Afin de réprimer plus efficacement les violences sexuelles et sexistes, les violences conjugales et les violences intrafamiliales, il est régulièrement proposé de créer, sur le modèle de l’Espagne, une juridiction spécialisée.
Cet amendement vise à inscrire dans le rapport annexé le principe de l’expérimentation d’une telle juridiction, avant son éventuelle généralisation, sur le modèle de la démarche qui avait été retenue récemment pour les cours criminelles départementales.
En tant que rapporteurs, nous ne sommes pas opposés à cette idée et la voie de l’expérimentation nous paraît intéressante. Néanmoins, il nous semble difficile de trancher une question aussi complexe au détour d’un amendement, sans avoir mené aucune audition ni aucun travail préparatoire, en amont de la discussion en séance publique. En outre, nous n’avons abordé cette question qu’à deux reprises au sein de la commission des lois.
Si le présent amendement n’est pas dépourvu de lien avec le texte – en particulier en matière d’outrage sexiste –, vous conviendrez qu’un amendement réformant l’organisation judiciaire aurait davantage sa place dans un texte défendu par la Chancellerie plutôt que par le ministre de l’intérieur.
De plus, sur le fond, de nombreuses questions restent en suspens, concernant notamment la procédure : cette juridiction spécialisée appliquerait-elle les procédures de droit commun en vigueur devant le juge aux affaires familiales, devant le tribunal correctionnel, devant la cour d’assises ?
Il nous faut également réfléchir au champ des compétences de cette juridiction spécialisée : doit-elle reconnaître toutes les violences sexuelles et sexistes ou s’intéresser plutôt au champ des violences conjugales et intrafamiliales ?
Cette question est très difficile à trancher, faute d’avoir entendu les acteurs concernés. Vous n’êtes pas sans savoir, d’abord, que certains professionnels expriment des réserves à l’égard de ces juridictions spécialisées et que, par ailleurs, le Gouvernement a confié une mission à notre collègue Dominique Vérien et à la députée Émilie Chandler sur le traitement judiciaire des violences intrafamiliales. Leur travail, qui va durer six mois, permettra d’éclairer les enjeux et de répondre aux nombreuses questions techniques et juridiques d’un tel projet.
Avis défavorable.