familles en difficulté ; les processus devront donc avoir été testés. Les délais que nous annonçons sont, à ce titre, déjà très inférieurs à ceux que nous avions demandés et nous ne pourrons pas faire mieux.

Sur le service public de la petite enfance, nous attendons de connaître les demandes qui nous seront faites. Cette évolution implique le même reste à charge pour les familles en individuel et en collectif, qui découle de la mesure concernant le CMG. Reste la difficulté posée par les crèches qui ne relèvent pas de la prestation de service unique (PSU). Dans les crèches PSU, le reste à charge des familles est encadré. Nous avons, en outre, créé des bonus pour l’accueil d’enfants en situation de handicap ou issus de familles précaires et nous avons renforcé les crèches dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), en horaires atypiques, ainsi que les crèches à vocation d’insertion professionnelle (Avip), grâce à des financements complémentaires à la PSU. En revanche, nous ne disposons pas d’éléments particuliers dans ce dispositif au sujet des micro-crèches relevant de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje). Pour ce qui concerne la qualité, les normes ont été généralisées, mais les services de PMI, qui doivent vérifier leur bon respect, manquent de professionnels pour effectuer cette tâche.

À mon sens, nous avons besoin d’un pilotage national de la petite enfance afin de faire remonter vers le ministère ce qui est réalisé sur le terrain et de garantir un fonctionnement homogène entre familles et entre territoires. Nous avons des objectifs d’accueil en crèches PSU, mais ce sont les collectivités territoriales qui décident de créer des places. Il faut donc s’appuyer sur les deux outils déployés dans cette COG : le schéma départemental des services aux familles et les conventions territoriales globales (CTG). Ces dernières permettent à la CAF et aux collectivités concernées de dresser un bilan des besoins des familles et de l’offre qu’il est possible de mettre en place en matière de petite enfance, d’enfance et de jeunesse, de parentalité, d’animation de la vie sociale, de logement et d’accès aux droits. Cela nous offre une visibilité pluriannuelle accompagnée par des financements pluriannuels de la CAF, via les fonds nationaux, les fonds « publics et territoires », et des fonds locaux. Ces dispositifs sont en cours de déploiement et nous sommes bien avancés dans ce domaine. Il convient toutefois de porter une attention particulière aux outre-mer : quand nous atteignons 60 % d’accueil du jeune enfant en métropole, nous ne sommes qu’à 17 % en outre-mer.

L’accès aux droits est un point très important pour le conseil d’administration de la Cnaf, puisque nous nous occupons du Fonds national d’action sociale. En outre, nous devons nous assurer que le service est disponible pour toutes les familles sur l’ensemble du territoire. À ce sujet, je souhaite que la prochaine COG prévoie, sur le fonds « publics et territoires », une ligne dédiée à l’itinérance, de manière à amener vers les familles certains dispositifs de service.

S’agissant des assistantes maternelles, il n’existe pas, pour elles, de fonds de garantie de salaire, comme pour les autres salariés, mais ce n’est pas forcément à la branche famille de gérer cela.

La pénurie de professionnels de la petite enfance concerne 10 000 postes, qui ont été créés, mais qui ne sont pas pourvus. De plus, il manque de nombreux professionnels de l’animation dans les ALSH. En conséquence, des colonies de vacances ont été annulées, malgré des réservations de familles, faute de personnel. Nous devons donc nous intéresser à l’enfance, d’autant que les prestations dans ce secteur n’ont pas été revalorisées. Un effort a été porté sur la petite enfance, avec l’augmentation de la PSU, mais nous n’avons pas pu faire la même chose avec la prestation de service dédiée aux ALSH ou aux centres sociaux.

Enfin, s’agissant du transfert de la branche maladie vers la branche famille, le processus relève d’une position philosophique, mais notre préoccupation est que cela ne préempte pas la COG, alors que nous ne sommes qu’aux prémices des discussions. Nous craignons que ce qui reste ne soit affecté que sur la petite enfance. Ce serait, certes, une bonne chose en soi, mais il nous faut absolument prêter également attention à l’enfance et à la jeunesse.

M. René-Paul Savary. – Sur l’accès aux droits à la source, vous avez connu des difficultés quant aux APL avec le glissement ; 2 % d’erreurs, c’est un chiffre important, qui met les personnes en difficulté. Les discussions ont-elles avancé pour réaliser un calcul sur des données individuelles et non agrégées ? Vous êtes-vous rapprochés de l’Agirc-Arrco, spécialisée dans ce domaine, pour réduire cette marge d’erreur ?

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