Un parlementaire, nous le voyons tous les jours, doit faire les deux – avec rigueur et méthode, comme l’ont dit M. le président de la commission des lois et M. Hervé.
Monsieur Benarroche, à la différence de votre proposition, nous n’avons pas présenté cet amendement après que la commission a été réunie. De plus, nous avons refusé des amendements dont certains étaient certes issus des groupes d’opposition, mais dont d’autres émanaient de la majorité sénatoriale, vous en conviendrez.
M. Loïc Hervé et moi-même connaissons très bien avec le problème de la sécurité dans les transports, puisque nous avons été les rapporteurs de la proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés. Je suis donc d’accord pour dire que, sur le fond, notre collègue M. Tabarot a raison. Cependant, nous n’avons pu recevoir ses amendements, eu égard au périmètre défini par le président de la commission à partir du texte du Gouvernement, qui évoque les « violences commises sur la voie publique ».
D’ailleurs, M. Retailleau a présenté un amendement qui a reçu un avis défavorable, car il ne respectait pas non plus le périmètre, et il l’a très bien compris.
Mon cher collègue, l’amendement que j’ai présenté avec M. Loïc Hervé, au nom de la commission des lois, tend pleinement à s’inscrire dans le périmètre de l’article 45 de la Constitution. Son objet est non pas de faire plaisir à telle ou telle personne, mais de faire en sorte que nous soyons le plus rigoureux possible et que nous évitions les risques d’inconstitutionnalité, desquels nous ne sommes jamais à l’abri.
Pour bien faire comprendre ce qui nous a poussés à écrire cet amendement, je vais relire le rapport de la commission : « Les auditions conduites par les rapporteurs ont montré l’urgence et l’importance d’améliorer la réponse pénale sur trois enjeux essentiels ».
Le premier enjeu est celui des « violences faites aux élus ». Mme Delattre s’est exprimée à raison à ce propos, et j’aurais aimé pouvoir adopter son amendement. Je voterai des deux mains pour sa proposition, réalisée à partir de remarquables travaux, dès qu’elle viendra en discussion. Nous sommes évidemment d’accord sur tous ces sujets – vingt ans durant, j’ai été le premier vice-président de l’association des maires du département du Nord !
D’ailleurs, le sujet des violences faites aux élus est le premier qu’évoquent les associations d’élus locaux. C’est un sujet consensuel au sein de notre assemblée, où nous sommes d’abord les représentants des élus locaux.
Les violences faites aux élus ont augmenté de 57 % en un an, comme l’a rappelé M. le ministre. Toutes les semaines, parce que nous faisons notre travail avec rigueur et méthode, nous rencontrons tous, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, des élus qui nous parlent avant tout de ce problème. Ensuite, ils évoquent l’énergie, mais c’est un autre sujet…
Les deux autres enjeux que nous avons identifiés sont « les refus d’obtempérer » et « les rodéos urbains ».
Bien sûr, de nos auditions avec la Conférence nationale des procureurs de la République, avec le Conseil national des barreaux, etc., le premier sujet qui ressort est la réforme de la police judiciaire. Nous en avons débattu, nous ne l’avons pas esquivé, c’est le moins que l’on puisse dire !
Il y a toutefois un autre enjeu qui ressort de nos échanges avec les policiers : les refus d’obtempérer.
J’attire votre attention sur un point. J’ai auditionné toutes les institutions – c’est le rôle du rapporteur. J’ai également reçu, à titre informel, pour me faire une idée – mon père était commissaire de police, ce n’est un secret pour personne ! –, de nombreuses personnes originaires de mon bon département du Nord, après qu’elles me l’ont demandé. J’ai écouté leurs propos, sans donner mon opinion. Tous m’ont parlé en premier du refus d’obtempérer.
Je suis très content d’avoir débattu de l’article 1er. Nous aurions pu nous dire que nous perdions notre temps, car il s’agit simplement d’un rapport d’orientation dépourvu de dispositions législatives. Or, mes chers collègues, nous n’avons pas perdu notre temps !
À cet égard, je remercie de nouveau M. le ministre du temps qu’il a pris pour nous répondre – on se plaint parfois que les ministres, quel que soit le gouvernement, répondent trop rapidement – et pour nous expliquer avec pédagogie ce qu’il voulait faire et pourquoi.
Moi qui ai appartenu à un gouvernement, comme Mme Rossignol, je puis vous assurer que, lorsqu’un ministre, animé par ses convictions, souhaite proposer une grande réforme à son ministère, il prend lui-même la plume, en écoutant, bien sûr, son cabinet. M. Darmanin, malgré les reproches que l’on peut lui adresser, est personnellement convaincu par la réforme qu’il nous présente, chacun l’a bien compris.
Oui, le nombre de refus d’obtempérer m’a fortement marqué ! Monsieur Durain, j’ai beaucoup d’estime et de respect pour vous – c’est réciproque, je le sais. Nous avons réalisé ensemble un rapport d’information, durant lequel nous n’avons rencontré aucune difficulté, parce que nous n’avons pas posé les problèmes de manière partisane. Ainsi, nous partageons une vision commune sur les systèmes de traitement d’images par intelligence artificielle – M. Hervé a beaucoup travaillé sur ce sujet également –, pour laquelle il n’y a pas eu la moindre difficulté d’arbitrage.
L’amendement que vous avez présenté avant-hier soir tend à poser une question légitime : l’alourdissement des peines va-t-il permettre de mieux lutter contre les refus d’obtempérer ? Je respecte votre opinion – en quelque sorte par définition –, d’autant plus qu’elle est cohérente avec votre argumentation. D’ailleurs, je me suis également posé cette question.
Pour autant, monsieur Durain, voici le chiffre que M. le ministre nous a donné : le nombre de refus d’obtempérer a augmenté de 27 %, et non pas de 17 % comme je l’avais dit plus tôt. J’ai présenté ce chiffre, qui m’a fortement marqué, à la suite de la réunion de travail organisée par M. le ministre, place Beauvau, pour la commission des lois.
Par ailleurs, la situation s’aggrave depuis que les policiers sont davantage autorisés à faire usage de leurs armes : en 2017, pour 102 tirs de la police nationale et 52 de la gendarmerie, on compte 254 refus d’obtempérer ; en 2021, pour 157 tirs de la police nationale et 44 de la gendarmerie, on compte 201 refus d’obtempérer. Autrement dit, le nombre de refus d’obtempérer et le nombre de tirs augmentent fortement.
Imaginez les conséquences dramatiques non seulement pour les victimes d’un chauffard, mais également pour les policiers. Ne croyons pas qu’ils jouent aux cow-boys. Utiliser son arme pour un policier est un drame, oui, un drame !