Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 11 octobre 2022 à 14h30
Orientation et programmation du ministère de l'intérieur — Discussion générale

Gérald Darmanin :

Les maires et les polices municipales ont alors fait beaucoup de manifestations. Il a obligé – c’était sans doute moins démocratique à l’époque – les forces de police à mieux s’organiser, d’où la naissance de la police criminelle. Face à une criminalité organisée, il a voulu une police organisée.

Face à une criminalité numérique, internationale, multiforme, qui nécessite désormais que la police des étrangers soit en lien avec la police judiciaire, avec la police de sécurité publique, avec les renseignements pour pouvoir lutter contre les délinquances fortes que vous dénoncez à juste raison, il faut réformer la police nationale. Pas contre tout le monde, ni de manière autoritaire ! Mais cela fait trente ans que l’on parle de cette réforme : Pierre Joxe en a parlé, le livre blanc de la sécurité recommandait de la faire, puis elle a été évoquée dans le Beauvau de la sécurité. Au bout de trente ans, le moment est peut-être venu d’agir…

Je veux rassurer ici les magistrats. Ils auront évidemment toujours l’immense et entière responsabilité des enquêtes. Eux seuls peuvent donner des ordres aux policiers et aux gendarmes dans le cadre des enquêtes. Ni le préfet, ni le directeur départemental de la police nationale, ni le commandant de gendarmerie n’auront ce pouvoir. Les magistrats auront le libre choix du service, en application de l’article 12 du code de procédure pénale, et les affaires de probité et de délinquance financière, qui inquiètent les préfets et les élus, remonteront à un échelon supérieur.

Nous allons continuer à discuter et à concerter. Mais, je tiens à le souligner, ce que nous faisons là n’est pas sorti de mon chapeau : c’est le résultat de trente ans de réflexions sur le sujet. Sans préempter le débat que nous pourrons avoir, je rappelle quand même qu’il s’agit là de dispositions de nature non législative. Nous souhaitons changer 176 textes réglementaires. Nous avons par honnêteté évoqué la réforme dans le rapport annexé, qui pourra être amendé.

Néanmoins, j’insiste : il faut savoir réformer lorsque le besoin s’en fait vraiment sentir. Étant le ministre de l’intérieur qui a obtenu le plus de moyens pour les forces de l’ordre et qui les défend urbi et orbi, je pense pouvoir me permettre de leur dire qu’il faut savoir se réformer parfois, tout en respectant profondément leur métier, leurs filières et leurs actions. La police a été créée pour les citoyens, et pas pour nous-mêmes.

Monsieur Benarroche, vous me demandez de ne pas faire d’amalgames politiques faciles. C’est, en quelque sorte, votre vaccin : vous vous prémunissez par avance de ce que je pourrais dire. Pourtant, pour améliorer la souffrance au travail et le sens du devoir des policiers, il vaut mieux, me semble-t-il, ne pas trop les insulter en clamant que la police tue. Cela les aiderait peut-être à aller mieux.

Et, alors que vous demandez de ne pas faire d’amalgames politiques, il paraît légèrement excessif de me qualifier d’Orwell à la tribune de la Haute Assemblée. D’abord, je n’ai pas son talent littéraire. Ensuite, je suis né en 1982, et pas en 1984.

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