Je sais bien que nous avons déjà réformé l’ordonnance de protection et je prends le pari devant vous, mes chers collègues, que nous la réformerons encore. Sur ces sujets, en effet, notre connaissance est presque empirique : au fur et à mesure que nous réformons et que nous observons la façon dont la loi est appliquée, nous découvrons des lacunes et des dysfonctionnements.
Mon but est simple. Il y a des sujets sur lesquels je fais confiance à mes collègues de l’hémicycle, car je sais qu’ils en sont des spécialistes. Certes, messieurs les rapporteurs, vous n’avez pas auditionné tous les avocats sur cette question. Pour ma part, depuis dix ans, je ne fais que travailler sur le dossier. Si j’explique qu’il y a un problème, particulièrement dans ce cas précis, de grâce, faites-moi confiance ! Les avocats me le disent ; des juges aux affaires familiales me le disent également.
Je le reconnais, monsieur le ministre, l’ordonnance de protection est une affaire de droit civil. Mais vous connaissez bien la nature quelque peu hybride de cette ordonnance : cette mesure conduit à des décisions d’éloignement et d’interdiction d’approcher qui sont presque de nature pénale – d’ailleurs, dans les mois à venir, nous discuterons de la capacité des procureurs à prononcer des ordonnances de protection.
Bien sûr, ces domaines appartiennent aux juges civils, mais nous sommes dans l’urgence : pendant que nous débattons, pendant que nous nous demandons si ce texte est le bon véhicule législatif, il y a des juges aux affaires familiales qui ne connaissent pas bien le dispositif de l’ordonnance de protection, qui n’y sont pas encore habitués ou qui le découvrent – les chiffres m’échappent à cet instant, mais le nombre d’ordonnances a été multiplié par dix en deux ans. Et, je puis vous l’assurer, il y a un problème de condition cumulative.
La menace précède le danger. Si, ensuite, le juge saisi en appel annule l’ordonnance de protection au motif qu’elle n’est pas conforme à la loi, ce sont des femmes qui se retrouvent sans protection ! Après, on parlera de dysfonctionnement ; on constatera que telle femme ayant demandé une ordonnance de protection ne l’a pas obtenue et qu’il y a eu passage à l’acte, alors que toutes les menaces étaient connues au moment du refus de l’ordonnance, et cela parce que la loi ne prévoit pas le bon cadre.
Vraiment, faites-moi confiance, mes chers collègues !