Je prête toujours attention et aux propos de M. Sueur et à ceux de M. Richard, qui m’a interpellé.
Dans son avis du 10 mars 2022, le Conseil d’État, qui a disjoint l’article consacré aux amendes forfaitaires délictuelles (AFD), que nous allons examiner dans quelques instants, n’a rien trouvé à redire sur la suppression de l’habilitation, ce qui devrait nous donner à réfléchir.
Il énonce ainsi, à propos de cette dispense, que « le projet de loi insère dans le code de procédure pénale un article 15-5 nouveau qui, d’une part, rappelle que “seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d’une enquête ou d’une instruction” et, d’autre part, dispose que “la réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut-être contrôlée à tout moment par un magistrat à son initiative ou à la demande d’un particulier. L’absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements ne saurait emporter, par elle-même, nullité de la procédure”. Les mêmes règles sont introduites dans le code des douanes.
« L’objet de la mesure est de dispenser ces agents de l’obligation de produire, dans la procédure d’enquête ou d’information, une fiche relative à leur habilitation pour chaque consultation d’un traitement, comme l’exige la jurisprudence à peine de nullité de la procédure » – le Conseil d’État cite l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 19 février 2019.
Le Conseil d’État poursuit : « L’accès des données personnelles contenues dans ces fichiers aux seules personnes régulièrement autorisées est au nombre des garanties exigées par la directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière ou d’exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données […]. »
Il conclut : « Si l’absence de l’habilitation versée au dossier ne pourra plus, en vertu du projet, être à elle seule, une cause de nullité de la procédure, l’absence d’habilitation de l’agent ayant consulté les données - comme le rappelle le projet - demeure quant à elle une cause de nullité qu’il appartient aux personnes concernées, et le cas échéant aux juridictions compétentes, de soulever dans les conditions prévues par le code de procédure pénale […]. »
Nous supprimons bien l’habilitation générale, mais l’absence d’habilitation particulière reste une cause de nullité. C’est sans doute la raison pour laquelle le Conseil d’État est moins sourcilleux que vous, monsieur le président Sueur.
Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques.