La cinquième crise est la crise climatique. Le texte ne parle pas que de sécurité, ou alors il en parle au sens large, comme je l’ai indiqué au début de mon propos.
Notre modèle de sécurité civile, qui est résilient, qui s’appuie sur des sapeurs-pompiers valeureux et un système de volontariat original et qui est fondé sur des départements et un État et une Europe aidant fortement le fonctionnement de notre pays, se trouve face à deux grands problèmes.
Le premier, comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, est que les sapeurs-pompiers interviennent de plus en plus dans des domaines ne relevant pas de leur compétence propre. Ainsi, ils remplacent de plus en plus les médecins dans les déserts médicaux ou là où le système de santé est mal organisé pour répondre aux difficultés des Français ; je sais que le ministre de la santé y travaille. Nous avons essayé de répondre à cette question dans la loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras, que vous avez votée. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Le second problème, ce sont les crises climatiques. Elles ne font que commencer. On pense tous aux mégafeux, comme ceux qui ont touché la Gironde et d’autres départements. J’en profite pour signaler que nous avons dénombré cet été plus de feux au nord qu’au sud de la Loire. Je pense à des départements comme le Jura, les Vosges, le Maine-et-Loire, le Finistère, dont les pompiers et les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) n’étaient pas habitués à intervenir pour des feux de forêt de plus de 1 000 hectares.
Il y a aussi les crises climatiques extrêmement fortes en outre-mer, mais également en métropole. Je pense à ce qui s’est passé à Saint-Martin avec Irma au début du quinquennat précédent, mais aussi dans la vallée de la Vésubie, il n’y a pas si longtemps. Certes, grâce à l’action de la sécurité civile et des collectivités locales, nous avons été au rendez-vous, mais très en deçà de ce qu’il faudrait préparer dans un contexte de réchauffement climatique généralisé.
C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de prévoir dans ce texte un certain nombre de dispositions en termes de renouvellement de la flotte, comme les hélicoptères, ou de pouvoirs du préfet en cas de crise. Je rappelle que celui-ci n’a pas aujourd’hui la main pour travailler avec toutes les agences et toutes les administrations, ce qui peut être dramatique dans la gestion des crises. C’est tout le travail d’enrichissement des modèles de sécurité civile que nous souhaitons mener avec vous. Maintenant que le réchauffement climatique est au rendez-vous, et même si neuf feux sur dix sont d’origine humaine, les actuels taux d’hydrométrie – moins de 10 % de taux d’eau dans la forêt de Gironde – font que les forêts brûlent très largement, que l’incendie soit d’origine criminelle ou involontaire.
Pour toutes ces raisons, le projet de loi contient de grandes dispositions concernant notre modèle de sécurité civile.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, au mois de janvier prochain, après un débat qui aura lieu ici dans les prochaines semaines, j’aurai l’honneur de présenter un texte sur l’immigration. Si cette thématique est absente du projet de loi qui vous est aujourd’hui soumis, elle n’est pas absente de la politique gouvernementale. Le Sénat lui-même souhaite des textes resserrés ; nous essayons de faire en sorte qu’il en soit ainsi. Certes, ce projet de loi contient un rapport annexé assez long, mais qui n’est pas d’ordre législatif.
Avec ce texte, nous sommes dans la continuité du réarmement du ministère de l’intérieur. Ainsi, nous allons recréer 200 brigades de gendarmerie dans l’ensemble de vos territoires, alors même que les gouvernements précédents en ont supprimé plus de 500 depuis trente ans. Nous allons continuer à augmenter les effectifs de police dans l’ensemble des commissariats de France. Nous allons créer 200 formations militaires de la sécurité civile (Formisc). Je pense également à l’Agence du numérique, puisqu’il faut créer l’impôt à la source au ministère de l’intérieur, qui est un peu arriéré, si j’ose dire, dans ce domaine. Sans doute faut-il que nous modernisions, comme nous l’avons fait à Bercy précédemment ; cela demande aussi des moyens et une agence unique.
Surtout, et le Président de la République l’a évoqué hier, pour la première fois depuis dix-sept ans, nous recréons des sous-préfectures et des postes d’agents de préfecture dans les préfectures, de l’ordre de 400 à peu près. Ce n’est peut-être pas encore assez, mais, pour la première fois, la reprise démographique du nombre d’agents de préfecture, si importants pour nos territoires, est au rendez-vous. Je crois que le grand débat présidé par le Président de la République avec les maires de France, mais aussi la pandémie et le plan de relance ont montré à quel point les agents des préfectures étaient utiles pour faire le lien avec les collectivités locales, les aider en ingénierie et, de manière générale, en action publique de l’État.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter un texte qui, je le crois, est très important pour le ministère de l’intérieur. Je remercie l’ensemble du Parlement, qui, dans sa quasi-unanimité, a toujours soutenu les forces de l’ordre ou les forces de sécurité civile. Celles-ci, vous le savez, risquent leur vie chaque jour, chaque nuit, pour nous protéger.
J’ai la grande responsabilité de diriger en votre nom les femmes et les hommes qui prennent ces risques. Je ne peux pas terminer mon discours sans penser aux dix-sept enterrements que j’ai eu à présider ni aux 3 400 blessés parmi les forces de l’ordre depuis le 1er janvier dernier. Derrière les chiffres, les milliards et les pourcentages, derrière les textes réglementaires ou législatifs et derrière les réformes, ce sont des femmes et des hommes de terrain qui risquent leur vie, ce qui n’est le cas dans aucun autre ministère.
Je veux leur dire que, certes, nous aurons ici des discussions politiques, mais je n’ignore pas que nous ferons, selon nos opinions et convictions, tous au mieux pour les protéger.