Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 13 octobre 2022 à 10h30
Orientation et programmation du ministère de l'intérieur — Après l'article 7 bis

Gérald Darmanin :

Je souhaite, pour clore cette séance du matin, répondre aux arguments de MM. Durain et Benarroche, avant d’évoquer cet amendement, auquel je ne peux qu’être défavorable.

Le débat sur les refus d’obtempérer, ainsi que sur la manière dont les policiers et les gendarmes interpellent les personnes et dont la justice les condamne, est sain en démocratie. Les techniques de la police et de la gendarmerie doivent être sans aucun doute améliorées, à proportion de ce que la technologie permet de faire.

Il ne faudrait pas pour autant croire, comme l’a dit M. Benarroche et comme, sans vous faire de procès d’intention, vous semblez le penser, monsieur le sénateur, qu’en changeant de techniques d’interpellation, on fera baisser le nombre de refus d’obtempérer.

Ces faits se produisent parce que des gens se mettent en danger eux-mêmes, mettent en danger la vie des autres et commettent un délit, voire un crime.

Répétons-le : la première des choses à faire, c’est de s’arrêter quand un policier ou un gendarme le demande. Si l’on fait cela, on est déjà bien parti.

Or nous constatons, malheureusement, que ceux qui refusent d’obtempérer le font pour plusieurs raisons, qu’il est intéressant d’analyser afin de comprendre l’augmentation de ces faits. Cette évolution concerne toutes les sociétés occidentales comparables à la nôtre et ne semble pas être liée à l’augmentation de la violence en général.

J’ai eu l’occasion de le dire, une de ces raisons tient peut-être au fait que certains automobilistes conduisent sans permis de conduire, qu’ils ne l’aient pas ou qu’il leur ait été retiré. Il ne faut pas en sous-estimer l’importance. Ils n’ont plus de points, mais ils vont travailler, parfois faire la fête et ils ne s’arrêtent pas, car ils savent qu’ils encourent une condamnation.

Évidemment, le ministre ne saurait proposer de supprimer le permis de conduire ; mais nous devrions peut-être nous interroger sur notre manière de traiter la sécurité routière. L’équilibre est très difficile à trouver entre la condamnation de comportements provoquant des accidents extrêmement graves, qui enlèvent trop de vies sur les routes de France.

Peut-être, et je me suis déjà exprimé à ce propos, pourrions-nous imaginer une autre règle s’agissant des infractions entraînant le retrait d’un faible nombre de points. Il faudrait néanmoins maintenir une sanction envers ceux qui commettent des excès de vitesse qui ne sont pas élevés, mais qui peuvent conduire, aujourd’hui, à la suite du retrait de points, à la perte du permis de conduire. Les personnes concernées sont souvent des usagers de la route très réguliers, car nous ne sommes pas tous égaux devant le permis à points, dans nos comportements et dans nos habitudes. Je le répète, il peut être intéressant d’y réfléchir.

La plupart des individus que nous interpellons après ces refus d’obtempérer sont toutefois responsables de crimes et de délits plus graves. Ils sont parfois eux-mêmes recherchés par la police ou par la gendarmerie ; il est alors logique qu’ils ne s’arrêtent pas, parce qu’ils sont en fuite et qu’ils auraient dû être en prison ou faire l’objet de poursuites pénales. Certains d’entre eux se trouvent sous l’emprise de stupéfiants ou transportent des produits illicites, et ces faits peuvent se cumuler. La majorité des refus d’obtempérer n’est pas le fait de personnes qui n’ont rien à se reprocher.

De même que 100 % des gagnants ont tenté leur chance, 99 % des automobilistes qui refusent de s’arrêter lorsqu’un policier ou un gendarme le leur demande ne le font pas au nom de convictions politiques, ou parce que la façon dont les forces de l’ordre interviennent leur déplaît. Ils le font parce qu’ils ont des choses à se reprocher et qu’ils sont eux-mêmes les auteurs de délits ou de crimes au moment où ils tombent sur un policier ou sur un gendarme.

N’inversons pas la charge de la preuve. Que nous réfléchissions à la façon dont les choses se passent, c’est heureux, car il est toujours possible de s’améliorer ; que nous étudiions les causes de ces refus d’obtempérer, là encore, c’est heureux : il ne faut cependant pas croire que, en changeant les techniques d’interpellation, on diminuerait le nombre de refus d’obtempérer. Ce n’est pas la bonne manière de voir les choses.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

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