Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 11 octobre 2022 à 14h30
Orientation et programmation du ministère de l'intérieur — Rapport annexé

Gérald Darmanin :

À mes yeux, je le précise, ce n’est pas une insulte. Ce n’était pas une attaque ad hominem.

En tout état de cause, il s’agit d’un sujet très important pour la Nation et pour la sécurité de nos concitoyens. Vos interrogations, de même que celles des acteurs concernés, n’ont rien de médiocre, elles sont légitimes. Dans ce contexte, nous nous efforçons d’avancer en encadrant la discussion.

Mesdames, messieurs les sénateurs, pour la troisième fois, je vous propose de modifier ma propre réforme, notamment afin d’y inclure les critères que vous souhaitez. Je ne peux pas faire mieux ! Vous portez de graves accusations : vous nous accusez de porter atteinte à l’indépendance de la justice, voire de remettre en cause l’État de droit et la démocratie.

Permettez donc que je défende le garde des sceaux, qui est responsable des libertés individuelles, mais aussi le ministre de l’intérieur que je suis, qui est chargé des libertés publiques. Je dispose d’ailleurs d’une direction des libertés publiques représentée ici même, sur le banc du Gouvernement. Comme tout démocrate et tout républicain, je suis très attentif aux libertés publiques.

C’est pourquoi je vous dis : chiche ! Pour vous montrer qu’il n’y a aucun problème et qu’une grande partie des arguments avancés reposent sur des fake news – pour le dire en bon patois tourquennois –, je vous propose de modifier l’amendement afin que vous soyez assurés que l’article 12-1 du code de procédure pénale demeure inchangé. Les magistrats conservent évidemment le libre choix du service d’enquête, leur indépendance n’est nullement remise en cause. En outre, aucun OPJ, aucun service ne fera autre chose que ce qu’il fait actuellement.

Je déduis de vos propos, monsieur Sueur, que la gendarmerie nationale et la préfecture de police évoluent dans un état de droit parallèle qui est une forme de dictature et que nous ne nous en étions pas rendu compte ces deux cents dernières années. Dans ce cas, il est urgent de réformer l’une et l’autre, mais ce n’est pas ce que propose la Haute Assemblée. Ou alors, vous menez un combat politique à la suite des manifestations qui ont été organisées, ce que je peux très bien comprendre.

Puisque vous ne saisissez pas la balle au bond et que vous n’acceptez pas ma proposition, je me vois contraint, comme le rapporteur Daubresse, d’émettre un avis défavorable sur ces amendements de suppression, alors que j’aurais souhaité que nous puissions travailler ensemble.

Je pense profondément, monsieur Sueur, que la police nationale a été créée, non pas pour le ministre de l’intérieur, pour les directeurs ou pour les policiers eux-mêmes, mais pour protéger les gens et pour lutter contre la délinquance.

Nous faisons le constat que cela ne fonctionne pas : sachons en tirer les conséquences, car c’est notre travail, même si cela bouscule des habitudes.

Nous pouvons défendre des visions différentes de ce qu’il faudrait faire. Le groupe écologiste défend notamment une conception particulière, et je le respecte. Mais n’opposez pas de faux arguments à cette réforme, car le sujet mérite un véritable débat. Pour notre part, nous sommes convaincus que cette réforme sera une réussite.

J’ajoute que, en dépit de l’avis défavorable que j’émets, je m’engage à présenter devant la Haute Assemblée le rapport que j’ai demandé à trois inspections, dont celle de la justice, et à débattre avec vous avant le moindre changement réglementaire des textes du ministère de l’intérieur.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion